Saisi en référé par la Ligue des Droits de l’Homme, le Tribunal administratif de Rennes a estimé, vendredi 18 avril, que l’usage de drones pour lutter contre le trafic de stupéfiants ne portait pas une atteinte disproportionnée aux libertés individuelles.

Au-dessus des têtes, de drôles d’engins continueront de voler au moins jusqu’au 30 avril à Rennes. Ce vendredi 18 avril, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté la requête de la Ligue des Droits de l’Homme, qui estimait que les arrêtés permettant à des drones de survoler le centre-ville portaient une atteinte aux «libertés individuelles» des habitants.

Début avril, le nouveau préfet d‘Ille-et-Vilaine Amaury de Saint-Quentin a pris quatre arrêtés pour permettre le survol du centre-ville ainsi que des quartiers sensibles Maurepas-La Bellangerais, Anatole France-Beauregard et Villejean-Cleunay par des drones capables de «capter, enregistrer et transmettre» des images. Le but affiché : «lutter contre le trafic de stupéfiants» et «les violences qu’il engendre» à Rennes, en application du Plan d’action départemental de restauration du quotidien (PADRSQ) que le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a demandé aux préfets de mettre en place début février 2025. Trois axes prioritaires ont été fixés par le ministère concernant le département d‘Ille-et-Vilaine, au premier rang desquels «l’intensification de la lutte contre le développement des trafics de stupéfiants», notamment en développant le «renseignement criminel» et en «prévenant l’entrée dans les trafics».

Jeudi 17 avril, le quartier populaire de Villejean est devenu le théâtre d’une fusillade, faisant trois blessés par balle et un quatrième percuté par la voiture des tireurs. Le parquet de la juridiction interrégionale de Rennes (JIRS) a été saisi vendredi. «La guerre que nous menons contre le narcotrafic n’admet aucune relâche et aucune faiblesse. Elle sera longue et difficile, mais nous la gagnerons, à Rennes comme ailleurs», a réagi sur X le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, indiquant qu’une compagnie de CRS envoyée jeudi «restera sur place aussi longtemps que nécessaire».

Usage permis mais encadré

Le même jour, le juge des référés du Tribunal administratif de Rennes se prononçait sur la requête de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH), arguant que les arrêtés du préfet ne reposaient sur aucun «rapport circonstancié sur l’augmentation du trafic de stupéfiants» et qu’il n’était «pas démontré que certaines rixes ou cambriolages ont un lien direct avec le trafic de stupéfiants». «On nous dit que ces outils magiques vont servir à protéger la population de l’augmentation du trafic de drogue, mais ça fait cinquante ans que ça dure, ça augmente d‘année en année !», a plaidé l’avocat de la LDH, lors de l’audience jeudi 17 avril. Il a également dénoncé une mesure qui «couvre énormément de personnes» et atteint fortement «fortement» les «libertés individuelles».

Mais le juge a rejeté la requête, estimant que les mesures prévues par les quatre arrêtés «n’apparaissent pas disproportionnées par rapport aux objectifs qu’ils poursuivent de prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés, en raison de leurs caractéristiques ou des faits qui s‘y sont déjà déroulés, à des risques d’agressions, de vols ou de trafics d’armes, d’êtres humains ou de stupéfiants.»

L’usage des drones reste néanmoins strictement encadré, comme l’a précisé la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) dans un avis rendu le 28 avril 2023. Les caméras aéroportées ne peuvent ni procéder à la captation du son, ni comporter de traitements automatisés de reconnaissance faciale. Hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, les images sont conservées pendant une durée maximale de sept jours à compter de la fin du déploiement du dispositif, en l’occurrence le 30 avril prochain concernant l’agglomération de Rennes.