Anatomie d’un système médiatique percuté par les réseaux sociaux
Avec une structure décentralisée, une télévision publique qui domine les ondes et une réticence historique vis-à-vis de la personnalisation, les médias allemands détonnent dans le paysage européen. Mais la polarisation politique bouscule une routine journalistique qui reflétait jusque-là le consensus des grands partis sociaux-démocrates et conservateurs.
Masakatsu Sashie. – « Analog », 2015
© Masakatsu Sashie
Conçu par l’architecte britannique Norman Foster dans les années 1990, le puits de lumière naturelle tombe directement sur l’hémicycle du Bundestag, à Berlin. Un double chemin de promenade hélicoïdal installé sur les parois intérieures du dôme permet aux visiteurs un contrôle visuel de l’activité des députés fédéraux. Plus haut, une plate-forme d’observation offre une vision panoramique des lieux du pouvoir politique allemand : la chancellerie fédérale, quelques ministères et la porte de Brandebourg, devenue un lieu de célébrations historiques, d’événements sportifs mais aussi de manifestations houleuses.
La structure voudrait symboliser la volonté des législateurs qui, en 1949 et sous la dictée des forces d’occupation occidentales, ont porté la Loi fondamentale (Constitution) de la République fédérale sur les fonts baptismaux : favoriser le pluralisme des opinions politiques, former des citoyens bien informés au moyen de médias publics puissants et autonomes qui, avec les élus du peuple, surveilleraient de près le travail du gouvernement.
« C’est au troisième étage du Bundestag que l’on va à la pêche aux réactions de responsables politiques. Celui des directions de groupes parlementaires et des déclarations officielles à la presse », explique Mme Alexandra Gubser, cheffe du bureau berlinois de la SRF, la radio-télévision suisse. Avant de travailler en Allemagne, Mme Gubser occupait le même poste en France. « En six ans à Paris, je n’ai jamais pu interviewer un ministre en tête à tête. On m’a souvent décrit la Suisse comme un pays qui n’offrait pas beaucoup d’intérêt en matière de retombées médiatiques », se rappelle-t-elle. À Berlin, « c’est une autre conception du rapport aux journalistes. Ici, l’homme politique a des comptes à rendre et il l’accepte », ajoute-t-elle en évoquant trois ministres interrogés en six semaines.
À deux pas de la chancellerie et du Bundestag, la Maison de la presse fédérale met à disposition des bureaux pour les correspondants allemands et étrangers, ainsi (…)
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