Le Royaume-Uni change de stratégie. La loi pour renationaliser progressivement le rail outre-Manche – où la plupart des compagnies ferroviaires sont privées – a été approuvée par le Parlement britannique. Une promesse de longue date du parti travailliste. Cette loi a reçu mercredi en fin de journée le feu vert de la Chambre des lords, la Chambre haute du Parlement britannique, après un vote rejetant à une courte majorité un amendement de l’opposition conservatrice. Elle doit désormais être promulguée par le roi.
Plus concrètement, la réforme fera passer les opérateurs privés dans le giron public à l’expiration de leurs contrats – ou plus tôt en cas de mauvaise gestion – et les regroupera dans un organisme nommé « Great British Railways ». Selon le gouvernement, le projet permettra d’éviter de payer des compensations aux exploitants actuels, dont les différents contrats expireront d’ici 2027.
Le syndicat ferroviaire TSSA a salué« un moment historique qui ouvre la voie au retour de nos chemins de fer dans le giron public, là où ils appartiennent, en tant que service vital ».
Des performances mauvaises
Les travaillistes avaient pointé, peu après l’élection de Keir Starmer le 4 juillet après quatorze années de gouvernements conservateurs, « des années de performances mauvaises et inacceptables » dans le secteur ferroviaire. La privatisation des opérateurs avait eu lieu au milieu des années 1990 sous le Premier ministre conservateur, John Major. La promesse : un meilleur service, plus d’investissements, moins de dépenses pour l’État. Or, les infrastructures et le matériel sont de plus en plus vieillissants. En outre, l’opérateur public British Rail est déficitaire depuis des années.
Le nombre de passagers s’est accru dans un premier temps, tout comme les investissements. Mais les annulations et les retards sont monnaie courante et les passagers se plaignent des prix. Certains billets sont aujourd’hui réglementés, mais pas tous, ce qui peut faire exploser les tarifs.
Des nationalisations au fil du temps
Un déraillement causé par des microfissures dans les rails, qui avait fait quatre morts en 2000, a constitué un premier gros couac. La société privée Railtrack, en difficulté, avait alors réclamé des subventions publiques pour améliorer la sécurité. Elle avait toutefois fait scandale en en distribuant une partie à ses actionnaires.
Le gouvernement travailliste de Tony Blair a, par la suite, réattribué le réseau à Network Rail, société privée sans actionnaire et sans dividende, financée par l’État et les concessionnaires. Une quasi-renationalisation. L’entreprise est désormais considérée officiellement comme publique.
Au fil des années, le gouvernement a procédé à des nationalisations de certaines compagnies en raison de leurs mauvaises performances. L’idée était, jusqu’ici, de les gérer à titre temporaire, avant un retour au secteur privé. Et l’État continue d’injecter de l’argent : 11,9 milliards de livres entre avril 2022 et mars 2023, soit la moitié des revenus du rail britannique. Le secteur a aussi connu des grèves ces dernières années, sous la pression de la crise du pouvoir d’achat. Les opérateurs principaux en Écosse et au Pays de Galles sont eux aussi redevenus publics récemment.