La propagande russe a une nouvelle cible. L’organisation NewsGuard, spécialisée dans la lutte contre la désinformation, alerte dans une publication sur les vagues de désinformation russes qui touchent la France ces derniers mois. « Une opération de propagande russe qui a précédemment visé les élections aux États-Unis et en Allemagne a une nouvelle cible : la France », écrit-elle.

C’est l’opération Storm-1516, menée par John Mark Dougan, un activiste américain pro-Kremlin, qui est à la manœuvre. NewsGuard a recensé « cinq faux récits de décembre 2024 à mars 2025 ». Ces infox « ont été diffusées dans 38 877 publications sur les réseaux sociaux, générant 55,8 millions de vues », détaille l’organisation. « En comparaison, au cours des quatre mois précédents, la France n’avait été ciblée que par un seul récit, diffusé dans 938 publications sur les réseaux sociaux, et accumulant 845 000 vues. »

« C’est l’une des opérations les plus importantes constatées sur l’Hexagone », affirme auprès des Échos Chine Labbé, rédactrice en chef de NewsGuard.

Brigitte Macron visée

Parmi ces cinq fausses informations : un migrant tchadien avouant avoir violé une jeune fille de 12 ans en France, l’achat par le président ukrainien Volodymyr Zelensky d’une banque pour un montant de 1,2 milliard d’euros ou encore « une vidéo censée montrer un ancien élève de la Première dame de France, Brigitte Macron, l’accusant d’avoir abusé sexuellement de lui à l’âge de 12 ans ».

Cet assaut des réseaux français arrive alors que « Paris s’impose comme l’un des principaux soutiens de l’Ukraine en Occident », note NewsGuard. Il s’inscrit dans la tentative de décrédibilisation du pouvoir ukrainien, déjà touché par une multiplication d’infox. En mars, le site Clear Story News – site d’influence russe lié à John Mark Dougan – avait par exemple rapporté une fausse information selon laquelle Volodymyr Zelensky utilisait l’argent donné par les États-Unis pour payer des journalistes occidentaux afin de dire du mal de Donald Trump.

L’un des techniques employées est l’utilisation de sites russes se présentant comme des sites d’information ou l’attribution de fausses informations à de vrais médias. Récemment, une fausse « une » de l’hebdomadaire britannique The Economist sonnait ainsi l’alarme contre l’« apocalypse » et la Troisième Guerre mondiale qui se déclencheraient en cas de soutien militaire américain à l’Ukraine. Ce torrent de mensonges participe à la méfiance du grand public envers les vrais médias et les gouvernements ciblés.

L’IA représente « un nouveau risque désinformationnel »

NewsGuard ajoute que l’intelligence artificielle amplifie le phénomène. Ses analystes « ont constaté que les principaux chatbots d’IA générative répétaient volontiers ces récits faux sur la France, reflétant un nouveau risque désinformationnel ». Sur 11 plates-formes d’IA interrogées par l’organisation concernant une prétendue relation homosexuelle d’Emmanuel Macron, « cinq d’entre eux ont répété une fausse information, comme s’il s’agissait d’un fait avéré », rapportent Les Échos.

« La France est une cible privilégiée », avait averti fin mars le Premier ministre François Bayrou, parlant « d’interventions massives venant de Russie ». La France « est, après l’Ukraine, le pays le plus visé en Europe par les tentatives de manipulation (de l’information) de l’étranger », a-t-il ajouté, « nous paraissons en paix et pourtant nous sommes déjà en guerre », une « guerre singulière » qui « pour être virtuelle ou hybride, n’en est pas moins réelle. C’est la guerre informationnelle ».