Depuis Comme un million de papillons noirs (2018), Le chemin de Jada (2020) et La demeure du ciel (2021), Laura Nsafou compose une œuvre jeunesse attentive à l’inclusion des voix minorées, à la représentativité et à la transmission. Avec Le soleil viendra à toi, publié chez Cambourakis, elle poursuit cette démarche en explorant une expérience intime et pourtant universelle : l’envie de vacances contrariée par les difficultés économiques.
Ici, nous rencontrons Abeni, une petite fille impatiente de partir en vacances. Mais les contraintes financières viennent briser l’élan : sa mère n’a pas les moyens de voyager. Abeni, devinant sa peine, métamorphose l’appartement en carnet de voyage, pièce par pièce, avec la complicité de ses amies. La cuisine devient une prairie de libellules. Le salon, un ciel étoilé. La salle de bains, une jungle bruissante.
Les illustrations de Barbara Brun, luxuriantes et fourmillant de détails, traduisent la vitalité de cet imaginaire. Le regard s’attarde, s’émerveille, comme happé par ce foisonnement de décors bricolés qui transforment l’ordinaire en lieu d’évasion.
Laura Nsafou évoque avec tendresse des réalités encore marginales dans la littérature jeunesse : le manque d’argent, le droit aux vacances comme enjeu social, le renoncement silencieux des parents. Mais à cela répond la créativité débordante des enfants, capables de réinventer la joie à partir de presque rien.
Au fil des pages, se dessine un livre doux et lumineux, qui dit à la fois la fragilité des vies sociales et la force des liens affectifs. Plus qu’une histoire de tendresse et de débrouillardise, Le soleil viendra à toi montre combien la littérature jeunesse peut révéler, avec délicatesse et poésie, des réalités souvent invisibles.
Anne Plantier