Rares sont les occasions d’admirer ses œuvres en France, où son nom demeure largement méconnu. Pourtant, outre-manche, Barbara Hepworth est bel et bien considérée comme une reine de la sculpture, aux côtés de son compatriote Henry Moore. En 2019, le musée Rodin lui avait consacré – enfin – une importante rétrospective. Plus de cinq ans plus tard, la fondation Maeght remet à l’honneur l’artiste britannique, et cela semble une évidence : c’est en effet dans son paisible jardin, à l’ombre de la pinède, que se dresse l’une des seules sculptures d’Hepworth exposées de façon permanente dans l’Hexagone.
Joliment orchestrée par Eleanor Clayton, responsable des collections et des expositions à The Hepworth Wakefield au Royaume-Uni, cette rétrospective met en lumière les grandes étapes de la carrière de l’artiste, dans un parcours chronologique riche d’une centaine d’œuvres comprenant bien sûr des sculptures, mais aussi un certain nombre d’œuvres sur papier sublimes, à la surface desquelles semblent flotter des formes célestes et colorées.
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Barbara Hepworth en 2 minutes
Virtuose de la taille directe
Barbara Hepworth avec le prototype pour Single Form, fonderie Morris Singer, Londres, mai 1963
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Photo Morgan-Wells / © Bowness
Formée au College of Art de Leeds (comme Henry Moore) et au Royal College de Londres, la sculptrice originaire du Yorkshire a bien vite délaissé la figuration de ses débuts pour explorer les infinies possibilités de l’abstraction. Séparée de son premier mari, elle se rend à Paris au début des années 1930, où vit son second époux, l’artiste Ben Nicholson. Elle y fréquente alors la fine fleur de l’avant-garde – Jean Arp, Constantin Brancusi, Pablo Picasso… – et rejoint les rangs du groupe Abstraction-Création.
Adepte, comme Henry Moore, de la taille directe, Barbara Hepworth fait naître du marbre, du bois mais aussi du bronze, des formes organiques à l’envoûtante sensualité. La sculptrice, un tout petit bout de femme au geste puissant, n’hésite pas à se mesurer à des formats monumentaux, comme en témoigne l’immense Single Form (1961–1964) qui trône sur la place des Nations Unies à New York.
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Inspirée par la nature, le mouvement, le cosmos
« Parcourant le paysage du West Riding avec mon père dans sa voiture, les collines étaient des sculptures ; les routes définissaient les formes » se souvenait l’artiste profondément inspirée par la nature. Installée en Cornouailles à partir de 1939 pour fuir le Blitz, Hepworth se laisse durablement influencer par cet environnement verdoyant à la beauté sauvage : « J’ai utilisé la couleur et les fils dans de nombreuses sculptures de cette période. La couleur dans les concavités me plongeait dans la profondeur de l’eau, des grottes ou des ombres plus profondes que les concavités elles-mêmes. Les fils représentaient la tension que je ressentais entre moi, la mer, le vent ou les collines. »
Exposition Barbara Hepworth : Art & Life à la Fondation Maeght, 2025
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Photo Thérèse Verrat et Vincent Toussaint / © Bowness
De fait, l’artiste sculpte autant les vides et les pleins. Parfois, ses œuvres s’habillent de fils métalliques, qui évoquent aussi bien les cordes d’un instrument que la portée d’une partition. La musique, comme le mouvement imprègnent son travail : « On est physiquement impliqué, et c’est ça, la sculpture […] C’est le rythme, la danse et tout le reste » expliquait celle qui a installé son atelier dans l’ancien Palais de Danse de St Ives en 1961.
Barbara Hepworth, Sun and Marble, 1971
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Lithographie originale sur papier • 77 × 55 cm • Coll. Wakefield Council Permanent Art Collection (The Hepworth Wakefield) • © Bowness
Proche de la nature, Hepworth était tout autant fascinée par les progrès scientifiques de son temps, en particulier la conquête spatiale. Celle-ci trouve un écho dans ses dessins peuplés de soleils, de lunes et d’autres astres mystérieux, dont les titres se réfèrent parfois la Bible. Adepte de la Christian Science, une doctrine religieuse apparue aux États-Unis au XIXe siècle, l’artiste encourageait une lecture spirituelle de son œuvre, affirmant même qu’ « une sculpture devrait être un acte de louange, une expression durable de l’esprit divin ». Dans ce superbe écrin qu’est la fondation Maeght, on se laisse tout entier happer par les vibrations cosmiques de l’œuvre d’Hepworth.
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Barbara Hepworth. Art & Life
Du 28 juin 2025 au 2 novembre 2025
Fondation Maeght • 623 Chemin des Gardettes • 06570 Saint-Paul-de-Vence
www.fondation-maeght.com
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