Monticules de fientes, une couche de graines éparpillées sur le sol et une odeur nauséabonde. L’opération de saisie à laquelle le collectif UPA06 a participé ce mercredi 27 août au matin était d’une ampleur assez inédite. Assistés par la police niçoise, les bénévoles ont procédé à la saisie surprise de 147 oiseaux de diverses espèces dans deux appartements de la rue Lamartine, à Nice.

Les deux logements, situés face à face sur le même palier, appartiennent à un couple d’une soixantaine d’années. Depuis leur emménagement il y a plus d’une trentaine d’années, ils accumulaient les volatiles: de nombreuses espèces de perruches, mais aussi deux couples d’inséparables, des pigeons, des colombes, des perroquets, des tourterelles ou encore des oiseaux exotiques. Avec eux, deux chats et deux chiens.

« Des conditions horribles et insalubres »

« Ils sont là dans des conditions insalubres et horribles: tous entassés, dans des cages minuscules et des graines jusqu’aux pattes », décrit Marine Longeard, bénévole pour le collectif UPA06. Pour l’assister, elle avait sollicité l’association Lavolière, spécialisée dans le sauvetage des oiseaux. Tous étaient venus équipés de surchaussures, gants et masques. « Dans les appartements, c’est très dur. C’est tellement sale et poussiéreux », prévient Muriel Caron, de l’association Lavolière.

La presse n’a pas été autorisée à pénétrer à l’intérieur des logements, décrits par UPA06 comme des appartements « de l’horreur ». Mais le collectif raconte: des cages entassées dans la cuisine, dans la salle de bains et sur les lits et le sol jonché d’une épaisseur de plusieurs centimètres de graines dans l’un des appartements.

Ce mercredi 27 août, les riverains ont donc assisté à un ballet de cages remplies d’oiseaux de toutes les couleurs, descendues dans un camion. Les piaillements, inhabituels dans cette rue de Nice, ont attiré plusieurs curieux, quand les cages crasseuses en ont repoussé certains. « Quelle horreur! », glisse en faisant la moue une passante.

« Une des pires saisies »


Les nombreuses cages ont été disposées dans un camion par les bénévoles, aidés de la police. Photo Justine Meddah.

« J’ai déjà fait plusieurs saisies. Mais celle-ci, c’est une des pires. Il y avait des bébés perruches, des œufs éclatés, certains oiseaux avaient des tumeurs. Et plein de poux », décrit Muriel Caron. Auprès de la police, le mari a admis qu’il y avait « un problème » avec les oiseaux. Aucun n’a été retrouvé mort ou en liberté, d’après les associations. Mais les bêtes avaient bien pris possession de l’appartement. « On ne sait même pas comment le couple faisait pour dormir », s’interroge Marine Longeard. D’après plusieurs sources, ils roupillaient parfois sur un fauteuil ou sur le balcon.

C’est lors d’une visite d’huissiers pour une tout autre affaire que des policiers ont découvert l’état de l’appartement. Ils ont ensuite donné l’alerte, qui a donné lieu à un dépôt de plainte d’UPA06. « Si nous n’étions pas tombés dessus par hasard, les oiseaux y seraient encore. Et combien y a-t-il d’appartements dans ce cas-là à Nice? », s’inquiète Hélèna, bénévole pour le collectif.

Quel devenir pour les oiseaux?

De son côté, la propriétaire a assisté, impuissante, à la saisie de ses volatiles. « Vous les mettrez bien à part pour que je puisse les récupérer », a-t-elle insisté. Car pour le moment, les oiseaux réquisitionnés par la justice ont été placés provisoirement en quarantaine dans les serres varoises de l’association, mais ne peuvent pas être confiés à l’adoption. « Tant que la justice n’a pas rendu un verdict définitif et incontestable, la propriétaire peut toujours demander à récupérer ses animaux », détaille Marine Longeard. Selon elle, la dame pourrait être atteinte d’un syndrome de Noé, un trouble mental qui conduit à accumuler les animaux domestiques au point d’être dépassé.

« Elle n’était pas comme ça à l’origine. Elle parlait bien, mais elle s’est progressivement renfermée sur elle-même. Je pense qu’elle a des troubles psychologiques », confie une habitante de l’immeuble. Au quotidien, les chants d’oiseaux ne la gênaient pas, mais elle était incommodée par les odeurs et la saleté du palier.

Suite au dépôt de plainte de trois associations pour maltraitance, l’affaire est désormais entre les mains du parquet de Nice, qui devra dire dans les jours prochains s’il poursuit les propriétaires de l’appartement ou s’il classe l’affaire sans suite. Il y a deux ans, la rue Lamartine avait été le théâtre d’une scène similaire: 159 chats et 7 chiens avaient été saisis dans un appartement de 50m². La procédure n’est pas terminée car les propriétaires ont fait appel.


La police niçoise a mis la main à la pâte pour descendre les cages de l’appartement au camion. Photo Justine Meddah.