Par
Inès Cussac
Publié le
6 sept. 2025 à 18h48
« Le graf’, tu ne le vois jamais vieillir normalement. Mais là, tout est resté. » L’artiste pointe sa lampe torche sur l’une des fresque murale de l’ancien supermarché de la porte de la Villette à Paris (19e). Ici, on n’y voit rien. Justement. L’obscurité a parfaitement conservé le Mausolée, ce temple dédié au graffiti et investi par le duo de street artistes Lek & Sowat entre 2010 et 2011. Plongé dans le noir et sans une seule visite pendant 15 ans, le lieu s’est figé dans le temps. La poussière s’est amassée et les dernières traces de vie ne sont que des carcasses parsemant le sol. C’est en somme un véritable trésor pour les passionnés de street art et d’urbex qui pourront le découvrir cet automne. Tel quel.
La genèse d’une collaboration
« Il y a déjà eu un gros déblayage mais l’idée n’était pas d’en faire un truc aseptisé », explique François Dagnaud, maire (PS) du 19e arrondissement. Avec Carine Rolland, adjointe à la maire de Paris en charge de la Culture, ils ont oeuvré pour permettre l’ouverture au public de cet ancien Casino, devenu un squat puis une résidence artistique sauvage où une trentaine de virtuoses de la bombe de peinture est venue laisser son empreinte. « A l’époque, on leur demande de suivre un protocole très précis : de ne pas dire que ça existe, de ne pas montrer de photo, de ne pas en parler autour d’eux pour que ça reste mystérieux », se souvient l’artiste Sowat dont la genèse de la collaboration avec Lek remonte justement à la découverte de ce supermarché abandonné lors d’une exploration urbaine. « Quand nous avons découvert ce lieu, il y avait 40 000 m² de murs vierges« , rembobine-t-il.
Le duo passe une année complète dans l’enceinte oubliée, cachant le matériel dans l’une des voiture abandonnée « parce qu’on ne savait jamais ce qu’il pouvait arriver ». « On faisait avec les moyens du bord à l’époque. On n’avait aucun budget, mais on testait tout ce qu’on pouvait », garde en tête Lek.
Après leur départ, d’autres artistes et explorateurs urbains ont aussi laissé une marque de leur passage avant que l’entrée au site ne soit rendu impossible par la Ville de Paris, propriétaire. « Le fait que ce lieu soit fermé, ça a conservé tout un tas de chose », remarque aujourd’hui Sowat avant de montrer l’une des allée du parking au premier étage où des centaines de noms d’artistes sont inscrits. « C’est une espèce de livre d’or que tous ceux du milieux sont venus signer. »
Une « légende urbaine »
Cette « légende urbaine » est pourtant vouée à disparaître dans le cadre de l’aménagement de la porte de la Villette. « Ce lieu porte une histoire, une mémoire et porte aussi une perspective d’avenir. L’ancien Casino n’aura sans doute pas vocation à perdurer dans les années qui viennent dans le cadre et à la faveur de la transformation de la Villette », souligne François Dagnaud. Là est sans doute la restauration du caractère éphémère du graffiti.
Votre région, votre actu !
Recevez chaque jour les infos qui comptent pour vous.
A partir du 1er octobre et jusqu’au 7 novembre 2025, le public pourra visiter gratuitement le Mausolée et avec l’accompagnement d’un médiateur de l’association RStyle. « On pourra faire visiter ce lieu par groupes de 19 personnes à la lampe torche, un petit peu cryptique, comme si on les ramenait à Lascaux ou à Chauvet », illustre Sowat.
Personnalisez votre actualité en ajoutant vos villes et médias en favori avec Mon Actu.