Alors qu’elle recevait, émue, le Talent Award lors de la cérémonie d’ouverture du 51ème festival du film américain de Deauville, Pamela Anderson s’est confiée comme rarement. Derrière ses lunettes, elle exprime avoir, pendant longtemps, gardé secrètes ses amours pour le cinéma et la littérature classique. Une confidence qui n’étonne pas celles et ceux qui comprennent comment la réputation de l’ancienne actrice d’Alerte à Malibu a pu l’empêcher d’être prise au sérieux, avant la sortie, en 2023, de Pamela, A Love Story, documentaire édifiant qui lui a permis de reprendre le contrôle sur son histoire. Rencontre.

La trajectoire Pamela Anderson, symptôme d’une industrie rance

“Pourquoi ne pouvons-nous pas être les héros de nos propres histoires ?” interrogeait Pamela Anderson dans Pamela, A Love Story, documentaire de Ryan White diffusé sur Netflix il y a deux ans (et en partie produit par Brandon Thomas Lee, l’un des deux fils de l’actrice). Une question qui cristallise, peu ou prou, sa carrière, forgée par la manière dont les médias souhaitaient voir l’actrice, en sex symbol plutôt qu’en comédienne accomplie. “N’avez-vous pas envie d’être une actrice sérieuse ?” lui demandait une journaliste sur le tournage d’Alerte à Malibu. Et si Pamela Anderson répond qu’elle est une actrice sérieuse, seuls les rires accueillent sa déclaration. Présenté comme le moyen de “reprendre le contrôle”, le documentaire marque pour elle un tournant sans précédent, puisqu’il est l’œuvre par laquelle la réalisatrice Gia Coppola décide de l’engager pour jouer Shelly, personnage principal de son troisième long-métrage, The Last Showgirl. Un rôle à la mesure de Pamela Anderson, tant Shelly partage de nombreux points communs avec son interprète. Une femme dont le physique, correspondant à tous les standards de beauté, a été un formidable levier de notoriété comme un handicap, dans une quête désespérée pour être prise au sérieux dans une industrie profondément sexiste. Plus encore, Shelly souffre de l’âgisme qui prévaut dans l’entertainment, qui n’épargne pas les femmes qui auraient eu l’audace de passer la cinquantaine, et rester sur le devant de la scène.

Rencontrée le lendemain de la cérémonie d’ouverture du Festival du film américain de Deauville, Pamela Anderson confie la source de ses secrets : “J’avais un grand-père finlandais, ce qui veut dire qu’il excellait dans l’art de raconter des histoires. C’est à lui que je dois ma passion pour les grands récits narratifs. Sa bibliothèque, par exemple, était impressionnante. C’est là que j’ai trouvé Shakespeare, dont j’apprenais les vers par cœur, explique-t-elle. Pourtant, j’étais trop timide pour m’inscrire à un seul cours de théâtre, ça me semblait impossible !” Une timidité que l’actrice conserve tout au long de sa vie, jusqu’à réprimer ses rêves de cinéma. Cataloguée comme une sulfureuse playmate suite à ses apparitions en couverture du magazine Playboy, puis comme une fille facile et vulgaire suite au vol et à la mise en ligne de sa sextape avec son ex-mari, le musicien Tommy Lee. “J’ai nourri cette caricature de moi-même, car elle me protégeait, en quelque sorte, raconte-t-elle. Mais plus le temps passait, et moins je m’y sentais à l’aise, car je n’étais pas cette personne !”