Trois frères âgés de 25 à 31 ans étaient jugés ce mardi 2 septembre à Grenoble pour avoir violemment agressé un lycéen à Échirolles le 17 avril 2025. Deux d’entre eux nient leur présence sur les lieux. Le parquet requiert de la prison ferme. Le jugement sera rendu dans une semaine.

C’était une scène de violence dont les témoins se souviendront sûrement longtemps. Le 17 avril 2025 à Échirolles, un lycéen de 17 ans attendu à la sortie de son établissement avait été pris à partie par trois hommes, dont deux cagoulés, et frappé de 11 coups de couteau dont un, perforant, au thorax. Une victime qui s’en est finalement bien sortie physiquement mais qui reste marquée psychologiquement selon son avocat. Deux mois après, trois hommes d’une même famille avaient été interpellés dont deux placés en détention provisoire et le troisième sous contrôle judiciaire. Les trois agresseurs présumés, des frères âgés de 25, 28 et 31 ans comparaissaient ce mardi 2 septembre au Palais de Justice de Grenoble. Le parquet a requis quatre ans de prison assortis d’un an de sursis pour les deux plus âgés et quatre ans assortis de trois ans de sursis pour le plus jeune, qui est le seul à reconnaître avoir été présent sur place, confondu par la vidéosurveillance.

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Outre les explications avancées uniquement face aux preuves et a minima, le manque de réponses est ce qui a globalement caractérisé les 5 heures d’audiences au tribunal, pour tenter de faire la lumière sur une scène qui aura pris en tout et pour tout une dizaine de secondes. Ce 17 avril peu avant midi, si le plus jeune des prévenus, étudiant en école de commerce, se présente devant le lycée Marie Curie c’est, dit-il, pour prendre en charge et « sécuriser » la sortie d’un petit frère, élève dans l’établissement et lui-même agressé quelques jours auparavant. Par qui et pourquoi ? Pas de réponse. Pourquoi retrouve-t-il sur place « sans savoir qu’il y était », son père avec lequel il avait eu un contact téléphonique quelques minutes auparavant ? Un père armé d’une matraque dont le fils va s’emparer parce que « ça n’avait rien à faire dans ses mains », alors qu’arrivent par ailleurs deux hommes cagoulés. Et pourquoi enfin il va frapper la victime puis écarter les lycéens qui tentent d’intervenir ? « J’ai eu une absence », « une déconnection », dit-il pour des actes qu’il regrette mais n’explique pas.

D’autres qui étaient, « peut-être dans le secteur » mais pas sur le lieu même de l’agression

Quant aux deux hommes cagoulés qu’il se dit incapable d’identifier, mystère. Partant d’un témoignage de lycéen sur un différend possible entre la victime et le jeune frère, les enquêteurs eux vont recouper témoignages, détails de vidéosurveillance et « bornages » téléphoniques pour aboutir aux deux frères plus âgés. Deux hommes qui se présentent à l’audience comme d’honnêtes travailleurs, dans le transport et la restauration rapide, bien élevés et loin d’une telle violence dont ils seraient « bien incapables ». Ce jour-là les coups de fil au père et entre frères se sont multipliés, « mais on s’appelle souvent ». Les « bornages » de téléphone portables ont convergés vers le lycée Marie Curie avant de s’éteindre pendant l’agression mais « le domicile familial est à côté », il y a « des habitudes dans le coin » et pour la coupure « je ne sais pas, je n’avais peut-être plus de batterie ». Une voiture des protagonistes sera reconnue comme un véhicule loué par un des deux frères mais là encore c’est « parce que je passais peut-être dans le secteur à ce moment-là ». Un pantalon entaillé et un couteau de cuisine seront retrouvés dans les affaires de l’autre mais sans explication pour le vêtement et pour raison professionnelle en ce qui concerne le couteau. Un « outil de travail » sans trace de sang, contrairement au chiffon dans lequel il a été emballé mais ces traces s’avèreront inexploitables en police scientifique.

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Et c’est une absence que la défense n’a pas manqué de soulever. Parmi d’autres. Elle qui estime qu’on n’a pas cherché plus loin des explications à cette agression et que les frères sont surtout victimes de quelques accrocs passés, dont quelques condamnations pour « violence », qui figurent à leur casier judiciaire mais que rien ne prouve leur participation active aux faits. Sauf évidemment pour le plus jeune qui avoue « des regrets » et présente « des excuses » à une victime, dont il participé involontairement au « mal être ». Sans préméditation aucune. Car d’ailleurs après l’agression du cadet les parents « ont porté plainte contre X » souligne la défense. Preuve « qu’ils n’ont aucun idée de qui a agressé leur fils » et donc qu’ils ne pouvaient pas fomenter une vengeance quelques jours après. CQFD. Le père présent ce jour-là à la porte du lycée a lui été écarté de la procédure, en raison d’une insuffisance d’éléments selon le parquet mais « il ne se souvient de rien et ne reconnait personne » selon les magistrats. Sauf qu’au final, souligne également la défense, la victime – qualifiée de « bon élève » et « sans histoire » par ses enseignants – n’a elle-même jamais reconnue avoir un quelconque différend avec le jeune frère des prévenus. La justice devra passer au milieu des silences et des oublis.