Par
Thomas Rideau
Publié le
3 sept. 2025 à 7h16
Une triste « affaire classique » mais ultra-violente que l’on retrouve presque tous les jours dans les tribunaux. Un homme de 28 ans, était poursuivi, ce lundi 1er septembre 2025, pour avoir battu sa conjointe à plusieurs reprises entre le mois de février et mars de cette année, dans l’agglo de Rouen (Seine-Maritime). Un calvaire qui a pris fin après plusieurs appels au secours de la victime, âgée de seulement 20 ans.
Des violences à répétition
Les violences ont commencé en 2024. Les premiers coups. Puis, Rayan* a été envoyé en prison avant de ressortir avec un bracelet électronique. Quelques semaines plus tard, en février 2025, le revoilà chez Anna*. Où les violences vont très vite reprendre.
Et cette audience au tribunal correctionnel de Rouen n’aurait pas eu lieu sans la présence d’esprit de la jeune victime d’appeler la police dans la nuit du 24 mars 2025. L’homme, dehors, tente d’entrer par la force chez elle. Il fracasse les volets de la chambre d’Anna, mais aussi ceux de son fils. Les forces de l’ordre débarquent chez la jeune femme, mais Rayan a disparu. En pleurs, Anna assure qu’« il va revenir ».
En effet, deux heures plus tard, le voilà de retour à mettre des coups de poing sur les fenêtres du domicile. De nouveau, les policiers sont appelés, mais sans plus de succès. Le lendemain, Anna va au commissariat porter plainte. Les autorités découvrent alors le calvaire de la jeune femme, dont le corps est couvert de blessures et autres hématomes.
Il disparaît de Rouen
Alors qu’il est recherché par la police, Rayan va disparaître de Rouen. Et tenter, affirme-t-il, de se refaire une vie en région parisienne et plus précisément à Bondy. C’est là qu’il est contrôlé par la police qui découvre qu’il fait l’objet d’une fiche. Il est arrêté (après un épisode de violence entre lui et les policiers pour lequel Rayan est poursuivi ; lui, a déposé plainte contre l’un des policiers).
« On s’est embrouillé », lance-t-il au président pour expliquer sa relation avec Anna. « Jamais, moi, j’ai tapé volontairement », explique-t-il en insistant sur le fait que c’était à cause des « crises » de sa conjointe qu’il était obligé d’en venir aux mains. Une tentative de défense qui ne va pas convaincre le tribunal.
« Mais pourquoi vous la frappez si vous l’aimez ? »
« Je ne l’ai pas étranglée, je n’ai pas mis de coups de poing », se défend-il. Plus tard, il parle plutôt de « plaquage au sol » et de « gifles », il évoque également un coup de pied. Et de tenter d’affirmer qu’il était « amoureux d’elle ». « Mais pourquoi vous la frappez si vous l’aimez ? », lui demande le président. « C’était une relation toxique, j’aurais dû rester chez mes parents. »
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En tout, Anna, pour le dernier épisode de violence, a reçu une ITT (interruption temporaire de travail) de six jours. Et de nombreuses photographies versées au dossier montrent les traces de coups sur son corps, mais aussi des blessures au niveau du cou.
« Je ne voulais pas porter plainte », rappelle Anna devant le tribunal. « Il avait une emprise sur moi. » Et d’évoquer une matinée durant laquelle elle a été « rouée de coups, je ne pouvais pas me débattre, les voisins sont intervenus », est-elle parvenue à raconter avant de s’effondrer en larme quand le prévenu a insisté en parlant de sa relation avec un autre homme et de « crises ».
« C’est elle qui est trop violente ? »
« Tous ces actes découleraient du comportement de ma cliente ? », a lancé, outrée, le conseil d’Anna. « C’est elle qui est trop violente ? Ce n’est pas une victime parfaite, c’est une victime qui dit la vérité et de se voir entendre aujourd’hui que ça serait sa faute si elle a été frappée, c’est un peu difficile. » Surtout, l’avocate a souligné que le prévenu ne semblait pas se remettre en question.
Un argument repris au bond par le procureur qui a rappelé que seulement 15 % des victimes de violences conjugales osent porter plainte. « L’attitude du mis en cause est inquiétante : il rejette tout sur la victime. […] C’est elle qui est hystérique ? Donc, il faut la calmer ! Elle a des blessures ? C’est qu’elle marque ! C’est toujours la faute de la victime. »
Il demande 12 mois d’emprisonnement avec maintien en détention.
Du côté du conseil de Rayan, on regrette que « la voix de la défense porte peu dans ce genre de dossier ». Et de rappeler qu’Anna pouvait faire des « crises » et que c’est Rayan qui a mis fin à la relation en quittant Rouen. Et que parfois, « oui, il la maintient au sol pour qu’elle se calme ».
Violences conjugales en France
Tous les trois jours en moyenne une femme meurt, victime de violences conjugales. Il est conseillé à toute femme victime de violences de se manifester auprès de son médecin, d’une association ou des services de police. Deux numéros peuvent être composés pour recevoir écoute, conseils et informations : le 39 19. En cas d’urgence, il est conseillé d’appeler le 17, le 112 ou d’envoyer un SMS au 114.
Le président restera insensible aux arguments de la défense et prononcera une peine de 10 mois de prison avec maintien en détention (à laquelle se rajouteront trois mois de prison dans le cadre d’une autre affaire). « Votre personnalité ne permet pas l’aménagement avec un bracelet électronique. » Et au moment où le tribunal lui indique qu’il ne doit plus entrer en communication avec Anna pendant trois ans, celui-ci répond au président en faisant simplement un signe de pouce vers le haut.
*Tous les prénoms ont été modifiés
**Cette peine est susceptible d’appel. Tout justiciable demeure présumé innocent tant que toutes les voies de recours n’ont pas été épuisées
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