Depuis plusieurs années, ils sont nombreux à signaler des négligences au club hippique de Nice, sans que cela ait été prouvé. Mais la mort début juillet de Cigalon, un vieux cheval placé au club, remet de l’huile sur le feu.
En 2024, le club municipal – géré par un délégataire – avait été mis en cause par Thierry Venem, conseiller municipal d’oppositionEn 2024, le club municipal – géré par un délégataire – avait été mis en cause par Thierry Venem, conseiller municipal d’opposition, pour des mauvais traitements.
S’appuyant sur les résultats de contrôles, la Ville de Nice avait alors affirmé, que « l’hébergement et l’état sanitaire des équidés étaient satisfaisants ».
Des retraites tardives pour les chevaux
Mais, depuis la mort de Cigalon, de nouveaux témoignages font surface. « Ils mettent leurs chevaux en retraite beaucoup trop tard », regrette Cindy Ferrand, présidente de l’association de protection animale Terralucia.
« Le club continuait à utiliser Cigalon pour faire monter des enfants et des personnes handicapées », râle Frédérique Goutard, présidente de l’association Cheval libre 06.
Cindy Ferrand avait bien proposé de lui offrir une retraite chez elle, nécessitant l’accord de la Ville. Mais la demande n’aurait jamais été faite par le directeur du club. « Il avait peur que la mairie se préoccupe des vieux chevaux encore en activité », glisse-t-on.
Propos démentis par le directeur lui-même, Jean-Christophe Comet, qui affirme que tout était réglé pour que Cigalon soit cédé à l’association « avant que l’on apprenne sa disparition ». À 27 ans, naturellement, les chevaux ayant une espérance de vie entre 25 et 30 ans.
« Il n’est pas mort d’épuisement. Il travaillait 17 heures par mois en moyenne », ajoute Jean-Christophe Comet.
Ce que confirme un rapport transmis par le club, qui recense les séances de travail de Cigalon. On y constate un ralentissement des ateliers sur ses derniers mois de service. Sur la fin, il était même plus souvent dans son box ou au paddock qu’au travail, selon le document interne.
Aujourd’hui, il n’existe aucune législation imposant l’âge de départ à la retraite des chevaux. « Elle se décide au cas par cas selon l’état de santé du cheval », précise la Fédération Française d’Équitation (FFE). « Notre politique, c’est d’avoir beaucoup de chevaux (82 au total) pour moins les faire travailler », détaille Jean-Christophe Comet.
D’après lui, les chevaux partent donc plus tard, mais moins usés, et leurs activités sont réduites progressivement jusqu’à leur retraite chez un particulier ou une association d’accueil. « Chez nous, contrairement à d’autres clubs, ils ne partent pas à l’abattoir mais finissent leur vie paisiblement », assure le directeur.
Faut-il alors remettre en cause le principe même de l’équitation, sport basé sur l’usage du cheval? « Ces associations sont des amoureux de la nature, mais n’y connaissent rien « , tranche-t-il.
Un traitement « à l’ancienne »
La situation est plutôt inédite à Nice, d’après plusieurs anciens employés du club hippique. « Les chevaux sont toujours partis à la retraite. Tard, mais ils partaient », concède une ancienne palefrenière.
Mais elle affirme qu’il y a eu des abus. « Le traitement est à l’ancienne. Le directeur a du mal à comprendre que ce sont des êtres vivants ». Ce que dément Jean-Christophe Comet. « Nos chevaux voient le dentiste tous les ans, ils sont vaccinés contre la rhinopneumonie. On doit être le seul club à faire tout ça », se défend-il, factures à l’appui.
La qualité des équipes se serait également dégradée. La faute au manque d’attractivité du métier de palefrenier, selon le directeur, qui dit embaucher du personnel de l’étranger qu’il forme dès leur arrivée.
Plusieurs personnes ont adressé des signalements à la mairie pour des négligences. « Certains clients avaient honte et prenaient eux-mêmes les fourches pour nettoyer les box », résume une ancienne palefrenière. Pour cela, plusieurs licenciés auraient donc délaissé le club ces dernières années.
Avec ses près de 600 licenciés, le club reconnaît cette baisse, mais le justifie par la tendance nationale, confirmée par les chiffres de la FFE.
Une inspection de la Ville
Plusieurs fois, le club a été contrôlé. « Les différents contrôles [n’ont] pu mettre en avant une quelconque défaillance », certifie la Ville de Nice. Mais selon certains employés du club, les dés étaient pipés. « Il n’y a jamais eu un seul contrôle sans que nous soyons prévenus. On nous demandait de nettoyer les box à fond », avoue une ancienne salariée.
Le 2 juin, la Ville a mené un nouveau contrôle, à la suite de nouveaux signalements. « Certains manquements ont été observés », détaille l’institution, qui a ensuite mené une contre-visite le 16 juillet. « Elle a permis de mettre en avant l’âge avancé de certains équidés. Nous nous interrogeons sur l’état de santé de certains poneys », poursuit la Ville.
Elle a donc décidé de solliciter la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) pour un avis plus poussé. « C’est cet avis qui permettra, le cas échéant, de prendre les dispositions nécessaires », conclut l’institution.