Le plan de relance du nouveau propriétaire Rivolier suit ce qui a été annoncé au moment de la reprise de Verney-Carron il y a trois mois. Ce que confirment à If Saint-Etienne les représentants du personnel. L’emblématique PME stéphanoise a cependant encore du pain sur la planche avant d’être enfin apte à un développement de ses activités et aller de l’avant… C’est ce que l’on peut retenir de la visite, jeudi, de Marc Ferracci,ministre chargé de l’Industrie et de l’Énergie.

Alexandre Van Robais, DG de Riviolier au 1er plan, Marc Ferracci, ministre chargé de l’Industrie (3e en partant de la gauche) face à Guillaume Verney-Carron, directeur du pôle chasse. ©If Média / Xavier Alix

Opération « rebonds » / valorisation. C’était – manifestement – l’objet de la venue surprise, annoncée en début de semaine dernière aux services préfectoraux de la Loire, de Marc Ferracci, ministre chargé de l’Industrie et de l’Énergie jeudi 28 août. Ce que reflétaient ses propos – la fameuse séance du « micro-tendu » – adressés à la presse locale à l’issue de sa visite à Saint-Etienne chez Verney-Carron. Quelques heures plus tôt, c’est à l’autre bout du département, chez Setic Pourtier, à Roanne, que ce proche d’Emmanuel Macron était présent. Dans le champ du rebond spectaculaire d’une PME industrielle française, l’exemple du leadeur mondial des machines tournantes pour l’industrie du câble d’énergie et de communication est difficilement égalable.

Une belle histoire qui lui a valu le prix Ulysse 2025 décerné par l’ARE et de se retrouver avec, non seulement plus d’activités évidemment mais aussi, plus d’employés que lorsque cette PME industrielle de pointe avait vu une tempête se pencher sur elle… Nous en avions parlé dans cet article. C’est donc tout un « mal » identique que l’on peut souhaiter à Verney-Carron, à la suite de sa reprise par son principal donneur d’ordres, entreprise ligérienne comme elle, Rivolier. Reprise officialisée début juin par le Tribunal de commerce de Saint-Etienne, après sa plus que décevante appartenance à Cybergun 3 ans durant. Principale préoccupation du personnel comme du repreneur cet été : parvenir à honorer, avant le début de saison, le carnet de commandes du segment chasse – son activité la plus importante -, paradoxalement loin d’être en déshérence malgré la procédure de redressement puis de cession.

800 000 € investis à ce stade

Une grande partie des livraisons et en amont de la fabrication était bloquée par une situation végétative niveau production depuis décembre, avant même que Cybergun ne sollicite une procédure auprès du tribunal de commerce. Des factures de fournisseurs notamment se devaient d’être honorées (et, a fortiori des nouvelles commandes) pour redémarrer. Une bonne partie des 2 M€ promis à l’injection devant la barre du Tribunal par Rivolier au printemps dernier. A ce stade, glisse au ministre Alexandre Van Robais, directeur général de Rivolier, 800 000 € sur les 1,6 M€ de cette première phase d’investissement ont été utilisés, les 400 000 € devant servir, plus tard, à des nouveaux équipements industriels dans le cadre du développement des débouchés de l’entreprise.

La nouvelle usine ? Toutes les options sont encore possibles.

Alexandre Van Robais, directeur général de Rivolier

Aussi, « nous sommes dans les temps vis-à-vis de nos plans, nous assure Alexandre Van Robais après le départ de Marc Ferracci. Nous sommes parvenus globalement à rattraper les livraisons à temps pour l’ouverture de la saison de chasse. C’est une étape d’un long cheminement. Il y en aura d’autres. La nouvelle usine ? Toutes les options sont possibles entre un déménagement (dans un « large » bassin stéphanois mais qui pourrait être aussi hors des limites de Saint-Etienne Métropole, Ndlr), ou même rester ici (dans les 6 500 m2 historique du boulevard Thiers à Saint-Etienne, Ndlr). Cela dépendra de l’avancée de ce que nous souhaitons développer à l’avenir. » Même si la participation à 35 % du fabricant d’armes tchèque RSBC, aux côtés de Rivolier, doit permettre de muscler R&D, voire transférer le savoir-faire de productions (les culasses de pistolet de police par exemple), pas évident lorsqu’il s’agit du segment sécurité et, encore plus, celui de la Défense, de pronostiquer à coup sûr, qu’il y aura du « bon » à venir.

Côté Défense, le feu vert de la DGA se fait attendre

Pas d’euphorie donc : le langage reste très prudent. Les livraisons du lance grenades « Cobra » destinés aux CRS ont plus de mal à se concrétiser par exemple, sans que la commande ne soit pour autant en danger. Il faudra, à terme, c’est-à-dire d’ici 4 ans, en avoir fourni 4 000 exemplaires au ministère de l’Intérieur – client habituel pour les flashs balls et autres LBD – de ce modèle présenté comme de pointe, sans équivalents au monde. Verney-Carron en est à 800 livrés. Plus compliqué encore pour ce qui est de se (re) positionner sur le segment défense (gamme Lebel) et la production d’armes de « petits calibres », ces fusils d’assaut modernes destinés à équiper l’infanterie, créneau qui attend toujours de décoller. Et pour cause : le feu vert de la DGA (Direction générale de l’armement) qu’avait acquis depuis longtemps Verney-Carron, a été remis sur la table en raison du rachat…

La visite ministérielle a donné lieu à un accueil « républicain » d’élus ligériens, de collectivités ou parlementaires, pour certains – seulement ou non – prochains candidats : Quentin Bataillon, David Fara, Gaël Perdriau, Georges Ziegler Dino Cinieri, Pierre-Jean Rochette et Sylvie Bonnet. ©If Media / Xavier Alix

Procédure de sécurité nationale logique mais qui semble prendre un temps fou – déjà trois mois ! – au regard du contexte international, des discours d’encouragement au « réarmement » du pays, de l’urgence économique ou encore du fait que le repreneur est Français, déjà bien connu des autorités et même vendeur historique de premier plan, au préalable du rachat, des produits Verney-Carron… Sans se montrer râleur, Alexandre Van Robais en touche quelques mots au ministre de l’Industrie. Ce n’est pas son champ d’actions mais il ne manquera pas d’en toucher, à son tour, deux mots à la Défense, lui assure celui-ci dans cette petite pièce de réunion où se sont entassés dirigeants de la PME, élus, membres de la CCI, le ministre et son entourage ainsi que des représentants préfectoraux. Et aussi quelques journalistes, ceux n’ayant pas eu droit – bien qu’invités – à une porte brusquement fermée devant leur nez…      

« 55 sur 67… Ce n’est pas trop mal »

Marc Ferracci aura écouté attentivement la présentation de l’entreprise, du groupe Rivolier, ses champs de production, son plan de redressement, posant régulièrement des questions – « Qu’est-ce qui pèse le plus dans votre chiffre d’affaires ? » ; « Et, en moyenne, quelle est l’ancienneté des salariés ? » ; « Combien ont été repris ? 55 sur 67… Ce n’est pas trop mal » ; « L’attachement à la marque des clients, c’est historique ? » – avant d’effectuer un parcours cheminant au milieu des postes de travail à la rencontre des employés et de leur production. Contacté ce lundi par If, un de leur représentant syndical CGT (seul syndicat représenté), Rémi Daffaut, confirme que le plan annoncé en juin – qui a toutefois, il faut le rappeler amener au licenciement de 12 personnes susceptibles d’être reprises en priorité si les ambitions de développement se concrétisent – se déroule bien comme espéré à ce stade :    

Ce que nous constatons depuis juin est positif, cohérent.

Rémi Daffaut, représentant CGT

« Globalement, ce que nous constatons depuis juin est positif, cohérent. Ça va dans le bon sens en ayant bien commencé par là où il fallait, dans le bon ordre. Dans un second temps, nous estimons qu’il conviendra de réfléchir à la cohérence aussi de nos gammes : c’est comme dans un restaurant, quand il y a de trop de plats à la carte… Et l’outil industriel pour aller de l’avant a besoin de sérieux investissements. Reste que nous avons à l’évidence des gens de terrain, qui connaissent ce métier. C’est infiniment mieux qu’un investisseur imaginaire ou un armurier malgré lui… » Depuis chez Verney-Carron, il n’y a pas toujours que les balles qui sifflent.