Lundi soir, à la Maison du patrimoine, Louis Sarkozy, fils cadet de l’ancien président de la République, était l’invité du CLAB (Comité de liaison des associations bruscaines). Venu présenter son ouvrage Napoléon Bonaparte – L’Empire des livres, il a attiré un public nombreux. Il s’est confié sur son parcours, sa vision du politique et sa passion pour l’empereur.

Enfant, Louis Sarkozy a grandi dans l’atmosphère des palais de la République. « J’ai passé un peu moins d’un an à l’Élysée à temps plein, et pas mal de vacances au cœur du pouvoir », raconte-t-il. Le décor l’a marqué: « Je jouais dans la pièce où Napoléon a signé sa seconde abdication. Quand on est le fils de mon père, l’histoire de France, les grands personnages, c’est quelque chose d’omniprésent. »

De cette expérience singulière, il garde une relation particulière au pouvoir, à la fois intime et critique. « J’apprécie énormément le politique, pas forcément la personnalité, mais l’action, l’activité », affirme-t-il. Et de développer: « Le problème, en France, c’est qu’on a vidé la vie étatique de politique et la vie politique de pouvoir. Résultat: un sentiment d’impuissance qui nourrit la montée des extrêmes. »

Une analyse qu’il relie naturellement à son sujet du moment: « L’œuvre de Napoléon, c’est ça: un politique qui avait le pouvoir d’incarner une vision et de transformer la France. Moi, j’admire le politique qui prend des décisions. » Dans Napoléon Bonaparte – L’Empire des livres, il met en lumière la boulimie de lecture de l’empereur. Avant chacune de ses campagnes, il commandait des centaines d’ouvrages: topographie, statistiques de population, agriculture, récits militaires des généraux passés par ces territoires…

Le pouvoir des livres

« Il lisait tout, même les textes les plus arides, sans se contenter de fiches résumées », souligne l’auteur. Cette frénésie était telle qu’un espion bien placé pouvait deviner la prochaine destination des armées françaises rien qu’en observant les commandes de livres. L’information était jugée si stratégique que les achats restaient secrets. Pour Napoléon, le livre devenait un outil militaire, politique et symbolique à part entière. « C’est le premier chef d’État français à se faire peindre devant une bibliothèque, avec Plutarque sur son bureau », rappelle Louis Sarkozy, signe que les ouvrages faisaient aussi partie intégrante de sa mise en scène de pouvoir.

Napoléon fut un génie du storytelling. « Chaque bataille est une peinture. On le montre franchissant les Alpes sur un cheval blanc digne d’Hannibal, alors qu’en réalité il était sur un âne et a failli y rester », sourit-il. Deux siècles plus tard, cette fabrique d’images continue de nourrir la légende napoléonienne, universellement reconnaissable. Mais pour lui, l’héritage le plus précieux est ailleurs: dans la sagesse stoïcienne. Sénèque en ligne de mire: « Vis ta vie comme si tu étais constamment observé par un grand homme du passé. » « Moi, ça m’aide énormément, psychologiquement. Faire du sport, travailler, écrire… ça me structure », confie Louis Sarkozy. « Mais si on se compare, on se suicide. Churchill à mon âge avait déjà trois livres et deux guerres derrière lui, Bonaparte sortait d’Arcole, Nicolas Sarkozy s’apprêtait à devenir maire… »

L’héritage Sarkozy

Le parallèle avec son père, il l’assume sans s’y enfermer: « On se compare parfois, mais pour notre santé mentale mieux vaut éviter. » Son aîné, rappelle-t-il, reste avant tout « le fils d’un immigré hongrois sans un mot de français, entré dans la Légion étrangère. On n’a rien à envier au rêve américain. Son élection fut avec le taux de participation le plus fort de la Ve République. » Il conclut, admiratif: « Aujourd’hui, il est plus posé, presque dans la posture du sage. C’est vraiment celui qu’on vient consulter, l’édile, l’oracle, le temple de Delphes… »