Entre baisse du pouvoir d’achat et augmentation du coût des matières premières, de nombreux restaurants de Montpellier peinent à attirer une clientèle de plus en plus frileuse face à des prix jugés trop élevés.

Moins 20 % de chiffre d’affaires en juillet 2025 par rapport à l’année dernière pour les restaurateurs héraultais. Une situation qui n’est pas nouvelle, et qui se fait sentir sur tout le territoire national. Au point que 22 restaurants en moyenne déposent le bilan chaque jour à cause de difficultés économiques, selon la Banque de France.

Victime de la baisse de pouvoir d’achat des Français, les restaurants sont devenus une variable d’ajustement pour les budgets des ménages. Sur le littoral héraultais, nombreux sont les touristes à faire le choix de moins manger dehors, afin de pouvoir partir en vacances aussi longtemps qu’avant. Mais alors, les restaurants sont-ils devenus hors de prix ?

L’augmentation des prix des matières premières

« Nos produits d’achats ont tous augmenté. Nous sommes donc obligés de répercuter cette augmentation sur nos prix, sinon nous disparaissons, explique Jacques Mestre, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de Montpellier (Umih). Mais comme le pouvoir d’achat des Français ne suit pas, cela créer un décalage ».

Un décalage particulièrement visible à Montpellier, où un habitant sur six est un étudiant. « Pour moi qui suis à la fac, c’est trop cher de manger au restaurant. J’y suis allé deux ou trois fois cette année. De manière occasionnelle, pour fêter la fin des partiels par exemple », explique Louis, en deuxième année de droit.

Comme beaucoup d’étudiants interrogés, Louis affirme privilégier les fast-foods aux restaurants. « Je n’ai pas les moyens de dépenser 30 à 50 € pour un repas. Donc je vais là où je peux payer moins de 10 € », lance le jeune homme.

Si les étudiants ont de tout temps préféré les sorties économiques, les clients traditionnels des restaurants se restreignent de plus en plus. « Je ne mange plus du tout dehors parce que c’est devenu trop cher, surtout pour avoir de la nourriture en conserve », peste Jacques, 77 ans. « La dernière fois que je suis allé au restaurant ça m’a coûté un bras. Pour deux plats et deux verres de vin blanc », ajoute le retraité.

Des restaurateurs qui peinent à entrer dans leurs coûts

« Les gens trouvent que nos cartes sont trop chères et pensent qu’on se gave. Mais ils ne comprennent pas que nous sommes le fusible entre les fournisseurs et les consommateurs », lance Adrien, gérant du Grillardin, restaurant bistronomique situé place de la Chapelle Neuve. « J’ai baissé mes prix pour rester accessible alors que je devrais ajouter dix euros à chacune de mes assiettes pour rester dans mes coûts », se désole le passionné de gastronomie qui affirme « payer pour travailler » douze à quinze heures par jour.

D’après nombre de restaurateurs interrogés, tous les coûts ont augmenté ces dernières années : prix des matières premières, de l’énergie, des loyers, des charges, et surtout de la main-d’œuvre qualifiée. « Nos gars travaillent le soir, le week-end, les vacances, dans des cuisines où il fait 45 degrés en été. Donc on est obligé de les payer en conséquence. Surtout avec la pénurie de salariés dans notre secteur depuis le Covid », explique un autre gérant de restaurant bistronomique de l’Écusson. « Ce qui fonctionne aujourd’hui, ce sont les snacks avec peu d’employés. Un mec en cuisine qui réchauffe du surgelé et qui donne directement les plateaux aux clients », ajoute celui dont le commerce a enregistré une baisse de fréquentation de 50 % en juillet dernier.

Travailler avec des produits moins nobles pour rester rentable

« Travailler avec des produits de qualité coûte de plus en plus cher. Un kilo de bavette hors taxe coûtait 15 € en juin. Aujourd’hui c’est 22 € », remarque Adrien, à la fin de son service du midi. « Pour survivre, il faut travailler des produits un peu moins nobles mais y passer plus de temps pour le mettre en valeur », ajoute le gérant du Grillardin.

Yohann, chef de cuisine de l’Atelier 29, un restaurant des Beaux-Arts, explique quant à lui « ne plus travailler l’agneau depuis quatre ans » et avoir réduit sa carte « pour se concentrer sur des produits moins chers ». Le but étant d’offrir une expérience culinaire similaire tout en proposant des prix accessibles.

Si la situation est compliquée pour les restaurateurs, Adrien affirme : « On continue parce qu’on est des passionnés et qu’on a le feu sacré. Le matin je me lève pour faire plaisir aux gens ».

« Si vous trouvez un bon serveur à moins de 2 000 € nets, vous me faites signe »

Jacques Mestre est président de l’Umih, première organisation professionnelle pour l’hôtellerie et la restauration.

Pourquoi la fréquentation des restaurants baisse à Montpellier ?

La première raison est la diminution du pouvoir d’achat des Français. Comme ils ont moins confiance dans l’avenir, ils ne dépensent plus. Les gens qui allaient au restaurant trois fois par semaine n’y vont plus qu’une fois. Dans le même temps, les prix ne cessent d’augmenter pour les restaurateurs. Toutes les matières premières ont augmenté de 4 à 10 % cette année. Et je ne parle pas des salaires. Si vous trouvez un bon serveur à moins de 2 000 € nets, vous me faites signe.

Assiste-t-on à un changement des modes de consommation ?

Aujourd’hui, les bars proposent tous à manger car ils sont également en difficulté financière. Donc les gens qui sortent boire des coups prennent des assiettes de frites ou des tapas au bar. Et comme ils sont rassasiés, ils ne vont pas au restaurant ensuite.

Quelles pistes existent-ils pour que les restaurants retrouvent leurs clientèles ?

Il n’y a pas 36 solutions. Allez en Espagne, tout coûte 30 % moins cher que chez nous. Pourquoi ? Parce que les charges sont moindres. Donc voilà la solution : moins de charges. Et ce n’est pas en supprimant deux jours fériés que le gouvernement va nous aider à sortir la tête de l’eau.