Par

Augustin Delaporte

Publié le

21 août 2025 à 6h06

« C’est un tapis boulevard Voltaire », s’esclaffent des badauds ! Depuis la mi-août 2025, des wagons de feuilles mortes, craquantes et à la teinte marron, jonchent les rues de Paris. Un phénomène qui, couplé au ciel grisâtre et aux températures basses pour la saison, donne la drôle d’impression d’être déjà en automne. Béatrice Rizzo, ingénieure agronome spécialisée en santé des arbres à la Ville de Paris, nous apporte des éléments de compréhension.

actu Paris : Des feuilles mortes tombent en plein mois d’août à cause de la canicule, faut-il s’inquiéter ?

Béatrice Rizzo : Ça dépend de l’âge de l’arbre. Les adultes font tomber leurs feuilles pour s’adapter. Ils s’économisent en eau, ce qui leur permet de survivre. C’est par contre préoccupant pour ceux récemment plantés, qui n’ont pas la capacité à s’adapter.

actu Paris : Qu’est-ce qui cause ce phénomène ?

B.R : Il y a deux raisons. D’abord, climatique. Plus le rayonnement solaire est intensif, plus la photosynthèse nécessite de l’eau. En cas de déficit dans le sol, l’arbre va s’adapter en amorçant un « automne précoce ». Ils abandonnent des feuilles pour ne pas consommer d’eau.

C’est un signe de réactivité. Comme ça, l’arbre n’y reste pas entièrement. Il sacrifie le volume de feuillage ne pouvant pas transpirer suffisamment pour s’économiser. C’est une bonne réaction. L’origine peut, aussi, être parasitaire. D’autant que les insectes sont opportunistes et ciblent les arbres affaiblis.

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Des sacs de feuilles morts, boulevard Voltaire, dans le 11e arrondissement. (©AD / actu Paris)

actu Paris : La survie des arbres concernés est-elle en danger ?

B.R : Quand le phénomène se répète année après année, oui. Le sacrifice de feuillage rend la photosynthèse moins performante et, par conséquent, la production des réserves moins performante, également. Jusqu’à 60 % de feuillage sacrifié il n’y a pas de danger, mais au-dessus, il faut s’inquiéter. Une succession d’épisodes de canicules sur dix, vingt ans, peut être fatale, parce qu’il y aura moins d’adaptation possible au stress hydrique.

actu Paris : De quelles solutions dispose-t-on ?

B.R : Il faut avoir une grande vigilance concernant les jeunes arbres. Nous faisons un suivi en continu de leur besoin d’eau grâce à des sondes connectées. Sur les adultes, on compte sur leur capacité à s’adapter, car on ne peut pas les arroser, cela nécessiterait des quantités d’eau monumentales.

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actu Paris : La Ville de Paris doit-elle aujourd’hui miser sur une essence en particulier ou, au contraire, arrêter de miser sur certaines ?

B.R : C’est un phénomène assez récent, qui commence à être visible. Aujourd’hui, nous estimons qu’il faut miser sur une diversité d’essences, on a beaucoup élargi le panel, avec des méditerranéennes, comme les micocouliers, mais pas que. Il ne faut pas se focaliser sur le climat qui chauffe, les hivers sont rudes et les écartes de températures sont parfois importants. Typiquement, l’olivier ne coche pas toutes les cases, parce qu’il craint le gel.

Quant au stresse hydrique, le bouleau, le hêtre ou le frêne ne tiennent pas. On va minimiser leur présence. Tout dépend, également, du lieu d’implantation, si c’est en parc ou en alignement, selon la fosse et son volume, etc.

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