BFM TV n’est plus la machine à cash qu’elle a été pendant plus de dix ans. Après une longue période de bénéfices réguliers, la chaîne d’information en continu traverse une zone de turbulences majeures. Son nouvel actionnaire, CMA CGM, découvre à ses dépens la fragilité économique du secteur audiovisuel. En mars 2024, l’armateur marseillais dirigé par Rodolphe Saadé rachetait Altice Média – qui comprend BFM TV, RMC et plusieurs radios – pour environ 1,55 milliard d’euros.

L’opération, présentée comme stratégique pour bâtir un empire médiatique, devait conforter le groupe dans l’influence et le prestige. Mais moins d’un an après, les comptes sont déjà dans le rouge.

Selon les chiffres révélés par la lettre confidentiel « L’informé », le pôle CMA Média a enregistré en 2024 un déficit net global de 296 millions d’euros.

Dans ce total, BFM TV occupe une place centrale. La valeur de ses actifs, combinés à ceux de RMC, a été dépréciée à hauteur de 250 millions d’euros. Une perte colossale qui illustre le recul de la chaîne sur le marché, à la fois en termes d’audience et de valorisation économique. Le reste du déficit provient des activités de presse détenues par CMA Média.

Des journaux comme La Provence, Corse Matin ou encore La Tribune ont cumulé environ 46 millions d’euros de pertes en 2024. Ces chiffres marquent un tournant historique.

Depuis 2012, BFM TV avait réussi à maintenir une rentabilité régulière malgré les crises du marché publicitaire. Mais 2024 sonne la fin de cette parenthèse. La chaîne a en effet été dépassée pour la première fois par sa concurrente CNews, devenue leader des chaînes d’info en France.

Un basculement symbolique qui fragilise son attractivité auprès des annonceurs.

Face à ces difficultés, la gouvernance a changé. Marc-Olivier Fogiel a quitté la direction générale et a été remplacé par Fabien Namias, ancien cadre du groupe TF1. Sa mission : relancer l’audience et rétablir la confiance des annonceurs. Le défi est immense.

CMA CGM, habitué aux milliards dégagés par le transport maritime, découvre l’extrême volatilité d’un secteur où les coûts de production explosent et où la concurrence est féroce. Pour BFM TV, l’année 2025 sera cruciale.

Entre repositionnement éditorial, reconquête publicitaire et nécessaire maîtrise des coûts, l’avenir s’écrira dans un climat d’incertitude. Mais une chose est certaine : avec près de 250 millions de pertes de valeur pour BFM/RMC et 296 millions pour l’ensemble du pôle médias, le retour dans le rouge restera comme un signal d’alarme.