À quelques pas de l’aérodrome de Bron, à Chassieu (Rhône), la métropole de Lyon a décidé de réhabiliter un terrain inoccupé pour en faire la première ferme métropolitaine en régie du territoire.
Lancé en début de mandat, ce projet qui est désormais entré en phase de production, répond à plusieurs enjeux : augmenter l’offre de produits bio dans la restauration collective, maintenir l’agriculture sur le territoire mais également en faire « une vitrine des pratiques agricoles agroécologiques », pointe Jérémy Camus, vice-président du Grand Lyon à l’agriculture et à l’alimentation.
Le site a aussi une vocation pédagogique, souligne le président de la Métropole, Bruno Bernard. Situé à proximité de l’arrêt du tram T5, il devrait accueillir des collégiens et des collégiennes.
Augmenter la part de produits bio dans les assiettes
Sur cette parcelle de quatre hectares, dont deux sont actuellement cultivés avec des courges butternut, du potimarron ou encore des oignons, 15 tonnes de légumes ont été récoltées l’an dernier. Pour cette année, l’objectif est de monter à 60 tonnes, qui répondront à une partie des besoins des cantines de 38 collèges publics de la métropole.
Crédits : métropole de Lyon, ferme métropolitaine de Chassieu
Figurant parmi les bonnes élèves, la collectivité lyonnaise « fournit déjà 64 % de produits sur les critères Egalim avec 49 % de bio contre 6 % de bio au début du mandat », pointe Bruno Bernard, alors que la réglementation impose seulement 20 % de bio.
Et elle n’entend pas s’arrêter là. « Dès cette rentrée, certains collèges auront 75 % de produits bio dans leurs assiettes et la totalité pour cinq collèges en régie exemplaire », appuie-t-il.
Le choix d’une ferme métropolitaine en régie – non pas une régie « ad hoc », comme pour la gestion de l’eau -, dont la gestion est conduite par les services de la Métropole, permet aussi de dépasser les réglementations des marchés publics qui ne permettent pas de favoriser les produits cultivés localement.
Un modèle de transition à double titre
Le projet se veut aussi un exemple en matière de respect de l’environnement et surtout, de la ressource en eau, alors que l’ensemble des cours d’eau du Rhône ont été placés en sécheresse à la mi-août, après deux épisodes de canicule.
L’irrigation se fait grâce à un goutte-à-goutte et d’ici quelques mois, une haie d’un kilomètre sera installée le long du terrain pour protéger le site du vent et ainsi réduire l’assèchement de la parcelle.
S’ajouteront également des haies fleuries pour faciliter la pollinisation et trois mares qui devraient accueillir la biodiversité nécessaire pour lutter contre les nuisibles. Car « aucun intrant chimique n’est utilisé », rappelle Mewan Melguen, agriculteur responsable du projet.
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Ce dernier, maraîcher auparavant dans le Rhône, vante aussi un temps de travail divisé par deux. « Je travaille 35 heures par semaine contre 70 heures avant. C’est grâce aux machines que nous avons et c’est très bien comme ça. »
Le projet n’en est néanmoins qu’à ses débuts. Une serre de 5 000 mètres carrés verra le jour dans les prochains mois, et les deux hectares restant seront mis en culture pour continuer à tester et à produire selon les besoins des cuisiniers, c’est-à-dire, des légumes et fruits de gros calibre.
Une pierre parmi d’autres
Ce qui amène forcément à la question du rendement, par rapport à l’agriculture conventionnelle notamment. « On ne pourra le déterminer qu’à la fin de la saison », explique l’agriculteur, qui ajoute : « Sur 200 mètres carrés, on a fait 660 kilos commercialisables de potimarron, donc cela fait 30 tonnes à l’hectare et un conventionnel serait à 15 ou 20 tonnes. »
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Le système permet de fournir en direct les cantines concernées, sans système d’achat et vise à être « rentable », confirme Jérémy Camus qui présente ce soutien à l’alimentation comme une « notion de service public ».
Estimé autour de 2,3 millions d’euros, avec l’achat des outils agricoles, le projet a été cofinancé par des partenaires, dont la Compagnie nationale du Rhône (CNR), à hauteur de 350 000 euros sur quatre ans. Le coût de fonctionnement du système, qui comprend essentiellement les deux salaires, s’élève autour des 80 000 euros par an, estime Jérémy Camus. À terme, l’ambition est de réussir à mutualiser des machines, reconnaît-il, afin de réduire les coûts d’entrée.
Car avec ce projet, la collectivité ajoute une pierre à un édifice qu’elle imagine bien plus vaste, une deuxième ferme de ce type étant prévue pour le prochain mandat, dans l’ouest lyonnais. Cela vient également compléter « l’espace test » de Vaulx-en-Velin, qui permet à trois agriculteurs de s’essayer avant de lancer leur propre exploitation en bio.