Du dépôt de plainte au procès, Éclats de femme propose un soutien psychologique et juridique. Lancée par Claire Geronimi, victime d’un viol, cette association se développe en régions et vise aussi à prévenir les agressions de rue.
Son histoire a fait grand bruit. En novembre 2023, Claire Geronimi s’était fait violer dans un quartier chic de Paris, sous la menace d’une arme, par un individu faisant l’objet d’une OQTF. Ce drame l’a poussée à fonder un an plus tard l’association Éclats de femme. La structure accompagne les victimes d’agressions sexuelles, du dépôt de plainte au procès, période relevant souvent du parcours du combattant.
Après son viol, la jeune femme raconte avoir «reçu plein de témoignages de victimes de partout en France qui s’étaient fait agresser et ne se sentaient pas en sécurité». Dans ce contexte, Éclats de femme mène également des actions pour se prévenir des agressions de rue, à travers des conférences et ateliers de self-défense. Depuis un mois, afin d’être au plus proches des victimes, l’association se déploie en régions, notamment à Nantes. Une ville stratégique.
«Nouvelle vision du féminisme»
«Nantes comme d’autres grandes villes est confrontée à l’insécurité . Les femmes y sont en première ligne. Il y a dix ans, lorsque j’avais 18 ans, je pouvais sortir librement», se souvient Camille Ménétré, chargée du lancement de l’antenne dans la cité des Ducs. «Maintenant, quand je sors de chez moi, je suis vigilante dans les transports. Puis, j’arrive quai de la fosse , où je subis des sifflements. Ensuite, j’arrive à Commerce, où je fais face aux propositions des trafiquants de drogue . Puis le soir, je rentre en taxi», égraine la chirurgien-dentiste de 28 ans, assurant que ce «vécu» est partagé par d’autres de ses amies.
«J’ai adapté mes habitudes pour éviter les agressions. J’évite certains lieux, j’adapte mes tenues et mes horaires. C’est la première des inégalités entre hommes et femmes», regrette la Nantaise. La ville socialiste ambitionne justement de devenir la première ville non-sexiste de France d’ici à 2030. Premières «Assises de lutte contre les violences sexistes», soutien au lieu d’accueil Citad’elles, journée du «Matrimoine», cours d’école non genrées, budget sensible au genre… La liste des initiatives prises par la maire Johanna Rolland est longue. Récemment, un banc dédié à l’allaitement a été installé, et le nom des rues est progressivement féminisé.
«Je n’ai rien contre ça, mais ce n’est pas notre vision. Éclats de femme offre une nouvelle vision du féminisme», explique Camille Ménétré. «Pour moi, une ville féministe est une ville où les hommes et les femmes peuvent se balader au même titre partout. En changeant le nom d’une rue, l’insécurité ne va pas disparaître, ni les agressions qui y règnent», ajoute-t-elle.
Augmentation des violences sexuelles
Selon les données de l’Insee dans les Pays de la Loire, le nombre de femmes victimes de violences sexuelles entre 2016 et 2023 a augmenté de 138%. Ce chiffre comptabilise les plaintes et les faits constatés par les policiers ou gendarmes. Dans le cadre hors familial, les violences sexuelles étaient de 1771 en 2016 contre 4038 en 2023. Au niveau métropolitain, le baromètre de la tranquillité publique de Nantes fait état de 1145 faits de violences sexuelles en 2023 (+0,5% par rapport à 2018). Un chiffre qui rejoint la moyenne des autres métropoles.
L’arrivée d’Éclats de femme s’inscrit donc dans un contexte général d’augmentation des violences sexuelles. «Aujourd’hui, une victime dépense en moyenne 35.000 euros de frais (juridiques et psychologiques)», signale l’association sur son site internet. Mais la nouvelle structure veut accompagner tout le monde, peu importe sa situation financière. «Contrairement à certaines qui trient les victimes ou accueillent les femmes les plus en difficulté, nous, on accueille toutes les victimes», reprend Claire Geronimi.
«Après mon viol, quand j’ai cherché une association, on considérait que je n’avais pas besoin d’aide car j’avais la possibilité de me construire moi-même», rapporte celle qui n’a jamais connu de difficultés financières. Et même si la jeune femme s’est engagée il y a six mois aux côtés d’Éric Ciotti, son projet associatif lancé en amont se veut apolitique. À Nantes, un événement pour marquer le lancement d’Éclats de femme aura lieu dans les prochains mois. Les cours de self-défense vont bientôt commencer. Les villes de Nice, Reims et Rouen devraient bientôt suivre le mouvement.