Le boulet n’est pas passé loin. Le personnage principal du roman d’Hélène Frappat parle à un moment de «nos voisins les Français». La dictature imaginée par l’autrice se déroule donc ailleurs que dans l’Hexagone, dans un pays européen de fiction. Patronne du parti FEU, celle qui se prénomme Nerona et se fait aussi appeler «le Prince» y a établi une tyrannie. Hélène Frappat fait couler un fleuve de mots, ceux de la femme au pouvoir, ceux de ses communicants et surtout ceux de sa sœur, Sibylle, qui telle une Pythie des temps anciens tente d’alerter. Tout ça va mal se terminer. L’hymne néronesque a d’ailleurs des accents funestes : «Si tout finit dans le feu, brûlons ensemble ! /Regarde, regarde la nuit où montent les flammes !» Nerona, satire politique, a été conçue comme une sitcom fasciste et l’on navigue entre des références à l’Antiquité et des emprunts contemporains. La vie privée du «Prince» est volontiers exposée, sous contrôle de ses services. Voici ces «royals» au tempérament de feu : la grand-mère amatrice de piments trempés dans le café, la mère à qui on doit tout, la sœur à la langue bien pendue, la fillette indocile et le chien Choupinou. Il y a peu d’hommes en vue dans cette dictature qui recycle tout à son avantage, y compris le féminisme. Comme jadis Catherine de Médicis, Nerona gouverne éclairée par les conseils d’une astrologue et aussi spécialiste du tarot. Sa langue est brutale, ordurière. Exemple : «Green Deal, mon cul. Rien