Dans la nuit du 19 au 20 mai dernier, l’école Airways Aviation (ex-Esma), près de l’aéroport de Montpellier, était la cible de l’incendie volontaire de treize de ses appareils stationnés à l’extérieur. Quatre ont été entièrement détruits. Pour la première fois, et alors que l’avenir de l’établissement est aujourd’hui en péril, le directeur du groupe prend la parole sur cet événement aux lourdes conséquences.
Treize appareils touchés, dont quatre entièrement détruits : l’incendie volontaire qu’a subi Airways Aviation (ex-Esma), au sein de la zone aéroportuaire de Montpellier, dans la nuit du 19 au 20 mai dernier, met aujourd’hui l’établissement en péril. Analyse d’un acte qu’il qualifie de « très bien organisé », contrats perdus et espoir de poursuivre l’activité : le directeur du groupe, Mauro Calvano, s’exprime pour la première fois depuis les faits.
Quel est votre sentiment quant à l’incendie qu’a subi Airways Aviation en mai dernier ?
Nous sommes victimes d’une injustice totale et nous nous sentons dans un environnement hostile, à Montpellier. Nous avons été victimes d’une attaque criminelle, sans précédent dans l’aviation civile. Quelqu’un est entré dans l’aéroport international de Montpellier pendant la nuit, a découpé la clôture au niveau de la voie rapide et a mis le feu à treize de nos avions stationnés à l’extérieur. Cette attaque visait à créer le maximum de dommages à notre société. Des dommages économiques, mais aussi sociaux, parmi nos salariés, ainsi que vis-à-vis de l’image de notre groupe implanté dans le monde entier. Par ailleurs, de fausses informations ont été diffusées. L’une d’elles prétendait qu’il s’agissait d’une fraude à l’assurance. Il est très facile de démontrer que ce n’est pas le cas. La principale raison est que l’assurance ne rembourse que la moitié de la valeur des avions, et que le prix de revente de ces appareils très demandés est beaucoup plus élevé.
« La vente d’un des avions détruits devait être signée le jour de l’incendie »
Quelles ont été les conséquences ?
Nous avons subi une rupture de contrat de la part d’un grand acteur international dans la vente de simulateurs. La compagnie Etihad Airways, qui devait commencer une formation chez nous en novembre prochain, a également annulé son contrat. Qatar Airways, avec qui nous avons déjà un contrat, ne souhaite pas le renouveler. Face à cela, j’ai attendu le soutien de toutes les institutions. La DGAC (Direction générale de l’aviation civile) et d’autres professionnels du monde de l’aviation nous ont adressé des messages. Le préfet nous a appelés le jour même, mais nous n’avons pas eu d’autre échange par la suite. En revanche, l’Aéroport de Montpellier ne nous a pas contactés. Pays de l’Or Agglomération, non plus. Nous avons des retards de loyers vis-à-vis d’eux, mais on se préparait à les payer quand nous avons subi cette attaque. Juste avant l’incendie de nos avions, nous devions vendre deux appareils, d’une valeur d’un demi-million d’euros chacun, ce qui nous aurait permis de régler ce retard de paiement. L’une des ventes devait être signée le jour même de l’incendie. De plus, celui-ci est survenu juste avant le Salon du Bourget, lors duquel le groupe signe beaucoup d’accords commerciaux. Est-ce une coïncidence ou pas ?
Quelle est la situation économique de la société ?
Moins d’un mois après l’incendie, nous sommes entrés en redressement judiciaire. Dernièrement, les choses se sont accélérées et ce vendredi 5 septembre, devant le tribunal de commerce, l’administrateur judiciaire demandera la liquidation. Pourtant, nous avons fait une présentation qui démontre que nous pouvons continuer notre activité. Mais les remboursements de l’assurance et les paiements des élèves sont bloqués à la Caisse des dépôts. Cela empêche la continuité opérationnelle de notre établissement, alors que nous avons 100 élèves environ et que la rentrée est prévue lundi prochain. Les cadets de la Marine nationale sont actuellement en formation chez nous. La Marine française nous a choisis car elle connaît notre réputation. Depuis l’incendie, nous avons réduit notre activité et puisé dans notre trésorerie, mais l’école n’a jamais fermé.
« On ne voit aucune autre raison à cet acte que celle de nous faire partir »
Émettez-vous une hypothèse quant à ou aux auteur(s) de cet acte ?
Je n’en ai aucune idée. Tout ce que je sais, c’est que c’était pour détruire la société, et que cet acte était très bien organisé. Le ou les auteurs savai (en) t très bien ce qu’il(s) faisai (en) t, en glissant dans les avions des cocktails Molotov exactement à la taille d’une petite ouverture qui peut être cassée très facilement. Cela a été fait de façon très professionnelle. On ne voit aucune autre raison à cet acte que celle de nous faire partir. Je veux savoir qui a mis le feu aux avions et que justice soit rendue. J’ai travaillé en tant que pilote et manager dans le monde entier. C’est un incident sans précédent sur un aéroport international. Nous n’avons aucune information sur les investigations (*). Nous avons demandé rendez-vous au préfet. La gendarmerie a ouvert une enquête pour “destruction en bande organisée par moyen dangereux pour les personnes”.
(*) Au lendemain des faits, le procureur de la République de Montpellier, Fabrice Bélargent, confirmait « le caractère volontaire de l’incendie » au moyen de « bouteilles en plastique contenant du liquide inflammable et détonant (nitrate) avec une mèche, déposées dans le cockpit d’une partie des avions. » L’enquête a été confiée à la section de recherches de la gendarmerie des transports.
L’Aéroport et l’Agglo Pays de l’Or réagissent
Interrogé sur l’incendie du 20 mai dernier sur le site d’Airways Aviation, l’Aéroport de Montpellier rappelle qu’en ce qui le concerne, sa zone d’exploitation commerciale fait l’objet d’une surveillance permanente, 24 heures sur 24, et est équipée d’une alarme anti-intrusion, « comme tous les aéroports ». Il ajoute que son protocole de sécurité fait l’objet d’une certification européenne soumise à des contrôles réguliers. Il précise en outre que l’incendie qui a visé Airways Aviation s’est produit en dehors des horaires d’exploitation commerciale, et à l’heure de la relève des pompiers de l’aéroport, qui ont pu ainsi engager un second véhicule, aux côtés des sapeurs-pompiers du Sdis 34.
De son côté, Stéphan Rossignol, le président de l’Agglomération du Pays de l’Or, indique que celle-ci « est en litige avec la société Airways Aviation pour le non-paiement récurrent de loyers et le non-respect de ses engagements. Les procédures juridiques sont en cours. »
Enfin, la préfecture confirme qu’Airways Aviation a sollicité, mardi 2 septembre, un rendez-vous avec le préfet.