Du haut de ses 33 ans, Sara Ami vient tout juste de recevoir le titre de Portraitiste de France, décerné par la Fédération française de la photographie et des métiers de l’image (FFPMI). Le diplôme dans les mains, déjà délicatement griffonné par l’un de ses enfants, elle n’en est pas peu fière. Un vrai gage de reconnaissance délivré par ses pairs, pour celle qui tire des portraits au gré des demandes depuis maintenant plus de 10 ans.
Lorguaise depuis des générations, la jeune femme est rapidement attirée par l’art de la photographie. « Quand je me suis lancée, je voyais ça comme quelque chose de facile. Je me disais : “Il suffit d’avoir un bon appareil et de… cliquer…“ » Oui mais voilà, ce n’est évidemment pas si simple. C’était sans compter sur « l’œil du photographe », la maîtrise de la technique, la créativité, la recherche de la bonne lumière et de l’émotion… Autant de fondamentaux qui s’apprennent, s’apprivoisent, se cultivent pas à pas, dans la passion.
« J’étais attirée par l’esthétisme. Animée par l’idée de créer quelque chose de beau avec mon œil, avec ce que j’ai en moi. Je voulais montrer ce que l’on ne voit pas si on ne s’y attarde pas », poursuit-elle. Alors Sara se donne les moyens d’arriver à ses fins.
Sans pour autant faire de grandes écoles spécialisées, elle se forme sur le tas. « J’ai tout simplement débuté avec des tutos sur les plateformes en ligne. » En potassant des livres, aussi. Parallèlement, elle crée sa structure en auto-entreprenariat. Se forme à la gestion d’entreprise, au « storytelling », à la communication, au marketing: « Je savais que si je voulais faire de la photo mon métier, il fallait que j’aille plus loin… » Avant de franchir le pas et de se lancer corps et âme en autodidacte.
« Je me suis mise à faire des photos de modèles, des portraits. Je voulais valoriser les gens par l’image, avec leurs personnalités propres. » Au départ, elle use de différents artifices et autres poncifs autour de la beauté et de la mode: « Maquillage, femme mince élancée, un peu dénudée, ce genre de clichés par exemple. »
De fil en aiguille, le bouche-à-oreille fonctionne. L’usage des réseaux sociaux aussi. Sara se fait un petit nom. Même si ce n’est pas toujours simple, la photographe en herbe avance. Et se cherche. « Il y a eu des jours avec, d’autres sans. Des remises en question, l’envie de faire plus et mieux. » Une recherche d’équilibre, en somme. Puis arrive un tournant. Et pas des moindres: la naissance de son premier enfant.
Le déclic de l’authenticité
Un nouveau cap à plus d’un titre pour la jeune maman. Un déclic aussi, sans doute. « En photographiant mon bébé, en le faisant poser, en le mettant trop en scène, j’ai su ce que je ne voulais plus faire. » Dès lors débutera une véritable quête d’authenticité dans ses clichés. Du naturel, rien que du naturel. Sans trop de chichis. Une forme de simplicité, pas si simple à mettre en œuvre.
« J’ai toujours eu cette fibre-là en moi. Mes racines sont ancrées dans le milieu rural. La connexion à la nature, aux autres, fait partie de mes valeurs. Je pense aussi que la naissance de mon enfant m’a permis de me reconnecter à mes instincts. Sans parler du fait que la photographie m’a aidé à évoluer. » Pour Sara, « les photos, ce sont des ancrages. » Des instantanés qui marquent un moment, une période de vie, un passage. « Ce sont des repères. À travers elles, on se voit grandir. »
La quête d’authenticité commence par la lumière. « J’ai créé un studio uniquement en lumière naturelle, dans un cadre épuré, pour y réaliser des photos de familles, de nouveau-nés… » Pour saisir l’instant « magique », celui qui fait tout, Sara utilise des « invitations ». Elle suggère des gestes, des positions, des prestances, « pour décrisper les gens ».
« Par exemple, j’aime bien leur dire: ‘’ trois, tu fais la machine à laver…!’’ », sourit-elle. De quoi forcément créer des situations cocasses. « Il y a toujours besoin de recentrer, replacer le modèle, pour capter la bonne lumière. Mais parfois, il faut aussi guider, inviter, donner des indications. Pour capter le naturel. »
Après la période Covid, le studio est abandonné. Sara change de braquet pour se concentrer sur des prises de vues extérieures ou à domicile.
Des photos avec du sens
Le travail de l’artiste débute avec les autres. « Ceux qui viennent me voir et me disent: “J’ai envie d’une jolie photo ». Il faut qu’il y ait une envie de… » Ça, c’est la base. Reste à définir ensuite cette « envie ». Et à comprendre celui ou celle qui en fait la demande. « J’invite les personnes à rentrer dans une expérience. Je leur communique un guide de préparation à la séance, pour leur expliquer notamment de ne pas trop en faire, de rester naturel. Je leur pose des questions et leur fais remplir un questionnaire de personnalisation. »
Objectif: coller au caractère, à l’identité du modèle. Pour que la photo ait du sens, une âme. Parce que derrière le portrait, il y a un être humain, avec une histoire. L’image doit raconter quelque chose. « Êtes-vous plutôt mer ou montagne? Comment décririez-vous votre famille en quelques mots ? Comment avez-vous rencontré votre conjoint? » Autant de questions qui animeront la photo. « Dans l’échange, en créant des émotions fortes, des souvenirs, l’impact de la photo et la force de l’expérience seront décuplés. »
Des échanges, une passion, et un travail créatif qui payent donc. Désormais Portraitiste de France grâce à douze clichés réalisés sur des thèmes imposés – tous décortiqués par un jury en fonction de différents critères (lumière, créativité, gestuelle…) –, elle s’est distinguée dans son approche « lifestyle ». Ce qu’elle qualifie de « reportage de vie ». Cette alchimie naturelle, authentique, à contre-courant des standards académiques. « Un style très peu représenté dans ce type de concours, assure-t-elle. Ce qui rend cette reconnaissance d’autant plus importante pour moi. »
Contact : www.saraami.fr Instagram: @sara.ami.photographe