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Emmanuel Macron, Donald Trump et Volodymyr Zelensky, lundi 18 août, à la Maison Blanche.
GUERRE EN UKRAINE – Au moment où la valse diplomatique autour de la résolution de la guerre en Ukraine s’accélère, une question s’impose au centre des débats : quelles garanties de sécurité accorder à l’Ukraine en cas de cessez-le-feu avec la Russie ? Le sujet a notamment été abordé ce mercredi 20 août lors d’une réunion en visio conférence des chefs d’état-major des 32 pays de l’OTAN.
Tout l’enjeu pour les Occidentaux est d’assurer à l’Ukraine que le conflit ne reprendra pas si elle accepte un cessez-le-feu, sans pour autant braquer la Russie en vue des négociations pour un accord de paix durable, à quelques semaines d’une rencontre éventuelle entre le président ukrainien Volodymyr Zelensky et son homologue russe Vladimir Poutine.
Les alliés de Kiev « sont tous d’accord sur le fait que l’Ukraine a besoin de garanties de sécurité. Mais il y a des divergences sur les modalités de mise en place de ces garanties », rappelle Ulrich Bounat, géopolitologue spécialiste de la guerre en Ukraine, interrogé par Le HuffPost. « Ce sera l’un des points durs » des pourparlers des prochains jours, assure-t-il.
Selon le spécialiste, il existe « trois types de garanties de sécurité » possibles. « La première d’entre elles – qui fait consensus – consiste à fournir du matériel à l’armée ukrainienne pour qu’elle soit en mesure de se défendre », commence-t-il par exposer.
Un déploiement de soldats européens sur le sol ukrainien ?
« La deuxième garantie est la mise en place d’une “no fly zone”, c’est-à-dire une zone d’exclusion aérienne qui viserait à empêcher les missiles et les avions russes de pénétrer l’espace aérien ukrainien », poursuit-il. Mardi 19 août, Donald Trump a d’ailleurs déclaré dans une interview à Fox News qu’un soutien aérien américain pourrait faire partie des garanties de sécurité accordées à l’Ukraine. Cependant, selon Ulrich Bounat, cela ne signifie pas forcément une participation à la « no fly zone ». On peut interpréter cette déclaration comme l’intention de mettre en place « une simple surveillance aérienne, de façon à identifier en temps réel les menaces », dit-il.
La troisième et plus épineuse des garanties envisageables est le déploiement de troupes sur le sol ukrainien. À ce titre, le président américain a déclaré mardi que les Européens étaient « prêts à envoyer des troupes sur le terrain » ukrainien, tout en affirmant que la présence de soldats américains était écartée. Cette idée est notamment portée par la France et le Royaume-Uni, à travers la « coalition des volontaires », un regroupement d’une trentaine de pays majoritairement européens soutenant l’Ukraine.
Dans un tel cas de figure, on pourrait voir arriver en Ukraine « un contingent de quelques milliers d’hommes », prédit Ulrich Bounat. « Il ne s’agirait pas d’une présence en première ligne mais de soldats déployés très en arrière du front, notamment pour faire de la formation ou du déminage. Leur rôle premier ne serait pas de combattre », tempère-t-il. Leur présence aurait surtout « un effet symbolique majeur puisque si la Russie attaque à nouveau l’Ukraine en présence de troupes européennes, cela reviendrait à une déclaration de guerre », décrypte le géopolitologue. Certains pays, comme l’Italie sont cependant opposés à cette mesure.
Vers une application de l’article 5 de l’Otan ?
Au-delà de ces mesures, certains alliés de Kiev ont également envisagé une autre piste comme garantie de sécurité : l’application de l’article 5 de l’OTAN à l’Ukraine, sans pour autant intégrer le pays à l’organisation transatlantique. Dès le mois de mars, la chef du gouvernement italien Giorgia Meloni avait plaidé pour cette option. Plus récemment, l’émissaire américain Steve Witkoff a avancé cette piste à l’issue de la rencontre entre Vladimir Poutine et Donald Trump en Alaska, affirmant de façon précipitée que le président russe ne s’y était pas opposé, avant de revenir sur ses propos.
Ce texte prévoit que toute « attaque contre l’un est une attaque contre tous » et permet ainsi « l’emploi de la force armée » comme l’une des options d’assistance possibles en cas d’agression d’un allié. Les pays membres de l’Otan s’engageraient donc à intervenir aux côtés de l’armée ukrainienne si la Russie mène une nouvelle offensive après la conclusion d’un accord de cessez-le-feu. Cette stratégie présente l’avantage de respecter la demande russe de non-intégration de l’Ukraine à l’Otan, à laquelle s’est d’ailleurs rangée Donald Trump.
« Cela peut avoir un effet dissuasif, mais aux yeux des Ukrainiens un tel engagement ne peut pas remplacer une présence militaire » effective immédiatement, estime Ulrich Bounat. Par ailleurs, « il est peu probable que les États-Unis » acceptent de faire une telle promesse, ajoute-t-il.
De son côté, la Russie a déjà commencé à exprimer des réticences quant aux garanties de sécurité apportées à l’Ukraine. Ce mercredi, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a prévenu que toute discussion qui ne prendrait pas en compte la position de Moscou mènerait « nulle part ». La veille, le Kremlin avait revendiqué le droit de se voir accorder lui aussi des garanties de sécurité.