L’affaire fait grand bruit en Allemagne. Six candidats du parti d’extrême droite AfD, qui se présentaient aux municipales du 14 septembre en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le Land le plus peuplé du pays, sont décédés ces dernières semaines. « Autant de morts, c’est impossible du point de vue statistique ! », a posté sur X (ex-Twitter) la codirigeante du parti, Alice Weidel. Le post de Weidel a aussitôt été relayé par le propriétaire du réseau social, Elon Musk, qui avait appelé à voter pour l’AfD en amont des législatives de février dernier.
Selon la police, qui a enquêté par routine sur une partie des cas ― comme le veut la loi lorsque la mort survient en dehors du milieu médical ― aucun de ces décès ne serait suspect. Cinq des candidats sont décédés « de mort naturelle » et le sixième s’est suicidé. Plusieurs souffraient de maladies chroniques, notamment des problèmes rénaux.
« Nous déplorons aussi six cas de décès dans d’autres formations politiques, notamment le Parti de défense des animaux, des Électeurs libres, le Parti libéral et les Verts, souligne le porte-parole de la direction régionale chargée de l’organisation des élections. De tels décès se produisent à chaque élection, indépendamment des partis. »
« Une aubaine pour les gens de l’AfD et ses théoriciens du complot »
Même les démentis du vice-chef de l’AfD en Rhénanie, Kay Gottschalk, ne sont pas parvenus à calmer la Toile, qui spécule sur les « politiciens assassinés » de l’extrême droite.
« Pour l’instant, rien ne permet de supposer qu’il ne s’agit pas d’un hasard. Mais nous allons tout de même examiner tous ces cas de près », assure Kay Gottschalk, entretenant un certain flou destiné à brosser son électorat ― qui s’informe principalement sur Internet, par défiance des médias traditionnels ― dans le sens du poil.
« On suggère ici que quelque chose ne tourne pas rond, s’indigne de son côté le quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine Zeitung dans un commentaire. C’est une aubaine pour les gens de l’AfD et ses théoriciens du complot. »
De fait, les municipales de Rhénanie sont un test important pour le parti d’extrême droite, arrivé en seconde position derrière la CDU (conservateurs) aux législatives de février avec 20,1 % des voix, et aujourd’hui la première force d’opposition au Bundestag. Certains sondages le créditent de 26 % des intentions de vote au niveau national, cette fois devant le parti de Friedrich Merz.
Le parti d’extrême droite pourrait réaliser ses meilleurs résultats
« L’AfD a su se présenter en alternative aux Sociaux-démocrates pour résoudre les problèmes sociaux dans une région affectée par la désindustrialisation », explique le politologue Lothar Probst, de Brême. Selon l’institut de sondages Forsa, l’AfD, jusqu’ici surtout implantée à l’est du pays, pourrait réaliser une percée importante dans cet ancien bastion social-démocrate de l’ouest de l’Allemagne, et obtenir 14 % des voix, soit neuf points de plus qu’aux dernières municipales.
« On peut parler de migration vers l’ouest » du parti, souligne Manfred Güllner, le directeur de l’institut. Les élections municipales de Rhénanie ― 18 millions d’habitants ― sont le premier test électoral d’importance dans le pays, après l’arrivée au pouvoir de Merz au printemps. Le parti d’extrême droite pourrait réaliser ses meilleurs résultats dans un certain nombre d’anciens bastions industriels du SPD tels que Gelsenkirchen ou Duisburg.