S’il assure ne pas vouloir mener une « révolution », Michel-Eric Jacquin, nouveau président des Bordeaux et Bordeaux Supérieur, vient tout de même de jeter un sacré pavé dans une mare déjà bien agitée. En pleine crise économique, le patron du plus important syndicat viticole bordelais mise donc sur le passage des « simples » Bordeaux (rouge, blanc et rosé) au label IGP et envisage de renoncer ainsi à la classification AOC, jugée plus restrictive et contraignante. Objectif : accéder à un catalogue de cépages bien plus conséquent (une centaine disponibles contre une dizaine) et à une plus grande liberté de production et ainsi trouver de nouveaux débouchés commerciaux.
Double commission d’enquête
Cette mesure, que le nouveau président souhaite soumettre au vote de tous les adhérents, ne se fera pas en un claquement de doigts. Préalable incontournable : elle devra « faire consensus au-delà de la majorité » au sein de l’organisme de défense et de gestion (ODG), explique Laurent Fidèle, délégué territorial Aquitaine Poitou-Charentes au sein de l’INAO (Institut national de l’origine et de la qualité). Ensuite, une fois le cahier des charges élaboré (désignant l’aire géographique, les conditions de production ou la liste des cépages autorisés), deux instances devront se prononcer : les comités nationaux IGP Vin (pour son acceptation) et AOC Vin (pour son retrait). Une double commission d’enquête qui pourrait prendre plusieurs mois.
Si ces deux demandes sont validées, deux mois supplémentaires permettront à tout opposant de se manifester au cours de la procédure nationale d’opposition. Enfin, le dossier serait soumis à la Commission européenne pour une reconnaissance. En tout état de cause, cette ambition serait « un cas rarissime de changement de segment », livre Laurent Fidèle, qui ajoute : « Habituellement, le mouvement va plutôt en hiérarchisation », soit d’IGP en AOC. Le représentant de l’INAO souligne aussi la bonne dynamique de l’IGP Atlantique qui s’étend sur cinq départements et avoisine aujourd’hui les 100 000 hectolitres de production. Avec l’arrivée des Bordeaux, elle exploserait les compteurs, multipliant ses volumes par dix.