Dans la nuit de dimanche à lundi, le réseau Tisséo a été frappé part une vaste opération délictueuse. Les filtres à particules des bus recèlent de précieux métaux. Un casse qui paralyse le service.

En pleine rentrée scolaire, alors que les bus Tisséo transportent chaque jour des milliers de voyageurs dans l’agglomération toulousaine, près de quarante véhicules sont cloués au sol. Dans la nuit du dimanche 7 au lundi 8 septembre, des individus se sont introduits dans le dépôt de Colomiers. Le lendemain matin, les agents ont découvert des dizaines de véhicules démontés, privés de leurs filtres à particules (FAP). Ces cylindres métalliques, lourds d’une quinzaine de kilos et truffés de métaux précieux, sont très prisés sur les marchés parallèles.

« Quarante bus démontés en une seule nuit… il y a une logistique et un savoir-faire derrière », souffle Jean-Philippe Favier, secrétaire général de la CGT Tisséo. Le préjudice est évalué à environ 400.000 euros, selon l’entreprise publique.


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Le parquet de Toulouse confirme l’ampleur des dommages : 37 bus destinés aux voyageurs quotidiens ont été immobilisés. Et contrairement à l’idée d’une opération «propre», «il y a des dégradations sur les bus et dans le grillage du site», précise-t-il.

Un réseau totalement déstabilisé

Au-delà des dégâts matériels, c’est tout le service de transport qui souffre. Pour les voyageurs, les répercussions se font sentir immédiatement : «sept lignes de Colomiers ont été affectées dès lundi. On a dû retirer des bus d’autres sites pour combler les manques», détaille Jean-Philippe Favier. Résultat : certaines lignes ont été suspendues, d’autres circulent au ralenti.

«C’est le cœur de notre métier qui est touché», s’inquiète le représentant syndical. En cette rentrée, parents et élèves sont directement pénalisés. Combien de temps faudra-t-il pour remplacer ces pièces coûteuses et remettre en service autant de bus ? L’entreprise Tisséo affirme «œuvrer pour rétablir progressivement l’ensemble des lignes impactées d’ici la fin de la semaine.» Mais quant à la réparation des véhicules, Jean-Philippe Favier se montre plus inquiet : «On ne sait pas combien de temps il faudra pour remettre ces bus en service. Je ne pense pas qu’on ait autant de filtres en stock. Ils sont coûteux, et leur remplacement ne se fera pas en quelques heures.»

Pour les syndicats, cet épisode est le révélateur d’une fragilité déjà pointée. «Ce n’est pas la première fois que la sécurité est mise sur la table», rappelle le secrétaire de la CGT. Intrusions nocturnes, personnes retrouvées à errer dans les dépôts sous des prétextes douteux… «On avait demandé une révision du système de vidéosurveillance. Il faudra voir si les images parleront», poursuit le syndicaliste, qui refuse de mettre en cause directement les agents de sécurité présents cette nuit-là, préférant attendre les premiers éléments d’enquête. Les différents sites de Tisséo, malgré des grillages, caméras et poste de garde, sont loin d’être inviolable. «Il est déjà arrivé plusieurs fois que des personnes se promènent dans les parcs de bus en pleine nuit en prétextant s’être perdues. Pour autant, il est vrai qu’on avait jamais vu quelque chose de cette ampleur.»

Une enquête confiée à la police judiciaire

Tisséo a déposé plainte dès lundi. Le parquet a ouvert une enquête pour vol aggravé, sous trois circonstances : les dégradations commises, l’effraction dans un local contenant des biens et marchandises, et l’action en réunion. «On en déduit que les auteurs étaient plusieurs, vu la manière d’opérer.»


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L’affaire a été confiée à la Direction criminalité territoriale (DCP) et à la Direction territoriale de la police judiciaire de Toulouse (DIPJ) , plus particulièrement au groupe spécialisé dans les cambriolages. Leur mission : identifier des malfaiteurs qui, en un temps record, ont neutralisé un pan entier du réseau. De son côté, Tisséo a renforcé sa surveillance avec des rondes réalisées par des maîtres-chiens. Car c’est aussi la veille qui interroge : «il y a toujours des rondes, toujours quelqu’un sur site, même de nuit. Pour démonter autant de bus, on ne fait pas ça en improvisant», insiste Jean-Philippe Favier avant de développer : «ces filtres ont l’air tout de même assez faciles à démonter. Ils sont fixés par de simples colliers métalliques, il n’y a pas besoin de disqueuse par exemple. Je ne pense pas que l’opération ait fait du bruit. En tout cas ils ont dû faire ça très rapidement pour ne pas se faire remarquer», conclut ce dernier.