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Un restaurant toulousain a vu sa réputation brisée par une vidéo Instagram montrant des asticots dans du poulet, accusation jugée peu vraisemblable vu son mode de cuisson. Comment résister à un tel bad buzz ?

Sur Instagram, un téléphone filme un plat de riz et de poulet. L’objectif zoome un morceau de viande attaqué à la fourchette, grouillante d’asticots. La vidéo dure que 18 secondes mais elle a suffi à plomber l’image d’un restaurant.

Le restaurant a subi un contrôle sanitaire le 26 août. Aucun manquement à l’hygiène n’a été constaté.

Le restaurant a subi un contrôle sanitaire le 26 août. Aucun manquement à l’hygiène n’a été constaté.
DDM – LAURENT DARD

En rentrant de vacances à Marbella, Fadila et Mansour, gérants du Grelha à Toulouse, apprennent par une capture d’écran qu’une vidéo les accuse publiquement d’avoir livré un plat infesté de vers. Publiée le 19 août, elle est immédiatement relayée par la presse et commentée en ligne.

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Les faits remontent pourtant au 16 août, date à laquelle un couple de clients commande via Uber Eats un plat de poulet braisé avec riz et wings. Le commentaire laissé alors est très positif. Ce n’est que deux jours plus tard que le couple contacte le restaurant par téléphone, évoquant un « souci » avec la commande et « des vers ou asticots ». L’un des employés promet de transmettre l’information à la direction, ce qui ne sera pas fait.
Le 19, les gérants découvrent l’existence de la vidéo par un tiers. Ils n’ont pas été prévenus.

Plainte et Snapchat en contre-feu

La gérante est certaine que les clients n’ont pas consommé leur commande le jour même, ce qui a pu « générer l’apparition d’asticots ». « À la livraison, le plat était impeccable. Notre mode de cuisson à très haute température rend d’ailleurs impossible la présence de tels insectes dans un plat sortant de nos fourneaux », assure-t-elle.
Fadila a recontacté le couple de clients : après avoir exprimé leurs regrets face à l’ampleur de l’affaire, ils ont mis fin à l’appel très rapidement.

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La Dépêche a également tenté de les joindre, sans succès, afin qu’ils puissent confirmer ou infirmer leurs accusations.
Entre-temps, les dégâts sont considérables : commentaires négatifs en chaîne, moqueries téléphoniques, fréquentation en chute libre. Fadila et Mansour constatent que des restaurateurs concurrents ont participé à cette « cabale ». Même si la publication initiale a rapidement été retirée, son impact viral a précédé sa suppression : en quelques heures, le contenu avait circulé, partagé et commenté à grande vitesse.

Une fois la stupeur passée, Fadila a porté plainte contre le couple pour dénonciation calomnieuse et Mansour a répliqué sur les réseaux : « J’ai utilisé Snapchat pour montrer nos preuves et dénoncer cette cabale. Le chiffre d’affaires s’est effondré, mais grâce à cette publication, nous avons réussi à rassurer une partie de nos clients et ça repart. Ce que j’attends désormais, ce sont des excuses du couple. »

Le duo de restaurateurs, qui affirme n’avoir jamais fait l’objet de contrôles sanitaires révélant des manquements, voit d’ailleurs cette position confortée par la préfecture. Celle-ci indique qu’ »à la suite de mentions sur les réseaux sociaux évoquant des manquements sanitaires, les services vétérinaires ont réalisé un contrôle inopiné le mardi 26 août. L’inspection n’a révélé aucun motif justifiant une fermeture administrative : les procédés de fabrication et de cuisson du poulet sont jugés conformes à une consommation immédiate. » Depuis cette affaire, les restaurateurs ont également mis en place de nouvelles procédures internes : toute réclamation doit désormais être remontée à la direction sans délai. Ils savent que cela ne suffira peut-être pas à effacer l’impact de quelques secondes de vidéo, mais espèrent au moins limiter les dégâts.