Il est arrivé comme enfermé dans sa propre ombre. Tête baissée, regard fuyant, dos voûté, M. Said, 22 ans, était loin de pavoiser en entrant dans le box. Le Marseillais s’était fait surprendre en train de livrer la maison d’arrêt de Luynes par drone, à 4 heures du matin. Un comportement qui n’a pas manqué d’agacer la présidente du tribunal. « Ce n’est pas Uber Eats, ce ne sont pas des pizzas que vous livrez là… C’est plutôt Uber Shit à la limite », a-t-elle lancé, mi-ironique, mi-indignée.
Le jeune homme a reconnu les faits sans difficulté et a expliqué la manière dont il s’est fait démarcher : « Je fais des clips de musique en utilisant des drones. Ils ont vu ça et m’ont ajouté sur Snapchat pour me demander si c’était moi qui le pilotais. J’ai été emporté par l’appât du gain. » La magistrate a enchaîné immédiatement : « Argent facile, argent débile… » Le livreur d’un soir ne sera de toute façon pas payé : le colis est tombé dans la cour de la maison d’arrêt avant d’atteindre sa destination. « Ce n’est pas un méchant. Il avait tellement peur qu’il n’a pas réussi à manier le drone correctement », explique Guillaume Danays, l’avocat de la défense. Le prévenu complète « J’ai commencé à regretter une fois sur place. »
Des justifications qui n’ont pas vraiment convaincu le ministère public. Jugeant l’affaire d’une « simplicité biblique », le procureur n’a pas hésité à faire la morale au jeune homme : « C’est chaque semaine que l’on traite ce genre de cas. Il y a une jurisprudence. Vous êtes nombreux à tenter et vous êtes nombreux à repartir avec un an ferme. Vous avez de grandes chances de retourner à Luynes pour un petit moment. » Une menace mise à exécution. Bien que le prévenu n’ait pas écopé d’un an ferme – faute de certitude sur le contenu du colis – il passera tout de même six mois en prison.