Les préfets du Bas-Rhin et de la Moselle ont tous deux pris un arrêté autorisant l’usage, par les forces de l’ordre, dans des périmètres géographiques définis, de drones « équipés de caméras de surveillance lors des manifestations » du mouvement « Bloquons tout » ce mercredi.
Le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a été saisi de deux recours en « référé-liberté » contre ces arrêtés, recours déposés par le syndicat des avocat.e.s de France (SAF), le syndicat de la magistrature (SM) et l’association de défense des libertés constitutionnelles (Adelico) Ce type de recours permet au juge de prendre en urgence des mesures « pour préserver l’exercice d’une liberté fondamentale lorsqu’une atteinte grave et manifestement illégale y est portée par l’administration ». Le juge doit s’assurer que cette mesure de surveillance est « bien nécessaire et proportionnée ».
L’arrêté validé dans le Bas-Rhin, mais retoqué en Moselle
Notant que l’arrêté du préfet du Bas-Rhin reste circonscrit à un périmètre géographique bien limité et cartographié, dans lequel des débordements ont déjà eu lieu dans le passé, le juge a convenu qu’il faut aux forces de l’ordre « pouvoir disposer d’une vision globale permettant de déceler rapidement toute dégradation ou mouvement de foule et orienter les interventions des services de sécurité ».
Le juge a estimé en revanche que l’arrêté du préfet de Moselle portait, de manière générale et sans justification de la réalité du risque, sur une zone de survol très large s’étendant aux communes de Metz, Longeville-lès-Metz, Montigny-lès-Metz, Scy-Chazelles, Le Ban-Saint-Martin, Plappeville, Woippy, Saint-Julien-lès-Metz. « Le préfet n’apportait ainsi pas la preuve que les objectifs de maintien de l’ordre ne pouvaient être atteints sans recourir à l’utilisation des drones », souligne le tribunal administratif.
L’arrêté du préfet de Moselle a donc été suspendu. En revanche, l’usage de drones par les forces de l’ordre dans le cadre des manifestations de ce mercredi est autorisé à Strasbourg.
Des manifestations sont prévues ce mercredi à Strasbourg (départ à 14 h de la place Kléber) et à Mulhouse (départ à 14 h du square de la Bourse). À Colmar, un rassemblement est prévu à 11 h au kiosque du Champ de Mars pour débattre d’une action collective à suivre.
D’autres rassemblements sont programmés: à Saverne, place de la Gare, avant un convoi prenant la route vers Strasbourg ; à Sélestat à 10h, place d’Armes ; devant le siège de la CEA, place du Quartier-Blanc à Strasbourg, où un «bal des indignés» pourrait se tenir ; au rond-point de Kingersheim dès 9h.
Le collectif « Mobilisation Val d’Argent » de son côté a annoncé mardi soir que son action de mercredi 10 septembre aura lieu à partir de 16h30 au rond point de l’entrée du contournement de Châtenois, à la convergence des routes de la vallée de Villé et du Val d’Argent. Un covoiturage est organisé depuis Sainte-Marie-aux-Mines, parking de Corne & Caotte à 16h.
Mais le mouvement “Bloquons tout”, par définition, ne peut se contenter de manifester : chacun a encore en tête l’échec des mobilisations syndicales contre la dernière réforme des retraites. Sont notamment envisagés la perturbation du trafic routier sur les rocades des grandes agglomérations et ferroviaire aux environs des gares, des blocages de caisses dans des hypermarchés, des blocages de dépôts pétroliers, des opérations “péage gratuit” sur les autoroutes… À Strasbourg, rendez-vous est donné pour un « échauffement » à l’arrêt de tram Montagne-Verte dès 7 h.
Dans l’agglomération strasbourgeoise, les commissariats de secteur seront fermés afin de concentrer les forces sur la sécurisation du mouvement « Bloquons tout ». Les commerçants se trouvant sur le parcours des manifestations ont été sensibilisés par les forces de l’ordre. Dès ce mardi matin, plusieurs magasins strasbourgeois ont posé des panneaux de bois pour protéger leurs vitrines. Des sources policières indiquent qu’une attention particulière sera portée aux éventuels blocages d’établissements scolaires, de zones commerciales (à l’instar du Kaligone à Kingersheim), d’autoroutes ou de dépôts de transports en commun. La semaine de session du Parlement européen complique la chose à Strasbourg, où ils seront au moins 150 policiers, épaulés par des unités mobiles. AMulhouse, «un maximum d’effectifs» seront déployés, des personnels en repos étant rappelés.
De leur côté, les militants syndicaux ralliés au mouvement citoyen ces dernières semaines insistent sur l’importance de la grève. « Ce n’est pas en restant chez nous ou en ne se servant pas de nos cartes de crédit [autres “actions” évoquées sur les réseaux sociaux, NDLR] que l’on va réussir à destituer Macron. Il faut comprendre que ce droit constitutionnel qu’est la grève, c’est celui qui nous expose le moins à la répression, c’est aussi le moyen plus efficace de bloquer le pays », a plaidé Mathieu Relin, élu Grand Est de Sud Rail à la SNCF, samedi devant le collectif haut-rhinois.