Cheveux en bataille et petit sourire en coin, David, 30 ans, a la parole facile. Trop peut-être. Face au tribunal de Nancy, ce vendredi, ce maraîcher en quête d’emploi, parle beaucoup. Il mélange regrets, confession plus ou moins émouvante et ironie parfois irritante.
Ce jeune garçon un peu bohème et très paumé est LE perturbateur de la manif nancéienne qui s’est déroulée, ce mercredi, dans le cadre du mouvement national « Bloquons tout ». Lorsque le cortège a fini sur la place Stan, il a en effet eu l’idée de grimper sur la statue de Stanislas. Une initiative qui doit plus à l’alcool (il avait plus d’un gramme) qu’à l’ivresse des luttes sociales.
Les policiers ne sont pas des bâtards
Une fois perché sur le roi de Pologne et duc de Lorraine, il a tagué le socle de sa statue. Il prétend qu’il n’est pas l’auteur de tous les tags que les policiers ont découvert. Mais l’un porte son nom. Et un autre son style. Il a en effet griffonné un classique ACAB pour « all cops are bastards », c’est-à-dire, en version «french», «tous les flics sont des bâtards». Et il a rajouté : « mais en fait non, ils ne sont pas méchants ».
Ce qui fait qu’on ne sait pas trop s’il faut le prendre sérieux ou s’il se moque du monde. C’est en quelque sorte sa marque de fabrique. David jure pourtant qu’il est en train de changer, « de mûrir » et de régler son problème avec l’autorité. Ce mercredi, lors de la manif, le trentenaire ne peut nier toutefois qu’il a fait une sévère rechute d’immaturité.
Lorsqu’il a fini par descendre de la statue comme le lui ordonnaient des policiers, il a demandé à pouvoir faire quelques mètres pour prendre un sac où se trouvaient ses cigarettes. Les policiers ont eu le tort d’accepter et de ne pas l’embarquer immédiatement. Il en a profité pour essayer de s’enfuir en courant. Il a été rattrapé. Il s’est alors débattu à coups de poing et de pied et harangué les autres manifestants : « Venez m’aider ! Défoncez-les ! » a-t-il hurlé.
« J’ai pris peur »
Les policiers se sont retrouvés face à un mouvement de foule. Cela a failli dégénérer. Ils ont heureusement réussi à exfiltrer le tagueur de Stanislas avant que cela vire à l’émeute. « Je pensais pouvoir faire confiance à la police mais j’ai pris peur », se justifie David, devant le tribunal.
« Et nous, nous nous demandons si nous pouvons vous faire confiance », rétorque le président du tribunal. « Je reconnais que c’est difficile », concède le jeune homme qui a déjà été condamné cinq fois pour des violences sur des personnes dépositaires de l’autorité publique, des outrages ou des rébellions à Nancy mais aussi en Alsace et en Allemagne.
Ce vendredi, il a demandé et obtenu un délai pour préparer sa défense avant d’être jugé. Son procès a été renvoyé au 27 octobre. En attendant, la substitute du procureur a demandé son placement en détention : « Il y a encore des mouvements sociaux la semaine prochaine et je n’ai pas envie qu’il récidive. »
Privé de sortie le soir
Le tribunal a finalement décidé de le laisser libre. Enfin pas complètement libre. Car David a un contrôle judiciaire strict. Il doit respecter tout une série d’obligations.
Le jeune homme, accro à l’alcool et au cannabis, doit démarrer des soins et ne plus fréquenter des débits de boissons. Il a aussi interdiction de manifester, d’aller sur la place Stanislas et de sortir de chez lui entre 20 h et 8 h.