Les derniers chiffres publiés mi-août 2025 confirment un basculement historique : la consommation de bière en Allemagne recule à un rythme inédit. Premier marché européen et patrie de la pils, le pays enregistre une baisse de 6,8 % sur les cinq premiers mois de l’année, selon les données relayées par Brauwelt.

Consommation de bière : une baisse qui s’accélère d’année en année

En 2023 déjà, les ventes avaient chuté de 4,5 %, pour atteindre 8,4 milliards de litres, leur plus bas niveau depuis la réunification, selon AP News. L’année suivante, malgré le Championnat d’Europe de football, la dynamique n’a pas changé, avec un nouveau recul de 1,4 %. Et 2025 s’annonce encore plus difficile : sur le seul premier semestre, ce sont 262 millions de litres qui se sont volatilisés.

Au-delà des volumes, la consommation par habitant illustre la tendance. D’après l’Office fédéral de la statistique, chaque Allemand buvait en moyenne 107 litres en 2013. Dix ans plus tard, ce chiffre n’est plus que de 88 litres. Une chute brutale qui contraste avec l’image festive associée à l’Oktoberfest et aux biergarten.

Les jeunes générations tournent la page

La baisse ne s’explique pas seulement par la démographie ou la crise économique. Elle est surtout portée par un changement de mentalité. Comme l’explique The Economist début août, la génération Z se montre bien plus attentive à la santé et à l’équilibre de vie. L’alcool perd du terrain face aux boissons sans sucre, aux sodas zéro ou encore aux alternatives à base de thé ou de café.

Dans ce contexte, la bière traditionnelle, jadis boisson du quotidien, devient un produit de consommation occasionnelle. « On ne boit plus par habitude, mais pour une occasion », résume un observateur cité par The Times. L’effet est visible jusque dans les rayons des supermarchés, où les bières sans alcool connaissent une croissance à deux chiffres. Leur part de marché dépasse désormais 10 %, et certaines brasseries estiment qu’une bouteille sur dix vendue d’ici peu n’aura plus une goutte d’alcool.

La montée en puissance des bières sans alcool

Selon Swissinfo, la production de bières sans alcool est passée de 329 millions de litres en 2004 à près de 700 millions en 2024. Et la tendance s’accélère : les brasseries investissent massivement dans ce segment pour séduire les jeunes et rassurer les consommateurs soucieux de leur santé.

La bière sans alcool n’est plus perçue comme une curiosité, mais comme une alternative crédible. Elle séduit aussi au-delà des frontières allemandes, grâce à son image « lifestyle » et à des campagnes marketing qui misent sur le sport et le bien-être. Pour certains spécialistes, ce basculement pourrait même sauver une partie du secteur, en compensant la baisse structurelle des volumes traditionnels.

Cette évolution interroge sur l’avenir d’un symbole national. Les grandes fêtes populaires comme l’Oktoberfest continuent d’attirer des millions de visiteurs, mais elles ne reflètent plus la réalité du quotidien. L’Allemagne reste le premier producteur européen, mais les habitudes de consommation s’alignent progressivement sur celles observées en Europe du Sud, où la bière n’a jamais eu le statut de boisson incontournable.