Par

Théo Zuili

Publié le

2 sept. 2025 à 18h01

Jeune trentenaire, Pierre Oliver termine son premier mandat de maire du 2ᵉ arrondissement. Élu en 2020, l’édile LR proche de Laurent Wauquiez s’est rapidement imposé comme l’une des figures de la droite lyonnaise et de l’opposition à Grégory Doucet, maire écologiste de Lyon.
Fils d’expatriés, il a grandi plus de dix ans en Roumanie et passé son bac au Caire. Arrivé en France en 2010, il adhère à l’UMP « dès le lendemain » et obtient une licence de droit et un master en gestion des collectivités. Il devient conseiller régional en 2021 et collaborateur de Nicolas d’Aragon, éphémère ministre délégué à la Sécurité du quotidien.
Encore candidat à la mairie de Lyon pour les élections municipales malgré les signaux d’une potentielle alliance dans un futur proche derrière Jean-Michel Aulas, Pierre Oliver candidate également à sa succession à la mairie du 2ᵉ arrondissement.
Il répond aux questions d’actu Lyon.

Sans-abrisme en explosion, quelles solutions ?

Actu : En 2020, vous étiez le plus jeune maire de l’agglomération. Qu’est-ce qui a changé chez vous depuis ?

Pierre Oliver : Je n’ai encore que 33 ans, ce qui reste très jeune pour un élu. On apprend beaucoup au cours d’un mandat comme celui-là. On a l’occasion de croiser des gens qui ont d’immenses difficultés financières et ça permet de mesurer l’énergie qu’on doit déployer pour aider ces personnes.

J’ai tenu à recevoir individuellement tous les demandeurs (près de 300 par an, ndlr) de logements sociaux sur l’arrondissement. C’est quelque chose qui m’a beaucoup touché au long de ce mandat. Quand on n’est pas maire, à moins qu’on travaille dans des associations, on ne connaît pas ces réalités.

Le 2ᵉ arrondissement est justement touché par la problématique du sans-abrisme et les chiffres montrent une explosion du phénomène. Avez-vous des solutions à ce sujet ?

PO : Il est clair qu’il faudrait construire plus de logements. C’est une des grandes difficultés du mandat Doucet/Bernard : le logement était en crise à cause d’eux sur les trois premières années, et à cause du contexte international pendant les trois suivantes. On a eu une situation dramatique du logement pendant six ans, ce qui a fait augmenter le sans-abrisme.

La deuxième raison n’appartient pas aux élus lyonnais, c’est la crise migratoire. L’une des solutions, c’est d’arrêter de recevoir tout le monde en France, car nous ne sommes pas capables de les intégrer.

Six ans d’opposition, quel bilan ?

Quel regard portez-vous sur votre mandat ?

PO : Mon combat a été d’aller taper à toutes les portes pour obtenir un maximum de financements pour pouvoir porter un maximum de sujets pour Lyon. J’ai obtenu la réhabilitation du commissariat de la rue de la Charité suite à un rendez-vous avec Gérald Darmanin, la réhabilitation intégrale du lycée Juliette Récamier, où j’ai obtenu 35 millions d’euros de Laurent Wauquiez, pour un million d’euros j’ai obtenu aussi la réhabilitation de l’orgue de l’église Saint-Nizier…

Grégory Doucet, lui, nous l’a particulièrement montré sur ce mandat : il n’a aucun réseau. De fait, c’est plus difficile pour lui d’obtenir des financements.

Depuis 2020, quelle a été votre réelle marge de manœuvre en tant que maire d’arrondissement ? Avez-vous eu les moyens d’imposer des projets ou d’en empêcher l’application ?

PO : C’est partagé. On a obtenu gain de cause contre la fermeture de la rue Sala ou contre le téléphérique, mais on s’est opposés sans succès à l’installation de l’œuvre place Bellecour ou à la Zone à trafic limité. On a toujours essayé de défendre l’intérêt des habitants du 2ᵉ.

On s’est roulés par terre pendant six ans pour obtenir des caméras, et sur les dix obtenues, il y en a deux pour surveiller l’œuvre d’art de la place Bellecour… En 2026, si on reprend le pouvoir, on sait déjà là où on pourra s’améliorer.

L'entrée de la ZTL rue de la République à Lyon.
L’entrée de la ZTL rue de la République à Lyon. (©Nicolas Zaugra/ actu Lyon)

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Est-ce que vous êtes aussi force de proposition ? Avez-vous pu mener à bien votre vision pour le 2ᵉ arrondissement ?

PO : J’ai un exemple qui a été très long, je le dis humblement : c’est la cour de l’école Lamartine, place des Jacobins. On avait eu des enfants qui avaient réussi à s’échapper, car les grillages n’étaient pas adaptés… On avait une cour minuscule… ça a été un combat, car on les a relancés tous les mois pendant trois ans pour obtenir cette réalisation. Si nous n’avions pas été là, ça n’aurait jamais eu lieu.

On ne gagne pas sur tout, mais on a des avancées. Ça dépend souvent du pragmatisme des élus qu’on avait en face de tous : c’était bien plus simple de discuter avec des élus PS que des élus écolos, souvent très bornés, qui avaient des difficultés à concevoir qu’un projet vienne d’un autre bord politique.

Crise commerciale en Presqu’île : un avis tranché

Rue Victor-Hugo, la politique de préemption des commerces mise en place par les écologistes est-elle satisfaisante ?

PO : Il n’y a pas eu de préemption, seulement deux locaux préemptés sur le mandat, à la Guillotière. Avec un grand succès, il faut le reconnaître, ça a tout changé à la Guillotière (il ironise, ndlr). Là-dessus, on est rentrés dans un faux débat. Comme pour la végétalisation de la place Bellecour, il faut arrêter de mentir aux gens. La réalité, c’est que la mairie de Lyon n’a absolument pas les capacités financières de devenir maître de la politique commerciale.

La rue Victor-Hugo a le problème de toutes les rues piétonnes : la logique, c’est d’avoir des fast-foods, des sandwicheries, des boutiques qu’on pourrait trouver dans tous les centres commerciaux de la planète. Mais on n’a pas de commerce indépendant et on en n’aura jamais. Même si on préemptait pour installer un commerce de quartier, il ne fonctionnerait pas. Les gens viennent du métro A, déambulent et consomment très peu. Le panier moyen est autour de 2€, ce n’est pas avec ça qu’on peut faire tourner des boutiques indépendantes ou de grandes marques.

Il faut un équilibre, c’est logique d’avoir des grands axes structurants piétons, mais c’est dans les petites rues autour qu’on trouve les commerces indépendants et les boutiques haut de gamme.

Pierre Oliver, maire LR du 2e arrondissement de Lyon et la ministre Aurore Bergé déambulant rue Victor Hugo, mercredi 23 juillet 2025.
Pierre Oliver, maire LR du 2e arrondissement de Lyon et la ministre Aurore Bergé déambulant rue Victor Hugo, mercredi 23 juillet 2025. (©Nicolas Zaugra/ actu Lyon)

Que proposez-vous pour redynamiser la Presqu’île ?

PO : Comment on évite que le centre-ville se transforme en zone uniquement tertiaire ou hôtelière ? Il faut permettre à toutes les personnes qui habitent l’ouest lyonnais de revenir en ville avec une politique de stationnement avantageuse.

Il faut arrêter de faire de la Presqu’île un bunker, car en réduisant toutes les voies, on empêche les gens de venir et le commerce meurt. Aujourd’hui, ce qui est terrible, c’est que les écologistes qui défendent prétendument les commerces de proximité ont été le plus grand tremplin à Amazon et au Village des marques. Une famille qui habite Écully aujourd’hui, un samedi midi, met moins de temps à aller à Villefontaine qu’à se garer en Presqu’île. Et là-bas, le parking est gratuit.

Il faut permettre aux familles de vivre en ville. D’abord, supprimer l’encadrement des loyers, qui part d’une bonne volonté, mais qui a eu l’effet pervers de faire déguerpir les investisseurs de Lyon. La moitié, voire les deux tiers des nouveaux logements construits sont achetés par des investisseurs, qui se sont tournés vers d’autres marchés, plombant la construction et la commercialisation des programmes.

Comment construire en ville et dans quelles proportions ?

PO : Il faut un Plan local d’urbanisme plus permissif en ville pour permettre de construire : les écologistes mènent une stratégie immobilière qui consiste à dire « nous, on ne construit pas, on sauve la planète » : à cause de ça, ce sont les banlieues et souvent les deuxièmes et troisièmes couronnes largement urbanisées qui continuent de voir leurs sols artificialisés. Si on densifie en ville autour des arrêts de métro et de tram, la stratégie de mobilité et de lutte contre le réchauffement climatique serait beaucoup plus pertinente. Et ça permettrait à de nombreuses familles de se loger.

Aujourd’hui, on construit entre 1 500 et 2 000 logements par an dans l’agglomération, l’objectif serait d’atteindre entre 7 000 et 8 000, comme pendant les quasi vingt années du mandat de Gérard Collomb.

Autoroute urbaine, piscine dans le Rhône, Perrache…

L’extrême droite, comme les écologistes, veut à terme démanteler la M6-M7, et vous ?

PO : Ils mentent. C’est impossible tant que personne ne voudra faire un contournement de Lyon. Il faut arrêter de prendre les gens pour des imbéciles. Jamais l’État ne laissera l’axe nord-sud coupé par des feux rouges ! Je pense que les seuls moyens de détourner la M6-M7, c’est soit un périphérique tel que l’anneau des Sciences, soit un contournement plus large qui dévie le trafic national du centre de Lyon.

La piscine dans la darse de Confluence est un projet qui a votre soutien ? Y a-t-il d’autres actions des écologistes que vous applaudissez comme celle-ci ?

PO : C’est une bonne nouvelle face à la pénurie. On le défendait avec la droite aux dernières élections municipales. J’avais été ravi à l’époque de partager aux écologistes nos travaux de recherche pour qu’on puisse aboutir à ce projet. Je pensais que ça allait aboutir sur ce mandat, mais ça s’est transformé en promesse électorale de Grégory Doucet.

Quand on est dans l’opposition, on a tendance à nous entendre sur les sujets qui ne vont pas. Mais j’ai un autre exemple : la réglementation des trottinettes. C’était l’anarchie en 2020. Il faudrait prendre exemple pour limiter aussi la vitesse des Vélo’v électriques sur les axes piétons.

Un bassin pour se baigner dans la Saône à Lyon sera aménagé à Confluence pour 2027 : le détail des annonces de la Ville et la Métropole.
Un bassin pour se baigner dans la Saône à Lyon sera aménagé à Confluence pour 2027. (©Théo Zuili / actu Lyon)

Sur le projet de réaménagement de la verrue de Perrache, qu’est-ce qui vous convainc et qu’est-ce qui vous inquiète ?

PO : C’est une très bonne chose, je suis globalement favorable, le centre d’échanges en avait grandement besoin. Je regrette juste qu’il y ait autant d’idéologie pour si peu de pragmatisme. On n’arrivera pas à avoir un vrai centre de logistique en centre-ville : cette zone de logistique urbaine vient prendre la place du stationnement à la gare. Dans leur logique, des vélos vont venir chercher la marchandise et la livrer en centre-ville : dans la vraie vie, ça n’existe pas. Ça a été la mode, mais c’est de la com’.

Au contraire, on aurait pu en faire un grand parking urbain qui permette à chacun ensuite d’utiliser les TCL ou la marche pour accéder aux commerces de la Presqu’île.

Un roi des réseaux sociaux, à quel prix ?

Vous êtes patron de l’opposition, vous apparaissez en vidéo, vous parlez aux jeunes et ça cartonne… C’est une stratégie qui vous rend visible, mais certains disent que ça frôle la caricature. Comment vous l’assumez ?

PO : J’ai voulu ouvrir l’actualité à une base plus large. Quand on voit qu’un jeune sur deux s’informe sur les réseaux sociaux, c’est important de pouvoir rendre l’information accessible à tous. Les audiences du conseil municipal sont ridicules comparées au prix de la diffusion. Il faut s’adapter aux codes et c’est ce que j’ai voulu faire en tant que président de l’opposition en pointant les inepties de la mairie écolo, et il faut reconnaître qu’ils nous ont donné de la matière.

La difficulté, c’est que quand on sort autant de contenu, il faut être extrêmement vigilant à tout ce qu’on raconte. Surtout qu’en face de nous, la mairie et la métropole ont des armées mexicaines de gens pour contrôler tout ce qu’on dit et qui vérifient tout.

Visualiser le contenu sur Instagram

Justement, on vous reprend plusieurs fois pour la diffusion d’informations sans vérification… assumez-vous cette stratégie ?

PO : Il faut être extrêmement vigilant à tout, et je vous l’accorde, c’est important. Sur les bancs qui gêneraient les secours rue de la République, les personnalités que j’ai contactées n’ont pas été en mesure de m’apporter la preuve que j’avais tort. J’ai hâte de recevoir la copie du rapport pour être sûr que je me sois trompé, et le cas échant, je serais le premier à dire que je me suis trompé.

Ça arrive à tout le monde. J’ai le souvenir du maire de Lyon qui s’était précipité pour annoncer qu’il allait végétaliser la place Bellecour, c’était malheureusement un grossier mensonge. On doit tous faire attention. J’ai eu l’occasion de moi-même me corriger : par exemple, sur le prix des billets des TCL, j’ai retiré l’infographie. Quand je me trompe, je suis le premier à faire le mea-culpa. C’est rare que les politiques assument leurs erreurs, mais c’est notre responsabilité. Il ne faut pas oublier que l’opposition n’a pas toutes les informations. Moi, j’ai un collaborateur, eux, ils ont 9 000 personnes chacun.

Oliver proche d’une alliance derrière Aulas

Quelle est aujourd’hui votre relation avec Laurent Wauquiez, vous accorde-t-il toujours son soutien ?

PO : Plus que jamais. J’inscris mon parcours dans celui de Laurent Wauquiez, c’est grâce à lui que je suis là aujourd’hui. Pour les municipales 2026, on est en train de réfléchir à la meilleure solution. On a ouvert des discussions avec Jean-Michel Aulas, l’une des personnalités qui s’est imposée ces derniers mois, ça avance très bien. La probabilité qu’on parte ensemble est plus forte qu’on parte divisés. 

Le chef de file de l'opposition à Grégory Doucet, Pierre Oliver (LR), annonce être tout proche de se ranger derrière la candidature de Jean-Michel Aulas lors des élections municipales de 2026 à Lyon.
Le chef de file de l’opposition à Grégory Doucet, Pierre Oliver (LR), annonce être tout proche de se ranger derrière la candidature de Jean-Michel Aulas lors des élections municipales de 2026 à Lyon. (©Montage actu Lyon / Nicolas Zaugra / Théo Zuili)

Vous avez pourtant été secoué par les équipes Aulas, avec du harcèlement sur la voie publique et les réseaux sociaux… leur stratégie a donc marché ?

PO : Le plus dur pour moi, ça a été les tacles de certains camarades LR. Certaines personnes de ma famille politique ont préféré s’attaquer à moi plutôt que défendre un esprit de clan. Je pense que c’est par opportunisme, il ne faut rien y voir de personnel.

La difficulté, c’est que j’en ai été affaibli dans la foulée lors des négociations. Mais quoi qu’il arrive à la fin, le seul objectif est que nous soyons tous unis. Demain, je serai ravi de travailler avec Gilles Gascon, Véronique Sarselli, Béatrice de Montille…

L’avantage, c’est qu’échanger avec Jean-Michel Aulas, c’est agréable : on partage un même socle d’idée, on a une vision globalement identique sur Lyon, ce qui facilite de rapprochement. Laurent Wauquiez a été au cœur des échanges.

Je ne veux pas passer ma vie dans l’opposition, je veux pouvoir agir concrètement au service de nos concitoyens. Je préfère largement être numéro 2 d’une équipe qui gagne que numéro 1 d’une équipe qui perd.

Quel message envoyez-vous aux électeurs qui hésitent entre le vote LR, le vote centriste ou RN ?

PO : C’est simple : aujourd’hui, le RN ne gagnera pas à Lyon, donc une voix pour le RN, c’est une voix pour Grégory Doucet. Plus le RN sera fort, plus il sera réélu dans un fauteuil. Aujourd’hui, le RN est le meilleur allié de Grégory Doucet dans les élections municipales, c’est une évidence.

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