Dans les années 1980, la France développa le missile semi-balistique Hadès qui, censé remplacer le Pluton, à capacité nucléaire, fut mis en service au sein du 15e Régiment d’Artillerie [RA] au moment de l’implosion de l’Union soviétique et, donc, de la fin de la Guerre froide.
D’une portée de 480 km, le Hadès était doté d’un système de guidage inertiel [donc résilient au brouillage électronique] , pouvant être programmé pour effectuer des manœuvres évasives à l’approche de sa cible. Un Véhicule lanceur banalisé RVI [ex-Arquus] de 380CV avait la capacité d’en emporter deux exemplaires.
Le contexte géopolitique, marqué par la réunification allemande et la fin du Pacte de Varsovie, justifia l’abandon de ce missile par l’armée de Terre, en 1996. Les raisons qui motivèrent son retrait sont toujours valables aujourd’hui. Pour autant, le Royaume-Uni a l’intention de doter la British Army d’une capacité similaire, à la différence près que celle-ci sera « conventionnelle » et non nucléaire.
En effet, le 27 août, le ministère britannique de la Défense [MoD] a émis un avis à l’adresse de l’industrie pour développer un missile balistique d’une portée supérieure à 600 km et pouvant être lancé « en toute sécurité depuis une plateforme mobile dans une environnement tactique à haut risque ».
Mis au point dans le cadre du programme « Nightfall », ce missile devra être en mesure d’emporter une charge militaire de 300 kg et de suivre une trajectoire semi-balistique. Le MoD exige qu’il soit manœuvrable en phase terminale afin de garantir une précision de l’ordre de cinq mètres et qu’il soit résilient dans un environnement électromagnétique complexe », notamment quand les signaux GPS sont brouillés.
Enfin, ce missile devra être capable d’atteindre sa cible « dans les dix minutes suivant son lancement ».
« Nous envisageons que tous les effecteurs Nightfall soient tirés depuis le même lanceur dans les 15 minutes suivant son arrêt sur un site de lancement. Après le tir, le véhicule lanceur et son équipage doivent être en mesure de quitter rapidement la zone, idéalement en 5 minutes », précise le MoD.
Autre point : le prix unitaire de ce missile ne devra pas dépasser 500 000 livres sterling [environ 580 000 euros], hors charge militaire, lanceur et coût de développement.
« Nous recherchons des technologies pouvant être mises en production dans un délai de 9 à 12 mois afin de fournir au moins cinq unités pour les essais », avance le MoD. Ce qui est un objectif ambitieux… d’autant plus que la conception du Nightfall doit « idéalement être exempte de restrictions commerciales et d’utilisation imposées par des gouvernements étrangers », tout en étant susceptible d’évoluer ultérieurement [portée supérieure, meilleure précision, etc.].
Le MoD a l’intention de donner plus de détails lors d’une journée d’information, qui tiendra le 24 septembre, à Londres. Après avoir l’examen des propositions qu’il recevra, il compte sélectionner trois projets d’ici la fin de l’année, l’objectif étant d’effectuer des essais « en conditions réelles » en 2026.
À noter que, ayant rejoint le projet européen ELSA [European Long Strike Approach], auquel la France participe, aux côtés de la Pologne, de l’Italie et de la Suède, le Royaume-Uni et l’Allemagne se sont mis d’accord pour développer conjointement « une nouvelle capacité de frappe » reposant sur un missile d’une portée supérieure à 2 000 km.
Photo : Illustration – Missile balistique tactique américain ATACMS