Les relations se tendent entre la France et les États-Unis. Quelques jours seulement après une passe d’armes entre Emmanuel Macron et Benyamin Netanyahou sur le même sujet, Paris et Washington se déchirent sur le traitement de l’antisémisme par la France. Tant et si bien que le Quai d’Orsay a convoqué l’ambassadeur nord-américain Charles Kushner ce lundi 25 août. Rarissime.
En cause : ses commentaires « inacceptables » à l’encontre d’Emmanuel Macron, après que le diplomate a fustigé dans une lettre son « absence d’action suffisante » dans la lutte contre l’antisémitisme. Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères souligne que « la France réfute fermement ces allégations » et que « la montée des actes antisémites depuis le 7 octobre 2023 est une réalité que nous déplorons et sur laquelle les autorités françaises font preuve d’une mobilisation totale, tant ces actes sont intolérables ».
L’ambassadeur dénonce un « manque d’action suffisante »
Tout est parti d’un courrier de l’ambassadeur paru dans le Wall Street Journal. Dans celui-ci, Charles Kushner exprime sa « profonde inquiétude face à la montée spectaculaire de l’antisémitisme en France », et dénonce « le manque d’action suffisante (du) gouvernement pour y faire face ». Selon lui, « en France, il ne se passe pas un jour sans que des Juifs soient agressés dans la rue, des synagogues ou des écoles profanées, ou des commerces appartenant à des Juifs vandalisés », et les « extrémistes et militants radicaux pro-Hamas mènent depuis le 7 octobre 2023 une campagne d’intimidation et de violence à travers l’Europe ».
Pour l’ambassadeur, la volonté du président de la République de reconnaître un État de Palestine à la rentrée aggraverait la situation : « Les déclarations publiques harcelant Israël et les gestes en faveur de la reconnaissance d’un État palestinien enhardissent les extrémistes, attisent la violence et mettent en danger la vie juive en France », assure-t-il dans sa lettre ouverte. Et de reprendre l’argumentaire du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou : « Dans le monde d’aujourd’hui, l’antisionisme est tout simplement de l’antisémitisme. »
Celui qui n’est autre que le père de Jared Kushner, le gendre de Donald Trump, a également souligné : « Le président et moi avons des enfants juifs et des petits-enfants juifs. » Et a félicité les actions du milliardaire de l’immobilier contre l’antisémitisme. Il s’inscrit ainsi dans la ligne de l’administration Trump : à l’annonce d’Emmanuel Macron sur la reconnaissance de la Palestine, le dirigeant nord-américain avait réagi en affirmant que « cela (n’allait) rien changer » et que « sa déclaration n’avait aucun poids ». Son secrétaire d’État Marco Rubio avait de son côté rejeté « fermement » ce projet, estimant qu’il s’agissait d’un « camouflet pour les victimes du 7 Octobre » et d’une décision « imprudente ».
Une entorse à la Convention de Vienne
Dans son courrier, Charles Kushner « exhorte » également le président à « agir avec détermination », c’est-à-dire à « appliquer les lois contre les crimes haineux sans exception ; garantir la sécurité des écoles, des synagogues et des entreprises juives ; poursuivre les contrevenants dans toute la mesure du possible ; et abandonner les mesures qui donnent une légitimité au Hamas et à ses alliés. » Et le diplomate d’indiquer se tenir « prêt à travailler avec vous et avec les dirigeants de la société française pour élaborer un plan sérieux qui s’attaque aux racines de l’antisémitisme et le vaincra. »
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Des allégations et recommandations qui ne plaisent pas au Quai d’Orsay. Dans son communiqué, celui-ci martèle également que les allégations de Charles Kushner « vont à l’encontre du droit international, en particulier du devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures des États prévu par la Convention de Vienne de 1961 qui régit les relations diplomatiques ».
En effet, l’article 41 du traité qui fixe plusieurs règles de droit international en matière de relations diplomatiques stipule que « toutes les personnes qui bénéficient de ces privilèges et immunités ont le devoir de respecter les lois et règlements de l’État accréditaire. Elles ont également le devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures de cet État ». Autrement dit, un ambassadeur n’a pas le droit de commenter la politique intérieure du pays dans lequel il est en poste, sous risque de protestations diplomatiques, voire de déclaration de persona non grata (qui reviendrait à l’expulsion du diplomate).
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