Une femme atteinte de schizophrénie qui fait une crise car elle n'a plus de médicament Zypadhera.Le médicament Zypadhera fait l’objet de fortes tensions d’approvisionnement en Europe. Un dilemme pour de nombreux schizophrènes © Adobe Stock

Le Zypadhera est en rupture de stocks en France. Et c’est un dilemme pour des milliers de Français en souffrance psychologique. En effet, ce médicament n’est pas n’importe quel antipsychotique. Commercialisé sous forme injectable, il contient de l’olanzapine, une molécule bien connue des psychiatres depuis les années 1990. Il s’agit d’une forme à libération prolongée. Une seule injection intramusculaire suffit pour couvrir deux à quatre semaines de traitement.

Pour les personnes souffrant de schizophrénie, une maladie psychiatrique chronique qui touche plus de 600 000 Français selon l‘Inserm, cette forme retard est une avancée considérable. Elle permet d’assurer une observance optimale. En d’autres termes, pas de comprimés oubliés, moins de rechutes, moins de réhospitalisations.

Selon les données de l’Assurance maladie, près de 20 000 patients en France recevaient, en 2023, un antipsychotique injectable à action prolongée. Une proportion importante d’entre eux bénéficiait spécifiquement du Zypadhera.

Pourquoi cette rupture d’approvisionnement ?

Le laboratoire Cheplapharm, qui détient la commercialisation en Europe, évoque des problèmes techniques de production combinés à des difficultés de chaîne logistique. Mais ce n’est pas tout. Deux lots récents ont été retirés du marché pour des défauts de qualité. Résultat, une rupture de stock brutale et une incapacité à relancer la distribution dans les délais prévus.

Au départ, une reprise était annoncée pour septembre 2025. Mais l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a confirmé le 13 août que la date de remise à disposition était désormais indéterminée.

Zypadhera : que faire face à la pénurie ?  Quelles conséquences pour les patients et leurs familles ?

La schizophrénie est une maladie aux symptômes complexes : 

  • hallucinations, 
  • idées délirantes, 
  • troubles cognitifs… 

Mais ce qui fragilise le plus souvent le parcours des patients, c’est la difficulté à suivre un traitement au long cours. Or, c’est justement là que le Zypadhera apportait une solution précieuse. Sa disparition met donc en danger un équilibre parfois construit de longue date. Les psychiatres redoutent :

  • Des rechutes liées à l’arrêt brutal du traitement ou à la moindre observance avec une forme orale.
  • Des hospitalisations évitables, souvent longues et coûteuses.
  • Une angoisse supplémentaire pour les familles, déjà éprouvées par la maladie.

Les recommandations officielles de l’ANSM

Pour éviter une crise sanitaire plus large, l’ANSM a diffusé des recommandations très précises aux professionnels de santé :

  • Ne plus commencer de nouveaux traitements avec le Zypadhera. Les rares doses encore disponibles doivent être réservées aux patients déjà suivis.
  • Privilégier le relais par l’olanzapine orale : le comprimé doit être introduit à la date prévue de la prochaine injection, avec une surveillance clinique accrue. Important : le Zypadhera continue à diffuser de l’olanzapine jusqu’à 6 à 8 mois après la dernière injection, ce qui complique l’adaptation des doses.
  • Envisager un autre antipsychotique injectable à action prolongée (rispéridone, palipéridone, aripiprazole), mais toujours après avoir testé la tolérance du patient sous forme orale.

Ces recommandations insistent sur un principe fondamental : ne jamais arrêter un traitement sans avis médical.

Des alternatives, mais aucune solution miracle

En pratique, les psychiatres se retrouvent aujourd’hui avec trois options principales :

  1. Olanzapine orale : même molécule, mais sous forme comprimé. Risque majeur : une baisse d’observance.
  2. Autres antipsychotiques injectables à longue durée d’action : rispéridone (Risperdal Consta®), palipéridone (Xeplion®, Trevicta®), aripiprazole (Abilify Maintena®). Chacun présente des différences en termes d’efficacité et d’effets secondaires.
  3. Adaptation personnalisée : choix en fonction de la tolérance, de l’efficacité, des antécédents et du suivi familial.

Mais aucune de ces solutions ne remplace parfaitement le Zypadhera pour les patients qui en bénéficiaient depuis des années.

La pénurie dépasse les frontières françaises

La France n’est pas la seule concernée. En Belgique, les autorités sanitaires ont confirmé que le Zypadhera (tous dosages confondus) serait indisponible au moins jusqu’en octobre 2025. Une taskforce d’experts a été constituée pour accompagner les psychiatres dans la mise en place de solutions alternatives, allant de l’aripiprazole injectable aux formes orales d’olanzapine.

En réalité, cette pénurie illustre un problème plus global : la dépendance européenne à quelques sites de production pharmaceutique, souvent concentrés hors du territoire national.

Une nouvelle alerte sur la fragilité des chaînes d’approvisionnement

Après les pénuries d’amoxicilline et de paracétamol en 2023, l’histoire se répète donc. Plus inquiétant, selon le dernier rapport de l’Agence européenne du médicament (EMA), plus de 300 médicaments essentiels sont actuellement signalés en tension ou en rupture dans l’Union européenne.

Chaque fois, les mêmes causes reviennent : production concentrée sur quelques sites, difficultés de matières premières, problèmes de qualité, transport mondialisé vulnérable aux crises. Cette rupture du Zypadhera n’est donc pas un accident isolé : elle souligne une fois encore la fragilité structurelle du système pharmaceutique européen.

À SAVOIR 

Après une injection de Zypadhera, le patient doit rester sous surveillance pendant 3 heures à l’hôpital ou en centre spécialisé. C’est une règle fixée par la Haute Autorité de Santé (HAS), car dans de rares cas, le médicament peut provoquer une forte somnolence ou une confusion brutale, appelée syndrome sédatif post-injection.

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