Cédric est diagnostiqué d’un cancer de la gorge suite à une infection au papillomavirus à l’âge de 43 ans : « J’ai été malade pendant plusieurs mois et j’ai fait traîner. Au début, j’avais juste mal à gorge, du mal à avaler, des choses comme ça. Je me disais que c’était un coup de froid. Quand ça n’est pas passé, je me disais que je n’avais pas fait ce qu’il fallait et que j’étais juste trop fatigué pour guérir. Et puis ça s’est empiré. J’ai été voir mon médecin en lui disant bien que j’avais fait traîner. Il a regardé. Il a vu des choses bizarres, je pense, parce qu’il m’a envoyé faire des examens complémentaires. Dans la semaine, j’avais le diagnostic : cancer de la gorge à cause du papillomavirus. J’avais les sortes de verrues qu’on peut avoir à cause de ce virus donc, c’était clair que c’était la cause. On m’a expliqué d’où ça venait. J’ai appris qu’on pouvait attrapé ça en faisant du sexe oral. J’en avais à peine entendu parler pour le sexe tout court. Je pense que c’est surtout les femmes qu’on embête avec ça. Et, évidemment, je ne fais pas partie de la génération qui a été vaccinée. »
Le papillomavirus déclenche de la honte chez Cédric
À cause du virus, Cédric n’assume pas être malade : « Quand on pense cancer de la gorge, on pense forcément gros fumeur. Ce n’est pas mon cas. Donc les gens s’étonnaient. Ça aurait pris une seconde de dire que c’était à cause du papillomavirus. Mais, à cette époque, j’ai eu honte. Ça impliquait forcément de la sexualité. Ça impliquait forcément les fameuses verrues pour ceux qui connaissent. Ça impliquait que je n’avais pas fait attention. En dehors de ma femme, j’ai eu du mal à en parler. J’ai pu le faire bien après à des amies de confiance qui m’ont partagé leurs expériences avec le papillomavirus. Ce qui est fou, c’est que les femmes connaissent bien ça. Je ne sais pas si elles en parlent entre elles mais toutes celles à qui j’en ai parlé avaient une histoire dessus. Soit du stress à attendre des résultats d’examens genre frottis ou biopsie, soit des trucs plus graves et chirurgicaux, comme l’ablation d’une partie du col de l’utérus. Et personne n’en parle. Avec la maladie, j’ai découvert tout un monde lié aux femmes. Ça m’a rapproché des femmes en fait. Un simple cancer de la gorge, ça n’aurait pas fait ça. Là, j’ai été accepté dans une sorte de groupe secret des gens, des femmes, qui ont des histoires de papillomavirus. J’ai rencontré des hommes aussi. J’ai eu un médecin qui insistait pour que fasse des groupes de parole, quand j’ai été capable d’en faire, donc j’ai vu qu’il y avait des hommes aussi. C’est fou le silence qu’il y a autour de ces maladies. »
Cédric vit ce qu’il estime être une guerre psychologique
Cédric est désormais guéri : « Il y a toujours un risque d’en mourir. C’est pour ça qu’il faut être bien entouré. Tu sais qu’il y a le risque d’en mourir, mais tu dois aussi avoir un super moral pour aider ton corps à affronter la maladie. C’est très dur de trouver cet équilibre. Moi, j’ai eu la chance d’avoir des super médecins, ma femme et mon fils. Sans ça, j’aurais baissé les bras. On dit que la maladie c’est dur, mais, pour moi, ça a été surtout tout ce qu’il y a autour, mes a priori sur la maladie, mes idées reçues, le jargon médical que je ne comprenais pas toujours, les questions que je posais et qui n’avaient pas toujours de réponse. C’est une guerre du corps mais c’est aussi une guerre psychologique. C’est comme ça que je l’ai vécu en tout cas. Et c’est ce qui a été le plus dur pour moi, c’est sûr. »
Cédric a insisté auprès de sa femme pour vacciner son fils : « Ma femme, même si elle a vécu tout ça avec moi, ne voulait pas qu’on lui fasse le vaccin. Elle pensait qu’il y avait un risque de je ne ne sais pas quoi. Heureusement, j’avais notre généraliste de mon côté. Et mon fils était d’accord aussi. Je ne pouvais pas prendre le risque qu’il vive ce que j’ai vécu, ou qu’il le fasse vivre à quelqu’un aussi. Parce que, même si on est porteur du virus sans souffrir de quoi que ce soit, on peut quand même le transmettre et prendre le risque de faire tomber quelqu’un malade. On parle des cancers du col de l’utérus mais il y a plusieurs cancers qui peuvent se développer à cause du papillomavirus. Ce n’est pas anodin. Je ne comprends pas pourquoi on ne fait pas de plus grandes campagnes là-dessus. Pour mon fils, en tout cas, je n’ai pas hésité. »
Personne n’est à l’abri de developper une maladie grave, rare ou à vie. Certains et certaines passent presque du jour au lendemain de personne en bonne santé à personne malade. Ces personnes doivent apprendre à vivre avec la maladie mais aussi à s’accepter en tant que personne malade, un processus psychologique rendu parfois compliqué par l’errance médicale. La série « Malade dans la force de l’âge » revient sur ces histoires, des premiers symptômes à l’acceptation, en passant par le diagnostic.