« Anne-Aymone Giscard d’Estaing m’a dit être très contente qu’une femme ait remporté le prix. Elle m’a aussi confié qu’à son époque, cela aurait été bien plus compliqué ».
Ces phrases prononcées par l’épouse de l’ancien président de la République Valery Giscard d’Estaing, le 14 octobre 2024, au Sénat sont restées gravées dans la mémoire de Laura Renucci, 28 ans, originaire de Santa-Maria-Sicché, côté paternel et de Pastricciola, côté maternel.
Ici avec Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères de France photo Bruno Delessard
Comme chaque détail de cette journée où elle s’est vue remettre en présence de différentes personnalités dont Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, le prix Valéry Giscard d’Estaing.
Chercheur junior au sein d’une société spécialisée dans le dialogue social en Europe
Une distinction « créée par la Fondation Valéry Giscard d’Estaing, en partenariat avec la Fondation Robert Schuman. L’objectif est de récompenser un étudiant pour son parcours à la fois professionnel et académique ainsi que pour son engagement à l’échelle de l’Europe », explique-t-elle.
Auparavant comme plus d’une centaine de candidats originaires de toute la France, elle réalise un court mémoire sur le thème de l’innovation institutionnelle dans la perspective d’un élargissement de l’Europe.
Les chercheurs, les politiques et les diplomates qui composaient le jury du prix ont été sensibles à ses propositions. Au-delà des mondanités, elle a la sensation, à juste titre, que quelque chose de crucial s’est joué. « Ce prix permet d’étoffer son réseau. J’ai plus d’un millier d’abonnés sur LinkedIn dont plusieurs personnalités politiques », se félicite-t-elle. Désormais, pour réseauter, elle met aussi à profit « des conférences diverses » ainsi que la formation en ligne qu’elle vient d’intégrer, « campus démocratie » portée par Jean-Pierre Raffarin, « le parrain de la promo », croisé notamment à la Maison de l’Europe.
Laura Renucci, lauréate du prix Valery Giscard D’Estaing, lors de son discours au Sénat. doc cm
Dans le même temps, on retrouve la jeune femme en tant que chercheur junior au sein d’IR Share, une société spécialisée dans le dialogue social en Europe et au-delà. Ces trajectoires illustrent la tendance à explorer plusieurs voies à la fois.
L’Institut national du service public, remplace l’école nationale d’administration
Depuis le départ, elle aime mener plusieurs vies. La danse, la musique donnent d’abord le tempo. « J’ai été scolarisée à l’école primaire au Loretto. J’ai ensuite fait mes études secondaires au collège et au lycée Saint-Paul », raconte-t-elle.
En parallèle, elle apprend le piano, la guitare, opte pour le jazz et les claquettes, se passionne pour les chorégraphies puis remporte quelques prix en équipe, à Dijon, à Olbia en Sardaigne, entre autres. Jusqu’à ce qu’elle continue mais « en autodidacte, car cela empiétait trop sur mes études ».
Elle passe un bac littéraire haut la main, avant d’intégrer les classes préparatoires du lycée Paul-Cezanne à Aix-en-Provence puis l’université d’Aix-Marseille, de Nanterre, de la Sorbonne nouvelle, de Leiden aux Pays -Bas.
Les facs et les masters 1 et 2 s’enchaînent, en philosophie, en affaires européennes trilingues, en affaires européennes et internationales. Dans le même mouvement, elle fait un détour par l’Institut national du service public (INSP), qui depuis 2022 remplace l’école nationale d’administration (ENA).
Une veille sur la Moldavie, l’Arménie, la Biélorussie et l’Azerbaïdjan
Elle y reste le temps d’obtenir un master supplémentaire, expert en affaires publiques européennes.
Elle fait partie de la promotion Nicole Fontaine. Elle a tout fait pour. » J’ai milité pour que ma promo porte le nom de celle qui a, en plus d’avoir été ministre, a été député européenne, puis présidente du Parlement européen. J’y suis arrivée », se félicite-t-elle. Avant de préciser : « je n’ai pas suivi le cursus énarque classique mais plutôt le cycle des hautes études européennes qui prépare à des carrières au sein des institutions de l’Union Européenne. Ce qui ouvre beaucoup de portes. »
Lors de ce cursus, son quotidien est, quelques mois durant, celui d’une stagiaire au secrétariat général des affaires européennes.
« Une partie de mon travail consistait à rédiger des fiches sur la guerre en Ukraine. J’ai aussi mené une veille sur la Moldavie, l’Arménie, la Biélorussie et l’Azerbaïdjan. Plus globalement, j’étais chargée des missions jumelage c’est-à-dire des projets de coopération entre les pays de l’Union. Il y avait beaucoup de données confidentielles. «
Possibilité de faire un master à distance à condition de savoir travailler en autonomie
Dans cet environnement de tumultes géopolitiques, elle s’est sentie à son aise. Elle s’y projette aussi. Au point de s’être lancée dans une préparation au concours de diplomate, puis d’envisager une thèse « dans le domaine des relations internationales, diplomatie féministe ». Elle avoue pourtant hésiter un peu « avec le journalisme de terrain, avec une spécialité diplomatie ». Elle enchaîne sur « son appétence pour les langues étrangères », pour les déplacements à répétition. » Lorsque je reste trop longtemps au même endroit je finis par m’ennuyer. Un diplomate bouge en moyenne tous les 2 et 3 ans. C’est parfait. »
Celle qui jongle facilement entre les cursus et les frontières dit garder la Corse comme point de repère. « C’est ma maison », insiste-t-elle.
Elle évoque des liens très forts avec les siens, comme avec ses « profs de Saint-Paul qui ont toujours été là, qui m’ont toujours soutenue ».
Quant à la poursuite de longues études, « tout dépend des objectifs de chacun. Quoi qu’il en soit, il faut essayer de se former le plus tôt possible lorsqu’on est jeune et libre. Il est aussi possible de faire un master à distance à condition de savoir travailler en autonomie. Il y a une grande diversité de filières. Il est important de choisir celle qui nous intéresse puis de tracer sa route ».