Reform, qui a succédé au «Brexit Party», engrange de nouveaux soutiens alors que les travaillistes (centre-gauche), au pouvoir depuis juillet 2024, sont de plus en plus impopulaires.
Le Premier ministre japonais, Joanne Woodhouse, a rejoint le parti d’extrême droite britannique Reform il y a deux mois, après avoir voté travailliste pendant des années. Henry Godwin, lui, était conservateur. En faisant le plein de désenchantés de tous bords, la formation de Nigel Farage bouleverse le paysage politique au Royaume-Uni. «Le changement est encore possible !» «L’espoir est de retour» : au congrès de Reform UK, qui s’est déroulé vendredi et samedi à Birmingham, dans le centre de l’Angleterre, des Britanniques semblent avoir retrouvé foi en la politique. Reform, qui a succédé au «Brexit Party», engrange de nouveaux soutiens alors que les travaillistes (centre-gauche), au pouvoir depuis juillet 2024, sont de plus en plus impopulaires. Les conservateurs (droite), eux, ne semblent pas savoir comment rebondir après leur défaite historique l’an dernier.
Comme dans de nombreux autres pays européens, l’extrême droite monte au Royaume-Uni, mais à un rythme soutenu. Reform, un parti nationaliste, anti-immigration, est en tête des sondages et creuse l’écart. Kate Stevenson, 52 ans, est venue samedi au congrès vêtue d’une veste turquoise, la couleur du parti. Elle a pris sa carte de membre deux jours plus tôt. «Nous avons besoin de leadership», dit cette femme de Liverpool (nord), qui votait auparavant pour les Verts ou des partis indépendants. «Nous voulons protéger notre culture», explique-t-elle, en critiquant ceux qui ne font pas d’effort d’«intégration». «Ce n’est pas du racisme !» Parmi les sujets qui lui tiennent à cœur, figure la liberté d’expression. En 2016, elle avait voté contre le Brexit, le grand succès de Nigel Farage. «On ne peut pas être d’accord sur tout», dit Kate Stevenson en souriant. Mais elle est «dégoûtée» par les travaillistes et veut du changement.
«Patriotes pessimistes»
Selon Reform, le parti compte plus de 240 000 membres, contre 80 000 il y a un an. «Nous constatons une grande désillusion, un manque de confiance généralisé et les gens ont le sentiment que Reform est la seule alternative», résume auprès de l’AFP James Johnson, fondateur de l’institut de sondage JLP, classé à droite. Dans sa dernière enquête d’opinion, présentée au congrès, Reform obtient 32% des intentions de vote, 10 points de plus que les travaillistes. Aux législatives de juillet 2024, le parti de Nigel Farage a obtenu 14% des voix. Les prochaines élections devraient avoir lieu en 2029. Joanne Woodhouse a elle rejoint Reform il y a deux mois et elle affiche son ambition : se présenter aux prochaines élections locales. Reform a réalisé une percée à celles du printemps dernier. A 57 ans, Joanne a voté travailliste pendant des années, mais elle est «totalement déçue» par ce parti. Elle a été particulièrement choquée par la suppression d’une aide au chauffage pour les personnes âgées, depuis rétablie. «Les gens souffrent», dit-elle. Reform «renforcera nos frontières», «protègera nos traditions et nos valeurs», croit-elle.
Henry Godwin, 52 ans, s’est lui tourné vers Reform il y a un an, après la chute du parti conservateur qu’il soutenait. «Les conservateurs ont perdu le Nord», estime-t-il. Alors il compte sur Reform : «Tout ce qu’ils défendent correspond à mes convictions, l’équité, le conservatisme et les valeurs familiales.» Pour le think tank More in Common, «il est désormais difficile de cataloguer les électeurs de Reform». Comme leur base électorale s’est élargie, les électeurs ressemblent de plus en plus au Britannique moyen.
Cela représente «un défi», selon le directeur de ce think tank, Luke Tryl, Reform saura-t-il «trouver un équilibre entre les revendications radicales de certains partisans et celles, plus prudentes, de ses nouveaux convertis ?» Selon l’enquête de James Johnson, près de la moitié des partisans de Reform UK restent des «patriotes pessimistes» : des Britanniques très négatifs sur l’évolution du pays, pour lesquels la priorité est la lutte contre l’immigration. Cela reste d’ailleurs le sujet préféré de Nigel Farage. Vendredi, il a affirmé au congrès qu’il arrêterait les bateaux de migrants dans la Manche «en deux semaines», s’il arrive au pouvoir. Une semaine plus tôt, il avait promis d’expulser jusqu’à 600 000 migrants en cinq ans s’il était élu.