Le troisième étage de la construction d’un réseau de chaleur métropolitain se pose à Strasbourg. Son Eurométropole (EMS) a attribué à la société Eden la concession pour la construction et l’exploitation d’un nouveau secteur de 40 km de conduites au nord de la ville-centre et de l’agglomération, à partir de 2026, pour une durée de 24 ans.

Sous son acronyme évocateur du paradis mais plus prosaïquement contracteur de Energies Décarbonées Eurométropole Nord, le lauréat cache un actionnaire principal (65%) déjà actif sur le sujet localement. Réseaux de chaleurs Urbains – Alsace (R-CUA) est en effet l’opérateur de l’extension du réseau de Strasbourg-Centre qui se réalise d’ici à 2029, en parallèle de celle pour les quartiers ouest assurée par Engie Solutions…le candidat resté en lice face à lui – Coriance et ES Services énergétiques, filiale du groupe EDF, avaient également répondu – pour le nouveau marché au nord.

R-CUA, lui-même filiale du distributeur local historique de gaz R-GDS / Aster Energies et de l’énergéticien suisse Primeo, s’est allié à la Banque des territoires, qui détient 35% du capital d’Eden. Les travaux de constitution du nouveau réseau porteront sur un montant de 89M€, à réaliser principalement en deux phases jusqu’en 2030. L’investissement bénéficie à 4% d’une aide de l’Agence de la transition écologique (Ademe) et des produits des Certificats d’économie d’énergie (CEE).

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90% d’énergies renouvelables

La localisation des chantiers lance un mouvement de diffusion de la chaleur urbaine vers la périphérie. Celle-ci va pour la première fois s’étendre au-delà des limites de Strasbourg pour rejoindre plusieurs villes au nord : Schiltigheim, Bischheim, Hoenheim pour le réseau principal, ainsi que les communes plus excentrées de Mundolsheim et Souffelweyersheim, au moyen de deux réseaux secondaires inclus dans la délégation de service public (DSP).

Le nouveau réseau desservira d’est en ouest la partie nord de la ville de Strasbourg et les communes de première couronne.Le nouveau réseau desservira d’est en ouest la partie nord de la ville de Strasbourg et les communes de première couronne. Crédit : Eurométropole de Strasbourg.

« Nous commençons ainsi à atteindre la seconde couronne, à la densité moins forte, là où la justification d’un réseau de chaleur urbain est plus difficile à démontrer. Ce sera une expérimentation intéressante de sa faisabilité », a souligné Marc Hoffsess, conseiller de l’EMS chargé de la transition énergétique, lors d’une présentation du projet le 26 août.

La production s’élèvera à 110 Gwh à partir d’une puissance de 64 MW, de sorte à couvrir les besoins de 11 000 logements et équivalents.

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Chaleur fatale

La DSP fixait un seuil d’alimentation d’au moins 85% en énergies renouvelables. L’offre lauréate parvient à 90%. Au sein de ce taux, elle a particulièrement retenu l’attention de l’EMS par la place prépondérante qu’elle a pu proposer pour la chaleur fatale, à partir de ses infrastructures existantes. En effet, R-CUA exploite dans la zone portuaire de Strasbourg un réseau qui se « nourrit » des excédents de chaleur d’industriels, pour l’heure Tredi (traitement de déchets) et le papetier Blue Paper. La connexion avec celui-ci portera à 40% la part de chaleur fatale dans le nouveau réseau nord.

Une autre récupération d’énergie apportera 35%, celle dégagée par l’incinération des boues de la station d’épuration métropolitaine, pour sa partie ne servant pas aux besoins internes de l’installation de traitement. Enfin, le réseau nord tirera une originalité de sa troisième source (15% sur une année) : une centrale solaire lui sera dédiée pour la production de l’eau chaude sanitaire au moyen de 2 650 panneaux grâce à la technologie d’une société finlandaise, Meriaura Energy. Le dernier appoint de 10% viendra du gaz, seule énergie fossile. Les deux réseaux secondaires, eux, fonctionneront principalement à la pompe à chaleur.

Au total de ses réseaux existants et en cours de développement, la métropole devrait parvenir en 2030 à une production annuelle de l’ordre de 800 Gwha, ainsi dimensionnée pour alimenter 80 000 logements.