Par

Cédric Nithard

Publié le

20 août 2025 à 17h03

En défendant une vision optimiste des transformations de Montpellier, la lettre ouverte publiée par l’association de commerçants PARI Jeu de Paume sur les réseaux sociaux n’a pas manqué de susciter des réactions. Ceux nommés les « rageux, râleurs, critiqueurs professionnels, contradicteurs de service » ont sorti leurs plûmes affutées. Tour d’horizon de ces commentaires dont il est difficile pour certains de ne pas en faire une lecture politique mais qu’il serait une erreur de limiter à cela. Est-ce pour autant efficace quant au sujet défendu ?

Deux visions

Compte tenu de sa nature et de celle des réseaux sociaux, il aurait été étonnant que la lettre de l’association de commerçants PARI Jeu de Paume reçoive une accueille dithyrambique. Certains sont cependant allés dans le même sens comme Julia Delaunay : « D’accord avec l’association. La critique peut être constructive, et je suis la première à en faire sur d’autres sujets, mais quand elle est permanente et de mauvaise foi, on ne l’écoute plus » ou encore « Patrice Montpellier » : « Oui bravo à cette association. La plupart du temps seuls les rageux s’expriment sur les réseaux sociaux. Ça fait du bien de lire des gens qui savent reconnaitre ce qui va bien tout en restant lucides ». Gilles Raynaud abonde : « Tout à fait en accord avec eux, ça suffit les détracteurs de tout poil qui nous pourrissent la vie en dénigrant Montpellier. Si ils ne sont pas contents qu’ils quittent Montpellier, basta…. Ça devient un véritable jeu amplifié par les élections à venir… Oui le maire a pris des engagements, il a fait ce qu’il avait dit (pour une fois c’est rare) alors laissez-nous vivre dans cette belle ville et continuons le vivre ensemble de Montpellier ».

Un constat que ne partage pas Isabelle Rivière. « Je vis à Montpellier depuis 45 ans, j’ai vu la ville changer et aujourd’hui je ne reconnais plus ma ville dynamique, chaleureuse, joyeuse et pleine de vie. C’est un immense chantier où l’on casse ce qui a été construit, certes tout n’est pas négatif mais quand on voit comment se transforme Montpellier, on se dit que nos représentants vivent probablement dans des quartiers « protégés » ou hors de la ville. Cette ville a perdu sa douceur de vivre et c’est bien triste. Alors, continuez à taper sur les habitants qui ne sont pas d’accord avec vous, c’est une idée de la démocratie que je ne partage pas… » souligne-t-elle. Sur la même ligne, Sylvie Monnier appuie : « Cela devient une habitude de traiter les gens de « rageux » ? Si le tableau est jugé trop noir par certains, il faut convenir que faire preuve de citoyenneté et donc de s’exprimer est un droit pour tous. Se poser des questions sur les choix et orientations des décideurs n’est pas une tare et la critique est une façon de participer au débat. Le mépris et la condescendance aggravent la fracture, que les politiques ne se plaignent pas de la désaffection du peuple lors des élections, mais qu’ils s’en inquiètent car c’est la colère qui devient la forme d’expression principale ». Un message entendu depuis longtemps maintenant expliquant l’abstention qui, dans la lignée des Gilets jaunes, s’inscrit dans l’idée de la mobilisation annoncée le 10 septembre.

Une défense de Montpellier

Et si les messages s’avèrent en opposition avec les politiques menées, ils témoignent pourtant de la même inquiétude globale pour la ville. Restent des chemins différents pour y parvenir. « Il est confortable de répéter le discours officiel de la mairie. Mais sur le terrain, la réalité est différente : ce n’est pas une “vision politique” ni des “photos tronquées”. C’est la réalité, des commerces qui ferment, de salariés qui perdent leur emploi, de riverains qui se sentent coupés de leur centre-ville » observe Akkim Djenardi qui défend : « Alors oui, Montpellier est belle, oui elle a une énergie unique, et oui nous l’aimons profondément. Mais l’aimer, c’est aussi être capable de dire quand ça ne va pas. L’aimer, c’est vouloir corriger ce qui met en danger son tissu économique et son âme commerçante. Les commerçants ne sont pas des “mécontents professionnels”. Ils ne cherchent pas à briser l’image de la ville, ils cherchent à sauver leur vie. Car oui, quand une boutique ferme, ce n’est pas seulement une vitrine qui s’éteint : ce sont des familles qui s’inquiètent de demain. Je préfère donc entendre leurs cris d’alerte, même dérangeants, plutôt que de me bercer d’illusions. Car c’est dans ce dialogue franc, et non dans le déni, que pourra se dessiner un avenir réellement meilleur pour Montpellier ».

Vidéos : en ce moment sur ActuLe sénateur Hussein Bourgi à l’offensive

Le sénateur de l’Hérault Hussein Bourgi n’est pas connu pour faire le dos rond sur les réseaux sociaux. Le socialiste a d’abord commenté notre article en vantant les transformations passées du boulevard du Jeu de Paume et de la Place Albert 1er en appelant « chacun à se forger son opinion, en faisant preuve de lucidité, de rigueur, de mesure, et si possible d’objectivité », ce qui a offert une première passe d’arme avec Isabelle Rivière accusée d’être un faux-compte.

L’échange fut plus virulent avec Bérengère Dubus, à qui l’évocation dans notre article de la subvention à l’association et le timing de la lettre quant aux élections municipales avaient visiblement échappé. Cette dernière nous interpellant dans ce sens, Hussein Bourgi ne fit pas dans la finesse : « Gnangnan gnangnan…. Arrêtez de geindre. Tout le monde ne court pas derrière l’argent. Détendez-vous un peu » ou encore « Arrêtez de pleurnicher. Vous voulez un paquet de mouchoirs ? » Un message que la cheffe d’entreprise montpelliéraine, habituée à réagir sur les médias et les réseaux sociaux, appuyée pour l’occasion par son mari, a très peu goûté : « j’ai posé ma question en tant que citoyenne engagée dans le contrôle des dépenses publiques une question claire sur l’usage des subventions à l’approche d’échéances électorales. Face à cela, vous avez choisi de répondre par des moqueries, du mépris et une injonction infantilisante. Ce décalage est frappant » oppose-t-elle en demandant : « Au lieu de m’insulter puis me bloquer j’invite Mr Bourgi à présenter ses excuses et effacer ses commentaires qui mettent à mal notre démocratie en montrant des élus arrogants et méprisants ». L’ambiance est toujours aussi agréable sur les réseaux sociaux…

En désaccord avec la vision défendue par l’association PARI Jeu de Paume, Martinelli Eleonore objecte : « Vous dites que les critiques sont exagérées, mais elles ne sont rien d’autres qu’un miroir. Et si ce miroir dérange, ce n’est pas à nous d’en rougir, c’est aux décideurs de se demander pourquoi tant de citoyens s’y reconnaissent. Car critiquer n’est pas détester : c’est s’attacher, c’est souffrir de voir sa ville abîmée, et c’est espérer mieux. Si nous n’aimions pas Montpellier, nous ne perdrions pas notre temps à écrire, à témoigner, à essayer d’alerter. Alors, oui, nous parlons. Oui, nous pointons ce qui ne va pas. Ce n’est ni un caprice, ni un tabou, c’est la base même d’une démocratie vivante. Parce que sans critique, il n’y a plus qu’une seule voix : celle du pouvoir en place. Et si cette voix est fausse ou trompeuse, c’est toute la collectivité qui en paie le prix. Et au fond, ce n’est pas une question d’avoir une autre vision : ce qu’on nous reproche, c’est de ne pas applaudir ».

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Sous couvert d’anonymat

Reste enfin le cas du profil Leana Attika. Sous couvert d’anonymat, ce collectif, suivi dans le milieu politique et qui ne cache pas son soutien à Philippe Saurel, tire à boulets rouges sur Michaël Delafosse et sa majorité depuis le début du mandat, s’en prenant également à notre média et à notre journaliste Jean-Marc Aubert, en dépassant régulièrement le cadre de la dignité et de la politesse du débat, voire de la vie privée. Plusieurs plaintes et une information judiciaire sont d’ailleurs en cours d’instruction contre les gestionnaires du compte. Évidemment, la publication de l’association de commerçants ne leur a pas échappé à laquelle ils ont opposé une « lettre ouverte à l’association pari jeu de paume et aux autres béni oui oui. À vous, défenseurs aveugles, perroquets du discours officiel, optimistes de service » en présentant : « Montpellier n’est pas ce décor de carte postale que vous décrivez à longueur de posts. Montpellier n’est pas cette ville paisible où il ferait bon flâner sans contrainte. Montpellier est aujourd’hui meurtrie, abîmée, étouffée par des choix politiques qui ignorent le quotidien de ses habitants et de ses commerçants ».

Une missive contenant différents éléments de langage réutilisés ensuite par de vrais et faux comptes augmentant l’écho négatif. Elle ou ils, brefs ces courageux anonymes, ayant mis en avant une subvention de 5 000€ attribuée par la Ville à l’association pour l’organisation de différentes animations, beaucoup ont repris l’argument et douté de la sincérité de la lettre ouverte et de son président Laurent Roy. Celui-ci s’étant montré critique au début du mandat, cette prise de parole est ainsi davantage vue comme une prise de position à quelques mois des municipales. À ce compte, beaucoup risquent d’être suspects… De là à être coupable ? Encore faut-il en avoir les preuves. C’est toute la différence entre un ragot et une information mais ainsi va la politique et les réseaux sociaux. Reste l’honneur et la dignité de chacun ainsi que la vérité des urnes… pour ceux qui ont le courage de se présenter face aux électeurs. Ça tombe bien, il y a une échéance dans quelques mois. Si certains veulent sortir de l’anonymat ou franchir le cap des réseaux sociaux, c’est le moment.

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