La polémique enfle à Marseille autour du tournage de la série israélienne « Fauda ». Initialement évoquée dans la cité phocéenne, la saison 5 sera finalement tournée à Budapest, une décision qui a rapidement pris des allures de règlement de comptes politiques.
Tout est parti lundi de médias israéliens annonçant l’annulation partielle du tournage prévu à Marseille pour « des raisons de sécurité ». La série « Fauda » (qui signifie chaos en arabe) met en scène une unité israélienne infiltrée combattant des Palestiniens. La bande-annonce de la dernière saison montre d’ailleurs plusieurs plans de la ville, dont la basilique de la Bonne-Mère, avec au casting l’actrice française Mélanie Laurent.
L’annonce a suscité de vives réactions locales, notamment de la présidente divers droite du département, Martine Vassal, qui a écrit sur X : « Comment Marseille peut-elle laisser l’antisémitisme s’installer au point de dissuader les artistes ?».
Pas de raisons de sécurité, selon la production
Jeudi, la société israélienne YES Studios, productrice de la série, a démenti cette version : « Les questions de sécurité ne sont pas à l’origine du transfert du tournage de la 5e saison de Fauda de Marseille à Budapest », a-t-elle affirmé à l’AFP.
La mairie a confirmé que le projet « n’en était même pas encore au stade des autorisations de tournage » et qu’il avait été abandonné « notamment pour des raisons logistiques ». Une source proche du dossier a précisé que le contexte géopolitique compliquait fortement l’organisation, la production redoutant « des blocages de tournages », comme ceux qui perturbent actuellement la Vuelta en Espagne avec des manifestations propalestiniennes.
Une affaire très politique à Marseille
À quelques mois des municipales et dans un climat tendu, l’affaire a pris une tournure politique. L’adjoint aux écoles Pierre-Marie Ganozzi a interpellé Martine Vassal sur X, dénonçant « une fake news de plus ! Mensonges et outrances !». Son collègue Jean-Pierre Cochet a de son côté fustigé « l’instrumentalisation d’un ‘antisémitisme de Marseille’ fictionnel », suscitant immédiatement les critiques de la droite.
Cette querelle illustre la sensibilité du sujet dans une ville marquée par une forte diversité culturelle, mais aussi par des tensions accentuées après une agression au couteau en plein centre-ville mardi.
Une ville touchée par l’antisémitisme
Marseille, façonnée par l’immigration et connue pour son vivre-ensemble, abrite parmi les plus importantes communautés juives et musulmanes d’Europe. Mais elle n’a pas été épargnée par la montée des actes antisémites après le 7 octobre 2023, comme ailleurs en France.
Une source policière a confirmé une hausse de ces actes, essentiellement des dégradations comme des tags et inscriptions, alors que le nombre d’agressions physiques est resté stable. Fabienne Bendayan, présidente du Crif Marseille-Provence, a regretté auprès de l’AFP que la décision de la production « entache l’image de la ville », rappelant toutefois la réputation « sulfureuse » de Marseille en termes de sécurité. « On doit reconnaître qu’on a été assez préservés, mais Marseille n’a pas été épargnée par la flambée d’antisémitisme », a-t-elle ajouté.
Elle a cité plusieurs incidents récents : insultes, une agression, ainsi que l’arrachage d’affiches en hommage à Ilan Halimi, jeune Juif torturé à mort en 2006. Selon le ministère de l’Intérieur, entre janvier et mai 2025, 504 actes antisémites ont été recensés en France, dont 323 atteintes aux personnes, soit une baisse de 24 % sur un an mais un doublement (+134 %) par rapport à 2023.
Avec AFP