Dans une enquête parue il y a quelques jours, Le Journal des Arts met en lumière une problématique qui touche la majorité des vingt-trois Fonds régionaux d’art contemporain (Frac) : leurs réserves se remplissent à vue d’œil et beaucoup sont déjà saturées ou vont l’être dans les prochaines années. Les collections des Frac se composent ainsi de plus de 50 000 œuvres, ce qui en fait la troisième collection d’art contemporain en France. Mais surtout, leur taille augmente de 2 à 3% par an à cause des nombreuses acquisitions réalisées par les Frac chaque année et qui fait partie de leur mission, comme l’explique Fabien Danesi, directeur du Frac Corsica :
« Je rappelle que les Frac ont été créés dans les années 1980 à la suite d’une grande politique de décentralisation visant à une accessibilité de la culture dans les régions. Les Frac ont pour principale mission de constituer une collection d’art contemporain dans la perspective de soutenir la création actuelle. L’un des autres enjeux fondamentaux, c’est d’accompagner les œuvres à travers des actions de médiation. On est vraiment dans une logique de sensibilisation à la création et les Frac sont en fait des outils de démocratisation culturelle en région. »
Des réserves qui arrivent à saturation
Chaque Frac possède sa propre collection et doit stocker dans ses réserves ces milliers d’œuvres qu’elle possède tout en ayant de la place pour celles qu’il acquerra dans le futur. Mais si certains Frac comme ceux d’Ile-de-France ou de Corse ont pu construire ces dernières années des bâtiments annexes afin de mieux gérer la conservation et le stockage de ces œuvres, la majorité d’entre eux font face à un engorgement problématique comme le rappelle Lauriane Gricourt, la directrice du Frac Occitanie :
« Les réserves sont le cœur des institutions puisqu’une de nos missions premières, c’est de conserver et de diffuser ces collections. Et c’est vrai que chaque dix ans à peu près, on se retrouve confronté à ces questions d’encombrement, de saturation des réserves et on doit toujours trouver des solutions pour optimiser les rangements, louer des réserves en extérieur. Et comme chaque année, les Frac continuent d’acquérir des œuvres qui sont de dimensions, de medium, de formats différents, à un moment donné, on se retrouve confronté à des problématiques de stockage. »
Quelles solutions pour faire vivre les collections ?
Face à ce constat, les questions d’acquisition et de conservation des œuvres deviennent cruciales. Les Frac prêtent ainsi une partie de leur collection à d’autres institutions, environ 14%, soit 6600 œuvres qui sont en circulation ou en dépôt dans d’autres musées. Une manière d’assurer une visibilité des collections et d’en faire bénéficier les territoires alentours. D’autres Frac proposent parfois des expositions à partir d’œuvres issues de leur collection afin d’assurer une mise en valeur d’une partie de leurs acquisitions. Enfin, le réagencement régulier des réserves ainsi que l’optimisation des acquisitions restent des solutions pour assurer un meilleur stockage et essayer de limiter l’engorgement, comme le raconte Lauriane Gricourt :
« On essaye en premier lieu de trouver des solutions qui n’impactent pas nos politiques d’acquisitions. Parce que impacter nos politiques d’acquisitions, c’est impacter le soutien à la création. Donc, on essaye d’optimiser nos rangements par de nouveaux mobiliers ou de nouveaux agencements. Mais on est confronté au fait de devoir repenser notre politique d’acquisition et on met en place ce qu’on appelle un protocole de conservation prédictive, c’est-à-dire qu’au-delà de la pertinence de l’œuvre par rapport à notre politique d’acquisition, on va prendre en compte d’autres critères qui sont ceux justement du stockage, de la conservation des matériaux, des dimensions des œuvres… »