Vous venez de prolonger avec l’UBB jusqu’en 2029. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?

C’était un choix naturel. J’arrivais déjà à la moitié de mon premier engagement. Laurent (Marti, le président) m’a fait part de son envie de continuer, mon envie était totalement réciproque. Je suis très bien où je suis. L’UBB a les arguments sportifs, économiques, structurels pour tutoyer l’excellence sur les années à venir. Sportivement, c’est un des endroits où il faut être. Je suis ravi de la confiance que me renvoie la direction du club.

Depuis votre arrivée, l’UBB a joué trois finales en deux ans et a remporté son premier titre (Champions Cup). C’était au-delà de vos objectifs ?

Quand Laurent m’a contacté quand j’étais en Afrique du Sud pour rejoindre l’UBB, j’étais déjà conscient du potentiel. Si on m’avait dit qu’on allait jouer trois finales, je ne l’aurais peut-être pas cru à ce moment-là. La première année, l’ambition était de se qualifier. Le fait que le titre soit arrivé sur la deuxième année a donné de la confiance dans la puissance du projet.

Vous avez souvent dit qu’un manager est embarqué dans une « machine à laver ». Vivez-vous mieux cette situation aujourd’hui ?

L’expérience aidant, il y a eu un apprentissage par rapport à ça. C’est toujours une réflexion d’actualité : garder les batteries au vert pour l’ensemble du staff est une vraie préoccupation. On va tester de nouvelles choses cette année. On veut rester en mouvement, que tout le monde s’épanouisse. Avec les deux finales de l’an dernier, on a mesuré dans certains départements du staff de la fatigue, des tensions, qu’il ne faudra pas renouveler. C’est mon travail de penser à cette forme de développement personnel. Moi aussi, j’ai fait mon cheminement.

Vous entamez votre 3e année à l’UBB, ce sera la 6e en 2029, votre plus long bail en tant qu’entraîneur. Comment se renouvelle-t-on ?

Ce qui peut me sauver, c’est qu’à chaque fois que j’ai signé des engagements longs (XV de France, Bayonne), j’ai été viré dans la première année (rires) ! Plus sérieusement, c’est un vrai enjeu. L’équipe qu’on a mise en place il y a deux ans va rester la même dans sa manière de fonctionner ensemble. Mais il va falloir qu’on soit en mouvement tout le temps. La performance sportive, c’est de la matière vivante. Cette capacité à se renouveler sur le fond mais aussi dans la forme est un enjeu majeur, ça occupe beaucoup mon esprit. Cela peut passer par des progrès dans la technologie par exemple.

“Le rafraîchissement personnel à long terme est parfois plus important que les performances à très court terme”

Qu’avez-vous changé dans la préparation d’avant-saison ?

C’est une saison très compacte, le menu est copieux. On a densifié le programme de transition qu’ont reçu les joueurs. On a changé le lieu du stage, on avait averti les joueurs que le stage à Faro (Portugal) serait très dur. Avec Thibault (Giroud, le directeur de la performance), on a cherché des environnements très chauds, pour que le corps développe des choses plus rapidement. On a modifié les protocoles d’entraînements et de récupération, mais aussi le planning de nos internationaux. Il y aura d’autres aménagements…

Les cadences du rugby, comme celles du football d’ailleurs avec le Paris SG qui a dû beaucoup enchaîner, vous font-elles peur ?

Quand on prend l’exemple du PSG, je me demande comment Luis Enrique fait pour se renouveler sur ses briefings d’avant-match. Nous, on va mettre des choses en place pour aérer le staff régulièrement. Il faut qu’on accepte que personne n’est indispensable. Le rafraîchissement personnel à long terme est parfois plus important que les performances à très court terme. On peut se passer pendant une semaine de Christophe Laussucq (coach de la défense) vu tout ce qu’il a mis en place jusqu’à maintenant, mais aussi de Noel McNamara (arrières), Shaun Sowerby (touche) ou même de Yannick Bru. Il faut que la machine UBB continue de tourner pendant que ces personnes profitent de ces semaines pour respirer, innover et réfléchir…

Concernant les joueurs, vous avez pris soin de mieux gérer les temps de jeu la saison dernière. Cela n’a pas empêché Louis Bielle-Biarrey, très utilisé par les Bleus, de finir rincé…

Nos joueurs ont fini l’année plus frais, plus disponibles et plus heureux que l’année précédente. Ils ont moins subi la saison. Quand on analyse les temps de jeu, les joueurs majeurs ont joué autant. Mais ils ont eu des week-ends de repos, l’équipe a gagné sans eux… Après, on doit encore évoluer sur les temps de jeu. On ne pourra pas continuer à faire jouer 30 matchs à Max Lucu. Notre problématique, c’est qu’il faut ajouter les matchs de l’équipe de France à ceux de l’UBB. Le recrutement a aussi été fait en ce sens.

Êtes-vous satisfait de l’intégration des recrues ?

Je suis déjà agréablement surpris de la volonté de remise en question et de la fraîcheur de l’ensemble de l’effectif. Les nouveaux se sont particulièrement bien acclimatés. Boris (Palu) et Gaëtan (Barlot) voulaient endosser en nouveau challenge, Martin (Page-Relo) a décliné sa tournée estivale avec l’Italie pour réussir son intégration avec nous, Valentin (Hutteau) nous frappe par son entrain, Louis (Mary) veut monter la marche de la Pro D2 au Top 14, Silesi (Rayasi) et Xan (Mousquès) sont eux aussi plein de fraîcheur, Cameron (Woki) retrouve son club de cœur… On a l’impression qu’ils sont là depuis longtemps.

Avec ce groupe, vous ne sentez pas de complexe par rapport au Stade Toulousain ?

Non (rires). Sur la première année, on était un outsider, on a vécu la saison qu’on devait vivre. Sur la deuxième année, on a été un challenger important et on a assumé ce statut. On a une très belle génération, beaucoup de jeunesse. Cette équipe prend de l’expérience. Sur cette année qui vient, on voudra être un vrai candidat crédible à la victoire, tout le temps. On a envie d’être un acteur majeur de la perf’.