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C’est un procès qui était très attendu par les habitants de Villemur-sur-Tarn. Un boulanger suspecté d’avoir fait exploser un local loué par un concurrent a été condamné à 5 ans de prison. Mais il s’est servi d’une faille judiciaire pour s’échapper du tribunal avant son incarcération…

Il a filé à l’anglaise sous les yeux de policiers et magistrats impuissants. En l’absence de mandat de dépôt préalable, la loi ne permet pas de retenir un prévenu libre au moment du verdict en correctionnelle. Cette faille judiciaire a permis à un homme, condamné pour avoir fait exploser un commerce concurrent, de fuir avant même l’annonce de sa peine. Il a écopé de cinq ans de prison, dont un avec sursis. Un mandat d’arrêt international a été lancé pour retrouver cet individu, vraisemblablement en fuite au Maroc.

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Les faits remontent au début de l’année. Dans la nuit du 5 au 6 mars, un violent incendie s’est déclenché au 1 avenue Michel Rocard, à Villemur-sur-Tarn, au nord de Toulouse. Des bouteilles de gaz, disposées volontairement à l’intérieur, ont provoqué l’explosion de plusieurs commerces : une pizzeria, une agence d’assurances, ainsi qu’un local destiné à accueillir une nouvelle boulangerie. Le cœur du dossier. Jeudi 21 août, à 23 heures, l’audience de comparution immédiate débute enfin devant le tribunal correctionnel. À la barre, libre de ses mouvements, se tient justement un autre boulanger de la même avenue. Très vite désigné comme suspect, cet homme né en Corse a vu sa réputation ternie par la rumeur publique et le travail des enquêteurs. « Je suis innocent. C’est un dossier à charge. Je n’ai rien fait. Ce n’est pas moi ! », martèle le quadragénaire, défendu par Me Ludovic Serée de Roch.

Achat d’essence, offre refusée pour ce local…

Les investigations ont rapidement révélé plusieurs éléments troublants. Les enquêteurs ont rapidement analysé les images de vidéoprotection situées aux abords du site de l’explosion. La voiture du mis en cause y apparaît au moment des faits. Ce détail a conduit à un examen plus poussé de son emploi du temps. Or, peu avant l’incident, il s’était positionné pour racheter le local détruit, mais son offre n’avait pas été retenue, ce qu’il aurait très mal vécu. L’avocat de la défense rejette toute interprétation malveillante : « Il n’y a aucune preuve sérieuse. Mon client n’a pas peur de la concurrence. Il génère un chiffre d’affaires supérieur à un million d’euros. »

Un autre épisode vient alourdir le dossier. L’homme avait déjà été indirectement lié à un incident similaire impliquant un concurrent : une haie avait mystérieusement pris feu peu après une dispute entre les deux commerçants, courant 2024. Par ailleurs, les forces de l’ordre ont établi qu’il avait récemment acheté 15 litres d’essence. « C’est pour ma tondeuse », répond le prévenu, imperturbable. Il fournit des explications à chaque point, mais les éléments à charge s’accumulent.

Il sort de la salle pendant la plaidoirie de son avocat

Lors de son réquisitoire, le procureur de la République l’accable. L’ensemble du dossier le désigne, mais l’intéressé persiste à nier et refuse toute responsabilité. Cinq ans de prison, dont un avec sursis, sont requis. Le mandat de dépôt est demandé.

Visiblement nerveux, le prévenu profite d’un moment d’inattention pour quitter discrètement la salle d’audience. Il s’éloigne, téléphone à l’oreille, et franchit calmement le portique de sécurité. Depuis, plus personne ne l’a revu. Selon les premières informations recueillies par la justice, il aurait pris la route du Maroc. Les autorités locales pourraient rapidement l’interpeller pour l’obliger à purger sa peine. « En attendant, j’ai décidé de faire appel de cette décision disproportionnée », déclare Me Serée de Roch. L’attitude de son client ne lui facilitera sans doute pas la tâche lors de ce nouveau procès.