Lancée en 2015 et à l’arrêt depuis 2022, la série Fauda (« Chaos » en arabe) créée, écrite et en partie incarnée par d’anciens membres de l’armée israélienne Tsahal, Lior Raz et Avi Issacharoff, a connu un succès international sur Netflix. Sa saison 5 (avec au casting, une recrue française, la comédienne et réalisatrice Mélanie Laurent), dont certains épisodes devaient être tournés à Marseille, est l’un des grands rendez-vous attendus en 2026 sur la plateforme à la lettre rouge. La série suit Doron Kavillio (Lior Raz), agent des forces spéciales israéliennes, dans sa traque des militants du Hamas et s’offre comme une peinture réaliste du conflit israélo-palestinien. La saison 5 réalisée par Omri Givon (Hostages), « intégrera au premier plan la tragédie du 7 octobre 2023 », a indiqué Netflix. Le contexte de guerre et la fiction sont en effet intimement liés : l’un des producteurs de la série, Matan Meir, qui s’était porté volontaire pour participer à une action armée à Gaza, a été tué le 11 novembre 2023. L’acteur et chanteur Idan Amedi, alias Sagi, a été gravement blessé.
Marseille intégrée au scénario
Le teaser dévoile qu’une partie de l’intrigue de la saison 5 se déroule à Marseille. « Le Nukhba (unité militaire d’élite du Hamas ndlr) est à Marseille », déclare un personnage sur une vue panoramique nocturne du Vieux Port. Coup de théâtre, le producteur de la série Yes Studios a officialisé début septembre sa décision de délocaliser à Budapest les scènes qui devaient être tournées dans la cité phocéenne, au motif que « la sécurité de ses équipes techniques et artistiques » n’était pas garantie selon la chaîne de télévision israélienne N12, relayée par le Jerusalem Post. La productrice Liat Benasuly Amit a relativisé cette motivation dans une interview accordée à BFMTV. Elle déclarait avoir « décidé de déplacer le lieu de tournage pour de nombreuses raisons autres que la sécurité, et nous avons déjà aimé tourner à Budapest par le passé ».
Courriel à la Mission cinéma
Contactée par La Provence, une source proche de la Mission cinéma Marseille a confirmé avoir été sollicitée par la production exécutive marseillaise HVH pour une demande de tournage de 9 jours envisagé au mois d’août. Celle-ci s’est ravisée quelques semaines plus tard. « J’ai le regret de vous informer que compte tenu de l’actualité en Israël et de la guerre avec l’Iran, nous sommes contraints d’annuler le tournage de la série Fauda à Marseille en août prochain, indiquait HVH dans un mail début juillet. En effet, nos clients ont arrêté le tournage en Israël et sont aujourd’hui aux abris et ne voyageront pas pour l’instant. De plus, plusieurs membres de l’équipe, réservistes de l’armée, sont au front… Par ailleurs, vu la situation avec Gaza, ils craignent de subir des protestations/manifestations sur le plateau à Marseille […] En tout cas, nous tenons à vous remercier pour vos autorisations et le temps que vous avez pu passer sur notre dossier. »
Des craintes de perturbations du tournage ont donc bien pesé dans la balance.
Flambée d’actes antisémites
« Cela m’afflige qu’une série israélienne soit contrainte de renoncer à tourner des épisodes à Marseille, a réagi Fabienne Bendayan, présidente du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Marseille. Malheureusement pour notre ville, cela laisse une trace indélébile d’une réputation sulfureuse qui se caractérise par un sentiment d’insécurité général. De toute évidence, la flambée des actes antisémites n’est pas étrangère à ce que la production a appelé ‘climat d’insécurité’. Le seul week-end du 30 et 31 août, on a dénombré quatre agressions antisémites. C’est triste et honteux pour Marseille. » Le 30 et 31 août, le Crif assure en effet relevé quatre agressions antisémites : une femme traitée de « sale Juive » à la sortie de la synagogue, un rabbin pris à partie, des affiches en mémoire d’Ilan Halimi arrachées, une agression physique accompagnée d’un « sale sioniste » par un individu hurlant « Free Palestine, fuck Israël » devant une synagogue… autant de signaux que l’organisme juge ne pas être des « incidents isolés mais les symptômes d’un climat délétère qui s’installe de façon alarmante ».