«Monsieur le Président, ne venez pas à Chicago. Personne ne veut vous voir ni n’a besoin de votre aide ici ». Ce sont ces mots qui ont propulsé J.B. Pritzker, 60 ans, sur le devant de la scène politique nationale. Parce qu’il est l’un des rares gouverneurs à avoir osé défier publiquement Donald Trump sur le terrain constitutionnel.

Lors de cette conférence de presse au cours de laquelle il a sèchement mis en garde le président américain, il cherchait à dénoncer la menace d’un déploiement de la Garde nationale dans Chicago, une initiative selon lui à la fois illégale, inconstitutionnelle et anti-américaine. Mais qui est ce gouverneur qui s’affirme aujourd’hui comme l’un des symboles de la résistance démocrate face à Donald Trump ? 20 Minutes dresse son portrait.

Héritier devenu gouverneur « sagouin »

Ce lundi-là, sur un quai de la Chicago River, J.B. Pritzker ne conteste pas un projet présidentiel : il incarne la résistance d’un État, l’Illinois, face à ce qu’il juge être une dérive autoritaire. « Ce n’est pas une urgence, ce n’est pas une insurrection », martèle-t-il, rappelant que la criminalité à Chicago avait chuté de moitié depuis 2021. Quelques heures après la mise en garde de Pritzker, Donald Trump a choisi de riposter depuis le Bureau ovale. Lors d’une conférence de presse, le président républicain s’est lancé dans un long discours ponctué de digressions sur la sécurité, la Constitution et ses adversaires politiques. Donald Trump a qualifié J.B. Pritzker de « sagouin », ajoutant qu’il « devrait faire plus de sport », une attaque visant sa corpulence.

Pourtant, rien ne prédestinait ce gouverneur né à Palo Alto (dans la Silicon Valley) à devenir le visage de la résistance face à Donald Trump. Héritier de la fortune Hyatt, J.B. Pritzker aurait pu rester dans le monde des affaires. Issu d’une famille juive d’origine ukrainienne, il grandit dans un environnement à la fois marqué par le poids de la tradition et par le succès entrepreneurial.

Des finances à la politique

À la tête du Pritzker Group aux côtés de son frère Anthony, il a longtemps été perçu comme un financier plus qu’un futur politique. Mais à travers sa fondation, il finance déjà des programmes d’éducation et de lutte contre la pauvreté à Chicago.

En 2018, il saute le pas : il bat le républicain Bruce Rauner et s’installe au gouvernorat de l’Illinois. Réélu en 2022, il revendique depuis avoir « rendu l’État plus fort qu’il ne l’a trouvé » : budgets équilibrés, remboursement des arriérés, investissements massifs dans l’éducation, réforme des retraites et transition écologique via le Climate and Equitable Jobs Act.

Un gouverneur en temps de crise

Son premier test arrive avec la pandémie. Fidèle aux recommandations scientifiques, J.B. Pritzker impose des mesures strictes, plus sévères que dans de nombreux autres États américains, et revendique d’avoir sauvé des vies, même lorsque cela lui a valu des critiques de la droite locale.

Plus récemment, il s’est attaqué au dossier explosif des armes à feu : interdiction des fusils d’assaut, retrait des « ghost guns » et investissements dans la police. Un gouverneur pragmatique mais ferme, qui se construit un profil national.

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Selon plusieurs médias américains, J.B. Pritzker incarne l’ennemi parfait du président Trump. Il est démocrate, mais aussi milliardaire et enfin gouverneur d’une grande métropole que le président républicain dépeint comme un « champ de guerre » depuis 2016.

Mais pour le gouverneur de l’Illinois, l’affrontement est une opportunité : montrer qu’il peut tenir tête au président et défendre les principes constitutionnels. Déjà cité parmi les potentiels candidats démocrates à la présidentielle de 2028, il a franchi un cap. Ce jour-là à Chicago, son message ne s’adressait donc pas seulement à ses concitoyens. Il visait tout le pays, avec une question en filigrane : jusqu’où laisserez-vous ce président tester les limites du pouvoir exécutif ?