L’interprofession des œufs (CNPO) tire la sonnette d’alarme. Elle accuse certains distributeurs français d’avoir importé des centaines de milliers d’œufs en provenance d’Ukraine, qui ne respecteraient pas les normes européennes de production et pourraient contenir des antibiotiques interdits.

Depuis le printemps, plusieurs lots d’œufs ukrainiens estampillés code 3 (élevage en cage) ont été repérés dans des rayons de grandes surfaces, notamment chez Carrefour et E. Leclerc. Carrefour, déjà mis en cause en juin par la Coordination Rurale via une vidéo montrant des œufs ukrainiens dans l’un de ses magasins, dément toute commercialisation de ces produits. Le groupe a affirmé qu’il ne « commercialise aucun œuf d’origine ukrainienne ». Contacté, E. Leclerc n’a pas répondu.

Une consommation en forte hausse

Avec l’inflation, les Français se tournent massivement vers l’œuf, considéré comme une protéine accessible. La consommation a bondi de 5 % en volume depuis le début de l’année, soit 350 millions d’œufs supplémentaires par rapport à 2024. « On a été capable de répondre et de fournir la grande distribution », souligne Yves-Marie Beaudet, président du CNPO.

Pour l’interprofession, le problème dépasse le volume importé – environ 300.000 œufs selon ses informations. « Qu’on en importe un peu d’Espagne ou d’Italie, ça reste en Union européenne. Mais quand on va chercher en Ukraine, dont les normes ne sont pas en adéquation avec la réglementation européenne, ce n’est simplement pas possible », insiste Yves-Marie Beaudet.

Alertes sanitaires et tensions avec la distribution

Selon le CNPO, ces œufs ne respectent ni la réglementation européenne sur l’élevage en cage, ni l’accord français sur l’ovosexage (destiné à éviter le broyage des poussins mâles), ni les règles sanitaires en matière d’antibiotiques. Le système européen Rasff a déjà recensé quatre cas de détection d’antibiotiques interdits dans des œufs venus d’Ukraine en juillet et août. Le CNPO évoque un « risque sanitaire important » et accuse les distributeurs de double discours.

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Les enseignes demandent aux producteurs français de réduire les élevages en cage, voire de bannir les œufs code 3, mais accepteraient d’en importer à moindre coût depuis l’Ukraine. « C’est peut-être un coup d’essai », met en garde Yves-Marie Beaudet. Face à ce qu’elle considère comme une concurrence déloyale, la filière appelle les autorités à « renforcer les contrôles » et propose à la grande distribution une « réunion d’urgence » pour régler la situation.