l’essentiel
Pour présenter son nouveau film « L’Homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme », tourné dans l’Aude, Pierre Richard était de passage au Pathé Wilson, hier soir, à Toulouse. Bon pied bon œil malgré ses 91 ans et des rumeurs sur sa santé…
Depuis « Droit dans le mur » en 1997, Pierre Richard n’avait pas repris sa place derrière la caméra. Absence désormais réparée grâce à la sortie, le 17 septembre, de son huitième long-métrage « L’Homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme » qu’il présentait, hier soir, au Pathé Wilson devant un large public enthousiaste.
La popularité du jeune nonagénaire ne se démentant pas et la rumeur de santé chancelante colportée par les réseaux sociaux et une presse en manque de sensations mise à mal, l’acteur réalisateur a bien voulu se prêter à l’exercice de l’échange. « Ah, vous avez lu toutes ces bêtises ? ! C’est fatigant de lire : Il est accablé, il va arrêter… J’ai tellement entendu ça et ça fait trois fois qu’on annonce ma mort ! Au moins je suis le seul qui sait ce qu’on dira de lui quand il sera mort ! »
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Mieux vaut parler du film qui prouve allègrement que le plaisir de tourner et de s’amuser est bel et bien là. Parce que le cinéma permet tout, même d’arrêter le chant des cigales ! « C’est mon univers à moi de tout arrêter, de tout inventer, de me permettre d’avoir des rêves éveillés à tout bout de champ selon les circonstances. Je rentre dans mon « cinémoi », mon cinéma à moi. Il m’est resté quelques bribes de goût pour le burlesque, la comédie et l’onirisme même si je raconte une histoire plus grave ou plus profonde. Je me permets tout ! » Même de croiser Che Guevarra, le petit Chaperon Rouge, une tribu amazonienne, de lorgner vers « Mad Max » et les westerns de Sergio Leone (scène courte désopilante) qui permettent d’aborder le fond des choses, en l’occurrence la pression humaine exercée sur la nature : « Ce sont des rêves qui ont tout de même une signification même s’ils sont drôles. Comme vous vous en doutez, je suis contre le racisme, contre la dévastation des forêts. Je parle principalement de l’Amazonie parce que ça me préoccupe mais je dirais même que j’ai beaucoup souffert avec les 17 000 hectares de mes voisins qui ont brûlé dans l’Aude. À cause de la bêtise humaine en plus. »
Personnages extravagants
Et l’Aude on y arrive puisque c’est à Gruissan, Narbonne, Armissan, Ferrals-les-Montagnes que le tournage s’est déroulé. Car c’est à Gruissan, au Domaine de l’Évêque, que l’artiste a posé ses valises depuis quatre décennies et s’est piqué d’une passion pour le vin. Aussi, la région montre-t-elle ses atours dans le film, mais ce sont ses habitants qui ont motivé l’écriture de l’histoire : « J’ai commencé par écrire sur les personnages extravagants que je croise au village depuis 40 ans mais ce n’est pas suffisant pour faire un film même s’ils sont très drôles ou originaux. Je me suis penché sur une histoire plus vaste qui aborde le thème de l’écologie. Puis, en tournant, je me suis rendu compte de la beauté des choses, je me suis intéressé à l’image et même au temps qui passe, au temps qui prend le temps. »
Avec le luxe de tourner à la maison : « J’étais content de tourner en octobre-novembre parce que je suis là tout l’été en juillet-août tous les ans depuis 40 ans mais rester en octobre-novembre ce n’est pas pareil, ce n’est pas la même lumière, ce n’est pas le même ciel donc j’étais heureux de voir ce pays sous une autre couleur, sous un autre angle, et c’est peut-être aussi pour ça que le film est beau. Parce que sinon quand c’est bleu, il n’y a rien de plus con que le bleu, c’est tout le temps bleu ! Tandis qu’avec ce film, il y a du gris, il y a du bleu, il y a des couchers et des levers de soleil au-dessus des montagnes, à travers les nuages. » Et le casting a fait le reste. « J’ai eu une chance inouïe de tomber sur ce jeune de 19 ans, Timi-Joy Marbot, dont la présence était évidente. Sophie Barbero, Patrick Ligardes et les autres sont tous parfaits et même les figurants, qui ne sont pas professionnels et ne se prennent pas pour des gens de cinéma, étaient joyeux, heureux de faire ça. Ils se sont amusés et je leur sais gré de m’avoir apporté le bonheur d’être ensemble. » Et celui de fabriquer un objet de cinéma, un peu à part, touchant, drôle, engagé et poétique.
« L’Homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme » de et avec Pierre Richard, Timi-Joy Marbot, Gustave Kerven, le 17 septembre au cinéma.
Un film sur la défense de la nature
L’amour de la nature rassemble Grégoire (Pierre Richard) et Michel (Timi-Joy Marbot) malgré le fossé des générations. Amis et rêveurs, ils s’appliquent à cacher un ours échappé d’un cirque et à bien vivre dans les décors de rêve de l’Aude, de Gruissan et de sa région. Et parmi les « vrais personnages » que fréquente l’acteur-réalisateur depuis plus de 40 ans qu’il est installé au Domaine de l’Évêque dans le village. Le film magnifie les lieux et fait la part belle au cinéma rêveur, burlesque mais engagé de Pierre Richard. Une belle photo, des acteurs avec le véritable accent du Midi et le plaisir de voir le réalisateur-acteur toujours actif à 91 printemps.