L’interprofession des œufs (CNPO) a dénoncé jeudi l’importation par certains distributeurs de centaines de milliers d’œufs en provenance d’Ukraine. Des produits qui ne « respectent pas les normes de production européennes et pouvant contenir » des antibiotiques interdits.
Depuis le printemps, plusieurs lots d’œufs provenant d’Ukraine avec un code 3 – signifiant un élevage en cage – ont été repérés dans plusieurs grandes surfaces, notamment des enseignes Carrefour et E. Leclerc. Ce jeudi, l’interprofession des oeufs (CNPO) a dénoncé cette importation de centaines de milliers d’œufs ne « respectant pas les normes de production européennes et pouvant contenir » des antibiotiques interdits. L’organisme réclame des contrôles de conformité « renforcés ». Carrefour, déjà épinglé par la filière en juin après une vidéo du syndicat agricole Coordination Rurale montrant des œufs en provenance d’Ukraine dans l’un des magasins du groupe, a assuré jeudi à l’AFP qu’il ne « commercialise aucun œuf d’origine ukrainienne ». E. Leclerc n’a pas répondu dans l’immédiat.
Face à l’augmentation de la consommation d’œufs, protéine animale privilégiée en période d’inflation, des tensions dans les stocks ont émergé depuis le début de l’année et certains rayons se sont vidés, parfois sous l’effet des achats de précaution par des consommateurs soucieux. « Les ventes ont augmenté de 5% en volume cette année (à fin juillet) par rapport à l’année 2024, soit environ 350 millions d’œufs en plus par rapport aux sept milliards de l’année dernière. On a été capable de répondre et de fournir la grande distribution », explique à l’AFP Yves-Marie Beaudet, président du CNPO. « Qu’on en importe un peu d’Espagne ou d’Italie, ça reste en Union européenne. Mais quand on va chercher en Ukraine, dont les normes ne sont pas en adéquation avec la réglementation européenne, ce n’est simplement pas possible », ajoute-t-il.
Double discours
Il reconnaît que 300.000 œufs récemment importés selon lui par E. Leclerc ne représentent qu’une très faible quantité, mais « c’est peut-être un coup d’essai » visant à s’approvisionner à moindre coût. Il dénonce un double discours de la distribution, dont les fédérations ont quitté l’interprofession des œufs au début de l’été. Selon lui, les enseignes demandent aux producteurs de réduire la proportion de poules en cage, ce qui nécessite des transformations de bâtiments, voire refusent de commercialiser des œufs code 3, mais « ils se permettent d’en importer ».
Selon le CNPO, les œufs venus d’Ukraine ne respectent pas la réglementation européenne sur l’élevage en cage (notamment sur la densité), ni l’accord de la filière française sur l’ovosexage qui permet d’éviter le broyage – désormais interdit – des poussins mâles en détectant le sexe dans l’œuf à l’aide d’une technologie coûteuse, ni les normes en matière d’antibiotiques. Le système d’alerte qui signale les problèmes relatifs aux produits agroalimentaires dans l’Union européenne (Rasff) a recensé quatre contrôles en juillet et août ayant révélé la présence d’antibiotiques interdits dans des œufs en provenance d’Ukraine.
Évoquant un « risque sanitaire important », le CNPO appelle les autorités à renforcer les contrôles et appelle la grande distribution à « une réunion d’urgence » pour « remédier à cette situation de concurrence déloyale ».
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