Éliminés dès la phase de poules lors des derniers Jeux, le double mixte français, fort du prestigieux titre conquis en Indonésie en juin, retrouve l’Adidas Arena avec l’ambition d’y briller.
Début avril, Thom Gicquel et Delphine Delrue, tous deux âgés de 26 ans, avaient établi leur feuille de route pour 2025. À savoir conserver le titre européen conquis l’année auparavant, remporter un titre dans un tournoi de catégorie Super 750 ou 1000 (l’équivalent d’un Grand Chelem en tennis), décrocher une médaille lors des Championnats du monde à Paris et intégrer le Top 5 mondial. Des objectifs ambitieux, qu’ils ne sont plus en mesure de tenir intégralement en raison de leur défaite en finale des derniers Championnats d’Europe face aux Danois Jesper Toft et Amalie Magelund (18-21, 19-21). Néanmoins, ils ont quand même frappé très fort le 8 juin dernier en remportant le Super 1000 en Indonésie, du côté de Djakarta. Une performance inédite pour le badminton français.
Un titre qui leur permet d’aborder ces Mondiaux à Paris avec une confiance nouvelle, même si derrière, le tandem hexagonal, qui pointe à la 7e place mondiale, n’a pas réussi à surfer dessus autant qu’il l’aurait souhaité en s’inclinant au 2e tour à l’Open de Tokyo, puis dès son entrée en lice à Changzhou (Chine). Des pays asiatiques où les deux Français disposent d’une notoriété sans commune mesure avec celle qui est la leur dans l’Hexagone. Une dichotomie que vit très bien Thom Gicquel : «Par exemple, dès qu’on arrive en Indonésie, c’est très spécial car on reçoit des cadeaux dans la chambre, ce à quoi on n’est pas habitués. C’est vraiment jouissif d’avoir cette notoriété quelques semaines par an, avec également les tournois en Chine et au Japon. Cela nourrit l’ego et cela nous permet de nous faire un petit kif de vivre comme de petites stars. Et ici, à Paris, d’être inconnu ou presque, c’est parfait.»
On avait bien joué au JO, mais on n’avait pas réussi à atteindre notre objectif.
Delphine Delrue
Si le double mixte français ne court pas après la médiatisation, il rêve cependant de gloire sur le plan purement sportif au moment de commencer ces Championnats du monde à domicile ce mercredi. Avec aussi, dans un coin de la tête, cette volonté de prendre une petite revanche sur le sort, qui l’avait placé dans un groupe très relevé lors des JO 2024 dont les Bleus n’avaient pas su s’extirper. «On avait bien joué au JO, mais on n’avait pas réussi à atteindre notre objectif», analyse Delphine Delrue. «Du coup, cette année, on veut vraiment aller le plus loin possible et jouer le plus de matchs devant le public français, dans cette salle, parce que nous avons vraiment kiffé ce que nous y avons vécu lors des Jeux.» «C’est sûr qu’une compétition comme ça, cela donne beaucoup d’expérience et forcément, nous avons appris beaucoup de choses sur nous, sur la façon de se préparer…», précise son partenaire. «Après, c’était une compétition différente, avec un format différent. Aux JO, comme ce sont des poules et que c’est la seule compétition avec ce format, c’était vraiment particulier. Là, sur ces Mondiaux, la formule est la même que sur n’importe quel tournoi, donc ça va être plus facile de se mettre dedans.»
Thom Gicquel et Delphine Delrue
Anthony Dibon / Icon Sport
S’estimant plus fort qu’il y a un an, Delrue et Gicquel veulent le démontrer devant leur public, eux qui évoluent ensemble depuis huit ans désormais et qui, depuis peu, disposent d’une véritable structure à leur service. Une évolution pour eux qui se sont parfois sentis un peu seuls pour mener leur projet à bien, ce qui leur a valu une période difficile avant les Jeux de Paris. «Franchement, je ne suis pas sûr que cette mauvaise période nous a rendus plus forts», estime Gicquel. «Je me serais bien passé des un an et demi où on a galéré. Maintenant, c’est certain qu’un moment difficile comme celui-ci permet d’apprécier encore plus quand ça se passe bien, et quand on se sent soutenu et qu’il y a un groupe derrière nous.» «C’est sûr que quand ça se passe mal pendant aussi longtemps, on a l’impression de perdre du temps. Mais maintenant on est bien entouré, donc on est content», ajoute Delrue.
Parfois, c’est bien d’avoir un peu le boulard en sport.
Thom Gicquel
Alors que le badminton français vit un véritable âge d’or avec l’émergence des frères Popov, Christo et Toma Junior, ainsi que celle d’Alex Lanier, le natif de Tours insiste sur cette notion de confiance nécessaire pour performer : «Parfois, c’est bien d’avoir un peu le boulard en sport. Il faut avoir juste ce qu’il faut pour faire du bien à son ego, tout en restant lucide pour ne pas non plus arriver trop confiant. Avec les Popov qui performent en simple et en double, avec Alex qui n’arrête pas de monter, c’était bien aussi pour notre ego de nous replacer sur le devant de la scène. C’est de la jalousie positive quand on les voit réussir et inversement. Cela pousse tout le monde à donner encore plus et c’est super pour le badminton français de ne pas avoir seulement une tête d’affiche qui se retrouve un peu seule à porter le poids de toute la pression.» A Paris, en effet, ils seront bien entourés.